WizardCity, la ville oĂč tout le monde peut venir, mais oĂč personne n'est le bienvenu. L'endroit le plus mal famĂ© de la ville : le Club Neverland.
La CitĂ© de Dieu - Livre XXII - Bonheur des Saints Le sujet de ce livre est la fin rĂ©servĂ©e Ă  la CitĂ© de Dieu, c’est-Ă -dire l’éternelle fĂ©licitĂ© des saints. On y Ă©tablit la rĂ©surrection future des corps et on y explique en quoi elle consistera. L’ouvrage se termine par la description de la vie des bienheureux dans leurs corps immortels et spirituels. CHAPITRE PREMIER. DE LA CONDITION DES ANGES ET DES HOMMES. Ce dernier livre, ainsi que je l’ai promis au livre prĂ©cĂ©dent, roulera tout entier sur la question de la fĂ©licitĂ© de la CitĂ© de Dieu fĂ©licitĂ© Ă©ternelle , non parce qu’elle doit longtemps durer, mais parce qu’elle ne doit jamais finir, selon ce qui est Ă©crit dans l’Evangile Son royaume n’aura point de fin ». La suite des gĂ©nĂ©rations humaines, dont les unes meurent pour ĂȘtre remplacĂ©es par d’autres, n’est que le fantĂŽme de l’éternitĂ©, de mĂȘme qu’on dit qu’un arbre est toujours vert, lorsque de nouvelles feuilles, succĂšdent Ă  celles qui tombent, lui conservent toujours son ombrage. Mais la CitĂ© de Dieu sera vĂ©ritablement Ă©ternelle; car tous ses membres seront immortels, et les hommes justes y acquerront ce que les anges n’y ont jamais perdu. Le Dieu tout-puissant, son fondateur, fera cette merveille; car il l’a promis, et il ne peut mentir; nous en avons pour gage tant d’autres promesses dĂ©jĂ  accomplies, sans parler des merveilles accomplies sans avoir Ă©tĂ© promises. C’est lui qui, dĂšs le commencement, a créé ce monde, peuplĂ© d’ĂȘtres visibles et intelligibles, tous excellents, mais entre lesquels nous ne voyons rien de meilleur que les esprits qu’il a créés intelligents et capables de le connaĂźtre et de le possĂ©der, les unissant ensemble par les liens d’une sociĂ©tĂ© que nous appelons la CitĂ© sainte et cĂ©leste, oĂč le soutien de leur., existence et le principe de leur fĂ©licitĂ©, c’est Dieu lui-mĂȘme qui leur sert d’aliment et de vie. C’est lui qui a donnĂ© le libre arbitre Ă  cette nature intelligente, Ă  condition que si elle venait Ă  abandonner Dieu, source de sa bĂ©atitude, elle tomberait aussitĂŽt dans la plus profonde misĂšre. C’est lui qui, prĂ©voyant que parmi les anges quelques-uns, enflĂ©s d’orgueil, mettraient leur fĂ©licitĂ© en eux-mĂȘmes et perdraient ainsi le vrai bien, n’a pas voulu leur ĂŽter cette puissance, jugeant qu’il Ă©tait plus digne de sa propre puissance et de sa bontĂ© de se bien servir du mal que de ne pas le permettre . En effet, le mal n’eĂ»t jamais Ă©tĂ©, si la nature muable, quoique bonne et créée par le Dieu suprĂȘme et immuablement bon qui a fait bonnes toutes ses oeuvres, ne s’était elle-mĂȘme rendue mauvaise par le pĂ©chĂ©. Aussi bien son pĂ©chĂ© mĂȘme atteste son excellence primitive. Car si elle-mĂȘme n’était un bien trĂšs-grand, quoique infĂ©rieur Ă  son divin principe, la perte qu’elle a faite de Dieu comme de sa lumiĂšre ne pourrait ĂȘtre un mal pour elle. De mĂȘme, en effet, que la cĂ©citĂ© est un vice de l’oeil, et que ce vice non-seulement tĂ©moigne que l’oeil a Ă©tĂ© fait pour voir la lumiĂšre, mais encore fait ressortir l’excellence du plus noble des sens, ainsi la nature qui jouissait de Dieu nous apprend, par son dĂ©sordre mĂȘme, qu’elle a Ă©tĂ© créée bonne, puisque ce qui la rend misĂ©rable, c’est de ne plus jouir de Dieu. C’est lui qui a trĂšs-justement puni d’une misĂšre Ă©ternelle la chute volontaire des mauvais anges, et qui a donnĂ© aux autres, fidĂšlement attachĂ©s Ă  leur souverain bien, l’assurance de ne jamais le perdre, comme prix de leur fidĂ©litĂ©. C’est lui qui a créé l’homme dans la mĂȘme droiture que les anges, avec le mĂȘme libre arbitre, animal terrestre Ă  la vĂ©ritĂ©, mais digne du ciel, s’il demeure attachĂ© Ă  son crĂ©ateur; et il l’a condamnĂ© aussi Ă  la misĂšre, s’il vient Ă  s’en dĂ©tacher. C’est lui qui, prĂ©voyant que l’homme pĂšcherait Ă  son tour par la transgression de la loi divine et l’abandon de son Dieu, n’a pas voulu non plus lui ĂŽter la puissance du libre arbitre, parce qu’il prĂ©voyait aussi le bien qu’il pourrait tirer de ce mal; et en effet, sa grĂące a rassemblĂ© parmi cette race mortelle justement condamnĂ©e un si grand peuple qu’elle en a pu remplir la place dĂ©sertĂ©e par les anges prĂ©varicateurs. Ainsi cette CitĂ© suprĂȘme et bien-aimĂ©e, loin d’ĂȘtre trompĂ©e dans le compte de ses Ă©lus, se rĂ©jouira peut-ĂȘtre d’en recueillir une plus abondante moisson. CHAPITRE II. DE L’ÉTERNELLE ET IMMUABLE VOLONTÉ DE DIEU. Les mĂ©chants, il est vrai, font beaucoup de choses qui sont contre la volontĂ© de Dieu; mais il est si puissant et si sage qu’il fait aboutir ce qui paraĂźt contredire sa volontĂ© aux fins dĂ©terminĂ©es par sa prescience. C’est pourquoi, lorsqu’on dit qu’il change de volontĂ©, qu’il entre en colĂšre, par exemple, contre ceux qu’il regardait d’un oeil favorable, ce sont les hommes qui changent, et non pas lui. Leurs dispositions changeantes font qu’ils trouvent Dieu changĂ©. Ainsi le soleil change pour des yeux malades; il Ă©tait doux et agrĂ©able, il devient importun et pĂ©nible, et cependant il est restĂ© le mĂȘme en soi. On appelle aussi volontĂ© de Dieu celle qu’il forme dans les coeurs dociles Ă  ses commandements, et voilĂ  le sens de ces paroles de l’ApĂŽtre C’est Dieu qui opĂšre en nous le vouloir mĂȘme ». De mĂȘme que la justice de Dieu n’est pas seulement celle qui le fait juste en soi, mais encore celle qu’il produit dans l’homme justifiĂ©, ainsi la loi de Dieu est plutĂŽt la loi des hommes, mais c’est Dieu .qui la leur a donnĂ©e. En effet, c’est Ă  des hommes que JĂ©sus-Christ disait Il est Ă©crit dans votre loi » ; et nous lisons encore autre part La loi de Dieu est gravĂ©e dans son cƓur ». On parle de cette volontĂ© que Dieu forme dans les hommes, quand on dit qu’il veut ce qu’en effet il ne veut pas lui-mĂȘme, mais ce qu’il fait vouloir aux siens, comme on dit aussi qu’il connaĂźt ce qu’il fait connaĂźtre Ă  l’ignorance des hommes. Par exemple, quand l’ApĂŽtre s’exprime ainsi Mais maintenant connaissant Dieu, ou plutĂŽt Ă©tant connus de Dieu », il ne faut pas croire que Dieu commençùt alors Ă  les connaĂźtre, eux qu’il connaissait avant la crĂ©ation du monde; mais il est dit qu’il les connut alors, parce qu’il leur donna alors le don de connaĂźtre. J’ai dĂ©jĂ  touchĂ© un mot de ces locutions dans les livres prĂ©cĂ©dents. Ainsi donc, selon cette volontĂ© par laquelle nous disons que Dieu veut ce qu’il fait vouloir aux autres qui ne connaissent pas l’avenir, il veut plusieurs choses qu’il ne fait pas. En effet, ses saints veulent souvent, d’une volontĂ© sainte que lui-mĂȘme inspire, beaucoup de choses qui n’arrivent pas; ils prient Dieu, par exemple, en faveur de quelqu’un, et ils ne sont pas exaucĂ©s, bien que ce soit lui qui les ait portĂ©s Ă  prier par un mouvement du Saint-Esprit. Ainsi, quand les saints inspirĂ©s de Dieu veulent et prient que chacun soit sauvĂ©, nous pouvons dire Dieu veut et ne fait pas. Mais, si l’on parle de cette volontĂ© qui est aussi Ă©ternelle que sa prescience, il a certainement fait tout ce qu’il a voulu au ciel et sur la terre, et non-seulement les choses passĂ©es ou prĂ©sentes, mais mĂȘme les choses Ă  venir . Or, avant que le temps arrive oĂč il a fixĂ© l’accomplissement des choses qu’il a connues et ordonnĂ©es avant tous les temps, nous disons Cela arrivera quand Dieu voudra. Mais quand nous ignorons non-seulement Ă  quelle Ă©poque une chose doit arriver, mais mĂȘme si elle doit arriver en effet, nous disons Cela arrivera si Dieu le veut. Ce n’est pas qu’il doive alors survenir en Dieu une volontĂ© qu’il n’avait pas, mais c’est qu’alors arrivera ce qu’il avait prĂ©vu de toute Ă©ternitĂ© dans sa volontĂ© immuable. CHAPITRE III. DE LA PROMESSE D’UNE BÉATITUDE ÉTERNELLE POUR LES SAINTS ET D’UN SUPPLICE ÉTERNEL POUR LES IMPIES. Donc, pour ne rien dire de mille autres questions, de mĂȘme que nous voyons maintenant s’accomplir en JĂ©sus-Christ ce que Dieu promit Ă  Abraham en lui disant Toutes les nations seront bĂ©nies en vous », ainsi s’accomplira ce qu’il a promis Ă  cette mĂȘme race, quand il a dit par son ProphĂšte Ceux qui Ă©taient dans les tombeaux ressusciteront »; et encore Il y aura un ciel nouveau et une terre nouvelle, et ils ne se souviendront plus du passĂ©, et ils en perdront entiĂšrement la mĂ©moire; mais ils trouveront en elle des sujets de joie et d’allĂ©gresse. Et voici que je ferai de JĂ©rusalem et de mon peuple une fĂȘte et une rĂ©jouissance, et je prendrai mon plaisir en JĂ©rusalem et mon contentement en mon peuple, et l’on n’y entendra plus dĂ©sormais ni plaintes ni soupirs ». MĂȘme prĂ©diction par la bouche d’un autre prophĂšte En ce temps-lĂ , tout votre peuple qui se trouvera Ă©crit dans le livre sera sauvĂ©, et plusieurs de ceux qui dorment dans la poussiĂšre de la terre ou, selon d’autres interprĂštes, sous un amas de terre ressusciteront les uns pour la vie Ă©ternelle, et les autres pour recevoir un opprobre et une confusion Ă©ternelle ». Et ailleurs par le mĂȘme prophĂšte Les saints du TrĂšs-Haut recevront le royaume, et ils le possĂ©deront jusque dans le siĂšcle, et jusque dans les siĂšcles des siĂšcles »; et un peu aprĂšs Et son royaume sera Ă©ternel ». Ajoutez Ă  cela tant d’autres promesses semblables que j’ai rapportĂ©es dans le vingtiĂšme livre , ou que j’ai omises et qui se trouvent nĂ©anmoins dans l’Ecriture. Tout cela arrivera comme les merveilles dont l’accomplissement a dĂ©jĂ  Ă©tĂ© un sujet d’étonnement pour les incrĂ©dules. C’est le mĂȘme Dieu qui a promis, lui devant qui tremblent les divinitĂ©s des paĂŻens, de l’aveu d’un Ă©minent philosophe paĂŻen . CHAPITRE IV. CONTRE LES SAGES DU MONDE QUI PENSENT QUE LES CORPS TERRESTRES DES HOMMES NE POURRONT ÊTRE TRANSPORTÉS DANS LE CIEL. Mais ces personnages si remplis de science et de sagesse, et en mĂȘme temps si rebelles Ă  une autoritĂ© qui a soumis, comme elle l’avait annoncĂ© bien des siĂšcles Ă  l’avance, tant de gĂ©nĂ©rations humaines, ces philosophes, dis-je, s’imaginent avoir trouvĂ© un argument fort dĂ©cisif contre la rĂ©surrection des corps, quand ils allĂšguent un certain passage de CicĂ©ron, au troisiĂšme livre de sa RĂ©publique. AprĂšs avoir dit qu’Hercule et Romulus sont devenus des dieux, d’hommes qu’ils Ă©taient auparavant, CicĂ©ron ajoute Mais leurs corps n’ont pas Ă©tĂ© enlevĂ©s au ciel, la nature ne souffrant pas que ce qui est formĂ© de la terre subsiste autre part que dans la terre». VoilĂ  le grand raisonnement de ces sages dont le Seigneur connaĂźt les pensĂ©es, et les. connaĂźt pour vaines. Car supposez que nous soyons ces esprits purs , c’est-Ă -dire des esprits sans corps, habitant le ciel sans savoir s’il existe des animaux terrestres, si l’on venait nous dire qu’un jour nous serons unis par un lien merveilleux aux corps terrestres pour les animer, n’aurions-nous pas beaucoup plus de sujet de n’en rien croire, et de dire que la nature ne peut souffrir qu’une substance incorporelle soit emprisonnĂ©e dans un corps? Cependant la terre est pleine d’esprits Ă  qui des corps terrestres sont unis par un lien mystĂ©rieux. Pourquoi donc, s’il plaĂźt Ă  Dieu, qui a fait tout cela, pourquoi un corps terrestre ne pourrait-il pas ĂȘtre enlevĂ© parmi les corps cĂ©lestes, puisqu’un esprit, plus excellent que tous les corps, et, par consĂ©quent, qu’un corps cĂ©leste, a pu ĂȘtre uni Ă  un corps terrestre ? Quoi donc! une si petite particule de terre a pu retenir un ĂȘtre fort supĂ©rieur Ă  un corps cĂ©leste, afin d’en recevoir la vie et le sentiment, et le ciel dĂ©daignerait de recevoir ou ne pourrait retenir cette terre vivante et animĂ©e qui tire la vie et le sentiment d’une substance plus excellente que tout corps cĂ©leste? Si cela ne se fait pas maintenant, c’est que le temps n’est pas venu, le temps, dis-je, dĂ©terminĂ© par celui-lĂ  mĂȘme qui a fait une chose beaucoup plus merveilleuse, mais que l’habitude a rendue vulgaire. Car enfin, que des esprits incorporels, plus excellents que tout corps cĂ©leste, soient unis Ă  des corps terrestres, n’est-ce pas lĂ  un phĂ©nomĂšne qui doit nous Ă©tonner plutĂŽt que de voir des corps, quoique terrestres, ĂȘtre Ă©levĂ©s Ă  des demeures cĂ©lestes, il est vrai, mais corporelles ? Mais nous sommes accoutumĂ©s Ă  voir la premiĂšre de ces merveilles, qui est nous-mĂȘmes; au lieu que nous n’avons jamais vu L’autre, qui n’est pas encore devenue notre propre nature. Certes, si nous consultons la raison, nous trouverons qu’il est beaucoup plus merveilleux de joindre des corps Ă  des esprits que d’unir des corps Ă  des corps, bien que ces corps soient diffĂ©rents, les uns Ă©tant cĂ©lestes et les autres terrestres. CHAPITRE V. DE LA RÉSURRECTION DES CORPS, BIEN QUE CERTAINS ESPRITS NE VEULENT PAS ADMETTRE, BIEN QUE PROCLAMÉE PAR LE MONDE ENTIER. Mais je veux que-cela ait Ă©tĂ© autrefois incroyable. VoilĂ  le monde qui croit maintenant que le corps de JĂ©sus-Christ, tout terrestre qu’il est, a Ă©tĂ© emportĂ© au ciel; voilĂ  les doctes et les ignorants qui croient que la chair ressuscitera-et. qu’elle montera au ciel; et il en est trĂšs-peu qui demeurent incrĂ©dules. Or, de deux choses l’une s’ils croient une chose croyable, que ceux qui-ne la croient pas s’accusent eux-mĂȘmes de stupiditĂ© ; et s’ils croient une chose incroyable, il -n’est pas moins incroyable qu’on soit portĂ© Ă  croire une chose de cette espĂšce. Le mĂȘme Dieu a donc prĂ©dit ces deux choses incroyables, que les corps ressusciteraient et que le monde le croirait; et il les a prĂ©dites toutes deux, bien longtemps avant que l’une des deux arrivĂąt. De ces deux choses incroyables, nous en voyons dĂ©jĂ  une accomplie, qui est que le monde croirait une chose incroyable; pourquoi dĂ©sespĂ©rerions-nous de voir l’autre, puisque celle lui est arrivĂ©e n’est pas moins difficile Ă  croire? Et, si l’on y songe, la maniĂšre mĂȘme dont le monde a cru est une chose encore plus incroyable. JĂ©sus-Christ a envoyĂ© un petit nombre d’hommes sans lumiĂšres et sans politesse, Ă©trangers aux belles connaissances, ignorant les ressources de la grammaire, les armes de la dialectique, les artifices pompeux de la rhĂ©torique, en un mot de pauvres pĂ©cheurs; il les a envoyĂ©s Ă  l’ocĂ©an du siĂšcle avec les seuls filets de la foi, et. ils ont pris une infinitĂ© de poissons de toute espĂšce, de l’espĂšce mĂȘme la plus merveilleuse et la plus rare, je veux parler des philosophes. Ajoutez, si vous voulez, ce troisiĂšme miracle aux deux autres. VoilĂ  en tout trois choses incroyables qui nĂ©anmoins sont arrivĂ©es il est incroyable que JĂ©sus-Christ soit ressuscitĂ© en sa chair, et qu’avec cette mĂȘme chair il soit montĂ© au ciel; il est incroyable que le monde ait cru une chose aussi incroyable; il est incroyable enfin qu’un petit nombre d’hommes de basse condition, inconnus, ignorants, aient pu persuader une chose aussi incroyable au monde et aux savants du monde. De ces trois choses incroyables, nos adversaires ne veulent pas croire la premiĂšre; ils sont contraints de voir la seconde, et ils ne sauraient la comprendre, Ă  moins de croire la troisiĂšme. En effet, la rĂ©surrection de JĂ©sus-Christ, et son ascension au ciel en la chair oĂč il est ressuscitĂ©, sont choses dĂ©jĂ  prĂȘchĂ©es et crues dans tout l’uni. vers; si elles ne sont pas croyables, d’oĂč vient que l’univers les croit? Admettez qu’un grand nombre de personnages illustres, doctes, puissants, aient dĂ©clarĂ© les avoir vues et se soient chargĂ©s de les publier en tout lieu, il n’est plus Ă©trange que le monde les ait crues; et en ce cas il y a bien de l’opiniĂątretĂ© Ă  ne pas les croire. Mais si, comme il est vrai, le monde a cru un petit nombre d’hommes inconnus et ignorants sur leur parole, comment se fait-il qu’une poignĂ©e d’incrĂ©dules entĂȘtĂ©s ne veuille pas croire ce que le monde croit? Et si le monde a cru Ă  ce peu de tĂ©moins obscurs, infimes, ignorants, mĂ©prisables, c’est qu’en eux elle a vu paraĂźtre avec plus d’éclat la majestĂ© de Dieu. Leur Ă©loquence a Ă©tĂ© toute en miracles, et non en paroles; et ceux qui n’avaient pas vu JĂ©sus-Christ ressusciter et monter au ciel avec son corps, n’ont pas eu de peine Ă  le croire, sur la foi de tĂ©moignages confirmĂ©s par une infinitĂ© de prodiges. En effet, des hommes qui ne pouvaient savoir au plus que deux langues, ils les entendaient parler soudain toutes les langues du monde . Ils voyaient un boiteux de naissance, aprĂšs quarante ans d’infirmitĂ©, marcher d’un pas Ă©gal, Ă  leur parole et au nom de JĂ©sus-Christ; les linges qu’ils avaient touchĂ©s guĂ©rissaient les malades ; et tandis que des milliers d’hommes infirmes se rangeaient sur leur passage, il suffisait que leur nombre les couvrĂźt en passant pour les rendre Ă  la santĂ©. Et combien ne pourrais-je pas citer d’autres prodiges, sans parler mĂȘme des morts qu’ils ont ressuscitĂ©s au nom du Sauveur ! Si nos adversaires nous accordent la rĂ©alitĂ© de ces miracles, voilĂ  bien des choses incroyables qui viennent s’ajouter aux trois premiĂšres; et il faut ĂȘtre singuliĂšrement opiniĂątre pour ne pas croire une chose incroyable, telle que la rĂ©surrection du corps de JĂ©sus-Christ et son ascension au ciel, du moment qu’elle est confirmĂ©e par tant d’autres choses non moins incroyables et pourtant rĂ©elles. Si, au contraire, ils ne-croient pas que les ApĂŽtres aient fait ces miracles pour Ă©tablir la croyance Ă  la rĂ©surrection et Ă  l’ascension de JĂ©sus-Christ, ce seul grand miracle nous suffit, que toute la terre ait cru sans miracles. CHAPITRE VI. ROME A FAIT UN DIEU DE ROMULUS, PARCE QU’ELLE AIMAIT EN LUI SON FONDATEUR; AU LIEU QUE L’ÉGLISE A AIMÉ JÉSUS-CHRIST, PARCE QU’ELLE L’A CRU DIEU. Rappelons ici le passage oĂč CicĂ©ron s’étonne que la divinitĂ© de Romulus ait obtenu crĂ©ance. Voici ses propres paroles Ce qu’il y a de plus admirable dans l’apothĂ©ose de Romulus, c’est que les autres hommes qui ont Ă©tĂ© a faits dieux vivaient dans des siĂšcles grossiers, oĂč il Ă©tait aisĂ© de persuader aux peuples tout ce qu’on voulait. Mais il n’y a pas encore six cents ans’ qu’existait Romulus, et dĂ©jĂ  les lettres et les sciences fionsusaient depuis longtemps dans le monde, et y avaient dissipĂ© la barbarie’ ». Et un peu aprĂšs il ajoute On voit donc que Romulus a existĂ© bien des annĂ©es aprĂšs -IomĂšre, et que, les hommes commençant Ă  ĂȘtre Ă©clairĂ©s, il Ă©tait difficile, dans un siĂšcle dĂ©jĂ  u poli, de recourir Ă  des fictions. Car l’antiquitĂ© a reçu des fables qui Ă©taient quelquefois bien grossiĂšres ; mais le siĂšcle de Romulus Ă©tait trop civilisĂ© pour rien admettre qui ne fĂ»t au moins vraisemblable ». Ainsi, voilĂ  un des hommes les plus savants et les plus Ă©loquents du monde, CicĂ©ron, qui s’étonne qu’on ait cru Ă  la divinitĂ© de Romulus, parce que le siĂšcle oĂč-il est venu Ă©tait assez Ă©clairĂ© pour rĂ©pudier des fictions. Cependant, qui a cru que Romulus Ă©tait un dieu, sinon Rome, et encore Rome faible et -naissante-? Les gĂ©nĂ©rations suivantes furent obligĂ©es de conserver la tradition des ancĂȘtres; et, aprĂšs avoir sucĂ© cette superstition avec le lait, elles la rĂ©pandirent parmi les peuples que Rome fit passer Sous son joug. Ainsi, toutes ces nations vaincues, sans ajouter foi Ă  la divinitĂ© de Romulus, ne laissaient pas de la proclamer pour ne pas offenser la maĂźtresse du monde, trompĂ©e elle-mĂȘme, sinon par amour de l’erreur, du moins par l’erreur de son amour. Combien est diffĂ©rente notre foi dans la divinitĂ© de JĂ©sus-Christ ! Il est sans doute le fondateur de la CitĂ© Ă©ternelle; mais tant s’en faut qu’elle l’ait cru dieu, parce qu’il l’a fondĂ©e, qu’elle ne mĂ©rite d’ĂȘtre fondĂ©e que parce qu’elle le croit dieu. Rome, dĂ©jĂ  bĂątie et dĂ©diĂ©e, a Ă©levĂ© Ă  son fondateur un temple oĂč elle l’a adorĂ© comme un dieu ; la nouvelle JĂ©rusalem, afin d’ĂȘtre bĂątie et dĂ©diĂ©e, a pris pour base de sa foi son fondateur, JĂ©sus-Christ Dieu. La premiĂšre, par amour pour Romulus, l’a cru dieu ; la seconde, convaincue que JĂ©sus-Christ Ă©tait Dieu, l’a aimĂ©. Quelque chose a donc prĂ©cĂ©dĂ© l’amour de celle-lĂ , et l’a portĂ©e Ă  croire complaisamment Ă  une perfection, mĂȘme imaginaire, de celui qu’elle aimait; et de mĂȘme, quelque chose a prĂ©cĂ©dĂ© la foi de celle-ci, pour lui-faire aimer sans tĂ©mĂ©ritĂ© un privilĂ©ge trĂšs-vĂ©ritable dans celui en qui elle croit. Sans parler, en effet, de tant de miracles qui ont Ă©tabli la divinitĂ© de JĂ©sus-Christ, nous avions sur lui, avant qu’il ne parĂ»t sur la terrĂ©, des prophĂ©ties divines parfaitement dignes de foi et dont nous n’attendions pas l’accomplissement, comme nos pĂšres, mais qui sont dĂ©jĂ  accomplies. Il n’en est pas ainsi de Romulus. On sait par les historiens qu’il a bĂąti Rome et qu’il y a rĂ©gnĂ©, sans qu’aucune prophĂ©tie antĂ©rieure eĂ»t rien annoncĂ© de cela. Main tenant, qu’il ait Ă©tĂ© transportĂ© parmi les dieux, l’histoire le rapporte comme une croyance, elle ne le prouve point comme un fait. Point de miracle pour tĂ©moigner de la vĂ©ritĂ© de cette apothĂ©ose. On parle d’une louve qui nourrit les deux frĂšres comme d’une grande merveille. Mais qu’est-ce que cela pour prouver qu’un homme est un dieu? Alors mĂȘme que cette louve aurait Ă©tĂ© Une vraie louve et non pas une courtisane , le prodige aunait Ă©tĂ© commun aux deux-frĂšres, et cependant il n’y en a qu’un qui passe pour un dieu. D’ailleurs, Ă  qui a-t-on dĂ©fendu de croire et de dire que Romulus, Hercule et autres personnages semblables Ă©taient des dieux? Et qui a mieux aimĂ© mourir que de cacher sa foi? Ou plutĂŽt se serait-il jamais rencontrĂ© une seule nation qui eĂ»t adorĂ© Romulus sans la crainte du nom romain? Et cependant qui pourrait compter tous ceux qui ont mieux aimĂ© perdre la vie dans les plus cruels tourments que de nier la divinitĂ© de JĂ©sus-Christ? Ainsi la crainte, fondĂ©e ou non, d’encourir une lĂ©gĂšre indignation des Romains contraignait quelques peuples vaincus Ă  adorer Romulus comme un dieu; et la crainte des plus horribles supplices et de la mort mĂȘme, n’a pu empĂȘcher sur toute la terre un nombre immense de martyrs, non-seulement d’adorer JĂ©sus-Christ comme un dieu, mais de le confesser publiquement. La CitĂ© de Dieu, Ă©trangĂšre encore ici-bas, mais qui avait dĂ©jĂ  recrutĂ© toute une armĂ©e de peuples, n’a point alors combattu contre ses persĂ©cuteurs pour la conservation d’une vie temporelle; mais au contraire elle ne leur a point rĂ©sistĂ©, afin d’acquĂ©rir la vie Ă©ternelle. Les chrĂ©tiens Ă©taient chargĂ©s de chaĂźnes, mis en prison, battus de verges, tourmentĂ©s, brĂ»lĂ©s, Ă©gorgĂ©s, mis en piĂšces, et leur nombre augmentait . Ils ne croyaient pas combattre pour leur salut Ă©ternel, s’ils ne mĂ©prisaient leur salut Ă©ternel pour l’amour du Sauveur. Je sais que CicĂ©ron, dans sa RĂ©publique, au livre huitiĂšme, si je ne me trompe, soutient qu’un Etat bien rĂ©glĂ© n’entreprend jamais la guerre que pour garder sa foi ou pour veiller Ă  son salut. Et CicĂ©ron explique ailleurs ce qu’il entend par le salut d’un Etat, lorsqu’il dit Les particuliers se dĂ©robent souvent par une prompte mort Ă  la pauvretĂ©, Ă  l’exil, Ă  la prison, au fouet, et aux autres peines auxquelles les hommes les plus grossiers ne sont pas insensibles; mais la mort mĂȘme, qui semble affranchir de toute peine, est une peine pour un Etat, qui doit ĂȘtre constituĂ© pour ĂȘtre Ă©ternel. Ainsi la mort n’est point naturelle Ă  une rĂ©publique comme elle l’est Ă  un individu, qui doit non-seulement la subir malgrĂ© lui, mais souvent mĂȘme la souhaiter. Lors donc qu’un Etat succombe, disparaĂźt, s’anĂ©antit, il nous est si l’on peut comparer les petites choses aux grandes, il nous est une image de la ruine et de la destruction du monde entier ». CicĂ©ron parle ainsi, parce qu’il pense, avec les Platoniciens, que le monde ne doit jamais pĂ©rir. Il est donc avĂ©rĂ© que, suivant CicĂ©ron, un Etat doit entreprendre la guerre pour son salut, c’est-Ă -dire pour subsister Ă©ternellement ici-bas, tandis que ceux qui le composent, naissent et meurent par une continuelle rĂ©volution comme un olivier, un laurier, ou tout autre arbre semblable, conserve toujours le mĂȘme ombrage, malgrĂ© la chute et le renouvellement de ses feuilles. La mort, selon lui, n’est pas une peine pour les particuliers, puisqu’elle les dĂ©livre souvent de toute autre peine, mais elle est une peine pour un Etat. Ainsi l’on peut demander avec raison si les Sagontins firent bien d’aimer mieux que leur citĂ© pĂ©rĂźt que de manquer de foi aux Romains, car les citoyens de la citĂ© de la terre les louent de cette action. Mais je ne vois pas comment ils pouvaient suivre cette maxime de CicĂ©ron qu’il ne faut entreprendre la guerre que pour sa foi ou son salut, CicĂ©ron ne disant pas ce qu’il faut faire de prĂ©fĂ©rence dans le cas oĂč l’on ne pourrait conserver l’un de ces biens sans perdre l’autre. En effet, les Sagontins ne pouvaient se sauver sans trahir leur foi envers les Romains, ni garder cette foi sans pĂ©rir, comme ils pĂ©rirent en effet. Il n’en est pas de mĂȘme du salut dans la CitĂ© de Dieu on le conserve, ou plutĂŽt on l’acquiert avec ta foi et par la foi, et la perte de la foi entraĂźne celle du salut. C’est cette pensĂ©e d’un coeur ferme et gĂ©nĂ©reux qui a fait un si grand nombre de martyrs, tandis que Romulus n’en a pu avoir un seul qui ait versĂ© son sang pour confesser sa divinitĂ©. CHAPITRE VII. SI LE MONDE A CRU EN JÉSUS-CHRIST, C’EST L’OUVRAGE D’UNE VERTU DIVINE, ET NON D’UNE PERSUASION HUMAINE. Mais il est parfaitement ridicule de nous opposer la fausse divinitĂ© de Romulus, quand nous parlons de JĂ©sus-Christ. Si, dĂšs le temps de Romulus, c’est-Ă -dire six cents ans avant CicĂ©ron , le monde Ă©tait dĂ©jĂ  tellement Ă©clairĂ© qu’il rejetait comme faux tout ce qui n’était pas vraisemblable, combien plutĂŽt encore, au temps de CicĂ©ron lui-mĂȘme, et surtout plus tard, sous les rĂšgnes d’Auguste et de TibĂšre, Ă©poques de civilisation de plus en plus avancĂ©e, eĂ»t-on rejetĂ© bien loin la rĂ©surrection de JĂ©sus-Christ en sa chair et son ascension au ciel comme choses absolument impossibles! Il a fallu, pour ouvrir l’oreille et le coeur des hommes Ă  cette croyance, que la vĂ©ritĂ© divine ou la divinitĂ© vĂ©ritable et une infinitĂ© de miracles eussent dĂ©jĂ  dĂ©montrĂ© que de tels miracles pouvaient se faire et s’étaient effectivement accomplis. VoilĂ  pourquoi, malgrĂ© tant de cruelles persĂ©cutions, on a cru et prĂȘchĂ© hautement la rĂ©surrection et l’immortalitĂ© de la chair, lesquelles ont d’abord paru en JĂ©sus-Christ pour se rĂ©aliser un jour en tous les hommes; voilĂ  pourquoi cette croyance a Ă©tĂ© semĂ©e par toute la terre pour croĂźtre et se dĂ©velopper de plus en plus par le sang fĂ©cond des martyrs; car l’autoritĂ© des miracles venant confirmer l’autoritĂ© des prophĂ©ties, la vĂ©ritĂ© a pĂ©nĂ©trĂ© enfin dans les esprits, et l’on a vu qu’elle Ă©tait plutĂŽt contraire Ă  la coutume qu’à la raison, jusqu’au jour oĂč le monde entier a embrassĂ© par la foi ce qu’il persĂ©cutait dans sa fureur. CHAPITRE VIII. DES MIRACLES QUI ONT ÉTÉ FAITS POUR QUE LE MONDE CRUT EN JÉSUS-CHRIST ET QUI N’ONT PAS CESSÉ DEPUIS QU’IL Y CROIT. Pourquoi, nous dit-on, ces miracles qui, selon vous, se faisaient autrefois, ne se font-ils plus aujourd’hui? Je pourrais rĂ©pondre que les miracles Ă©taient nĂ©cessaires avant que le monde crĂ»t, pour le porter Ă  croire, tandis qu’aujourd’hui quiconque demande encore des miracles pour croire est lui-mĂȘme un grand miracle de ne pas croire ce que toute la terre croit; mais ils ne parlent ainsi que pour faire douter de la rĂ©alitĂ© des miracles. Or, d’oĂč vient qu’on publie si hautement partout que JĂ©sus-Christ est montĂ© au ciel avec son corps? d’oĂč vient qu’en des siĂšcles Ă©clairĂ©s, oĂč l’on rejetait tout ce qui paraissait impossible, le monde a cru sans miracles des choses tout Ă  fait incroyables? Aiment-ils mieux dire qu’elles Ă©taient incroyables, et que c’est pour cela qu’on les a crues? Que ne les croient-ils donc eux-mĂȘmes? Voici donc Ă  quoi se rĂ©duit tout notre raisonnement ou bien des choses incroyables que tout le monde voyait ont persuadĂ© une chose incroyable que tout le monde ne voyait pas; ou bien cette chose Ă©tait tellement croyable qu’elle n’avait pas besoin de miracles pour ĂȘtre crue, et, dans ce dernier cas, oĂč trouver une opiniĂątretĂ© plus extrĂȘme que celle de nos adversaires? VoilĂ  ce qu’on peut rĂ©pondre aux plus obstinĂ©s. Que plusieurs miracles aient Ă©tĂ© opĂ©rĂ©s pour assurer ce grand et salutaire miracle par lequel JĂ©sus-Christ est ressuscitĂ© et montĂ© au ciel avec son corps, c’est ce que l’on ne peut nier. En effet, ils sont consignĂ©s dans les livres sacrĂ©s qui dĂ©posent tout ensemble et de la rĂ©alitĂ© de ces miracles et de la foi qu’ils devaient fonder. La renommĂ©e de ces miracles s’est rĂ©pandue pour donner la foi, et la foi qu’ils leur ont donnĂ©e ajoute Ă  leur renommĂ©e un nouvel Ă©clat. On les lit aux peuples afin qu’ils croient, et nĂ©anmoins on ne les leur lirait pas, si dĂ©jĂ  ils n’avaient Ă©tĂ© crus. Car il se fait encore des miracles au nom de JĂ©sus-Christ, soit par les sacrements, soit par les priĂšres et les reliques des saints, mais ils ne sont pas aussi cĂ©lĂšbres que les premiers. Le canon des saintes Lettres, qui devait ĂȘtre fixĂ© par l’Eglise, fait connaĂźtre ces premiers miracles en tous lieux et les confie Ă  la mĂ©moire des peuples. Au contraire, ceux-ci ne sont connus qu’aux lieux oĂč ils se passent, et souvent Ă  peine le sont-ils d’une ville entiĂšre, surtout quand elle est grande, ou d’un voisinage restreint. Ajoutez enfin que l’autoritĂ© de ceux qui les rapportent, tout fidĂšles qu’ils sont et s’adressant Ă  des fidĂšles, n’est pas assez considĂ©rable pour ne laisser aucun doute aux bons esprits. Le miracle qui eut lieu Ă  Milan j’y Ă©tais alors, quand un aveugle recouvra la vue, a pu ĂȘtre connu de plusieurs; en effet, la ville est grande, l’empereur Ă©tait prĂ©sent, et ce miracle s’opĂ©ra Ă  la vue d’un peuple immense accouru de tous cĂŽtĂ©s pour voir les corps des saints martyrs Gervais et Protais, qui avaient Ă©tĂ© dĂ©couverts en songe Ă  l’évĂȘque Ambroise. Or, par la vertu de ces reliques, l’aveugle sentit se dissiper les tĂ©nĂšbres de ses yeux et recouvra la vue . Mais qui, Ă  l’exception d’un petit nombre, a entendu parler Ă  Carthage de la guĂ©rison miraculeuse d’Innocentius, autrefois avocat de la prĂ©fecture, guĂ©rison que j’ai vue de mes propres yeux? C’était un homme trĂšs-pieux, ainsi que toute sa maison, et il nous avait reçus chez lui, mon frĂšre Alype et moi, au retour de notre voyage d’outre-mer, quand nous n’étions pas encore clercs, mais engagĂ©s cependant au service de Dieu; nous demeurions donc avec lui. Les mĂ©decins le traitaient de certaines fistules hĂ©morroĂŻdales qu’il avait en trĂšs-grande quantitĂ©, et qui le faisaient beaucoup souffrir. Ils avaient dĂ©jĂ  appliquĂ© le fer et usĂ© de tous les mĂ©dicaments que leur conseillait leur art. L’opĂ©ration avait Ă©tĂ© fort douloureuse et fort longue; mais les mĂ©decins, par mĂ©garde, avaient laissĂ© subsister une fistule qu’ils n’avaient point vue entre toutes les autres. Aussi , tandis qu’ils soignaient et guĂ©rissaient toutes les fistules ouvertes, celle-lĂ  seule rendait leurs soins inutiles. Le malade, se dĂ©fiant de ces longueurs, et apprĂ©hendant extrĂȘmement une nouvelle incision, comme le lui avait fait craindre un mĂ©decin , son domestique, que les autres avaient renvoyĂ© au moment de l’opĂ©ration, ne voulant pas de lui, mĂȘme comme simple tĂ©moin, et que son maĂźtre, aprĂšs l’avoir chassĂ© dans un accĂšs de colĂšre, n’avait consenti Ă  recevoir qu’avec beaucoup de difficultĂ©, le malade, dis-je, s’écria un jour, hors de lui Est-ce que vous allez m’inciser encore? et faudra-t-il que je souffre ce que m’a prĂ©dit celui que vous avez Ă©loignĂ©? Alors ils commencĂšrent Ă  se moquer de l’ignorance de leur confrĂšre et Ă  rassurer le malade par de belles- promesses. Cependant plusieurs jours se passent, et tout ce que l’un tentait Ă©tait inutile. Les mĂ©decins persistaient toujours Ă  dire qu’ils guĂ©riraient cette hĂ©morroĂŻde par la force de leurs mĂ©dicaments, sans employer le fer. Ils appelĂšrent un vieux praticien, fameux par ces sortes de cures, nommĂ© Ammonius, qui, aprĂšs avoir examinĂ© le mal, en porta le mĂȘme jugement. Le malade , se croyant dĂ©jĂ  hors d’affaire, raillait le mĂ©decin domestique, sur ce qu’il avait prĂ©dit qu’il faudrait une nouvelle opĂ©ration. Que dirai-je de plus? AprĂšs bien des jours, inutilement reculĂ©s, ils en vinrent Ă  avouer, las et confus, que le fer pouvait seul opĂ©rer la guĂ©rison. Le malade Ă©pouvantĂ©, pĂąlissant, aussitĂŽt que son extrĂȘme frayeur lui eĂ»t permis de parler, leur enjoignit de se retirer et de ne plus revenir. Cependant, aprĂšs avoir longtemps pleurĂ©, il n’eut d’autre ressource que d’appeler un certain Alexandrin, chirurgien cĂ©lĂšbre, pour faire ce qu’il n’avait pas voulu que les autres fissent. Celui-ci vint donc; mais aprĂšs avoir reconnu par les cicatrices l’habiletĂ© de ceux qui l’avaient traitĂ©, il lui conseilla, en homme de bien, de les reprendre, et de ne pas les priver du fruit de leurs efforts. Il ajouta qu’Innocentius ne pouvait guĂ©rir, en effet, qu’en subissant une nouvelle incision, mais qu’il ne voulait point avoir l’honneur d’une cure si avancĂ©e, et dans laquelle il admirait l’adresse de ceux qui l’avaient prĂ©cĂ©dĂ©. Le malade se rĂ©concilia donc avec ses mĂ©decins; il fut rĂ©solu qu’ils feraient l’opĂ©ration en prĂ©sence de l’Alexandrin, et elle fut remise par eux au lendemain. Cependant, les mĂ©decins s’étant retirĂ©s, le malade tomba dans une si profonde tristesse que toute sa maison en fut remplie de deuil, comme s’il eĂ»t dĂ©jĂ  Ă©tĂ© mort. Il Ă©tait tous les jours visitĂ© par un grand nombre de personnes pieuses, et entre autres par Saturnin, d’heureuse mĂ©moire, Ă©vĂȘque d’Uzali, et par GĂ©lose, prĂȘtre, ainsi que par quelques diacres de l’Eglise de Carthage. De ce nombre aussi Ă©tait l’évĂȘque AurĂ©lius, le seul de tous qui ait survĂ©cu , personnage Ă©minemment respectable avec lequel nous nous sommes souvent entretenus de ce miracle de Dieu, dont il se souvenait parfaitement. Comme ils venaient, sur le soir, voir le malade, suivant leur ordinaire, il les pria de la maniĂšre la plus attendrissante d’assister le lendemain mĂȘme Ă  ses funĂ©railles plutĂŽt qu’à ses souffrances, car les incisions prĂ©cĂ©dentes lui avaient causĂ© tant de douleur qu’il croyait fermement mourir entre les mains des mĂ©decins. Ceux-ci le consolĂšrent du mieux qu’ils purent, et l’exhortĂšrent Ă  se confier Ă  Dieu et Ă  se soumettre Ă  sa volontĂ©. Ensuite nous nous mĂźmes en priĂšre; et nous Ă©tant agenouillĂ©s et prosternĂ©s Ă  terre, selon notre coutume, il s’y jeta lui-mĂȘme avec tant d’impĂ©tuositĂ© qu’il semblait que quelqu’un l’eĂ»t fait tomber rudement, et il commença Ă  prier. Mais q ai pourrait exprimer de quelle maniĂšre, avec quelle ardeur, quels transports, quels torrents de larmes, quels gĂ©missements et quels sanglots, tellement enfin que tous ses membres tremblaient et qu’il Ă©tait comme suffoquĂ©! Je ne sais si les autres priaient et. si tout cela ne les dĂ©tournait point; pour moi, je ne le pouvais faire, et je dis seulement en moi-mĂȘme ce peu de mots Seigneur, quelles priĂšres de vos serviteurs exaucerez-vous, si vous n’exaucez pas celles-ci? Il me paraissait qu’on n’y pouvait rien ajouter, sinon d’expirer en priant. Nous nous levons, et, aprĂšs avoir reçu la bĂ©nĂ©diction de l’évĂȘque, nous nous retirons, le malade priant les assistants de se trouver le lendemain matin chez lui, et nous, l’exhortant Ă  avoir bon courage. Le jour venu, ce jour tant apprĂ©hendĂ©, les serviteurs de Dieu arrivĂšrent, comme ils l’avaient promis. Les mĂ©decins entrent; on prĂ©pare tout ce qui est nĂ©cessaire Ă  l’opĂ©ration, on tire les redoutables instruments; chacun demeure interdit et en suspens. Ceux qui avaient le plus d’autoritĂ© encouragent le malade, tandis qu’on le met sur son lit dans la position la plus commode pour l’incision; on dĂ©lie les bandages, on met Ă  nu la partie malade, le mĂ©decin regarde, et cherche de l’oeil et de la main l’hĂ©morroĂŻde qu’il devait ouvrir. Enfin, aprĂšs avoir explorĂ© de toutes façons la partie malade, il finit par trouver une cicatrice trĂšs-ferme. Il n’y a point de paroles capables d’exprimer la joie, le ravissement, et les actions de grĂąces de tous ceux qui Ă©taient prĂ©sents. Ce furent des larmes et des exclamations que l’on peut s’imaginer, mais qu’il est impossible de rendre. Dans la mĂȘme ville de Carthage, Innocentia, femme trĂšs-pieuse et du rang le plus distinguĂ©, avait au sein un cancer, mal incurable, Ă  ce que disent les mĂ©decins . On a coutume de couper et de sĂ©parer du corps la partie oĂč est le mal, ou, si l’on veut prolonger un peu la vie du malade, de n’y rien faire; et c’est, dit-on, le sentiment d’Hippocrate . Cette dame l’avait appris d’un savant mĂ©decin, son ami, de sorte qu’elle n’avait plus recours qu’à Dieu. La fĂȘte de PĂąques Ă©tant proche, elle fut avertie en songe de prendre garde Ă  la premiĂšre femme qui se prĂ©senterait Ă  elle au sortir du baptistĂšre , et de la prier de faire le signe de la croix sur son mal. Cette femme le fit, et Innocentia fut guĂ©rie Ă  l’heure mĂȘme. Le mĂ©decin qui lui avait conseillĂ© de n’employer aucun remĂšde, si elle voulait vivre un peu plus longtemps, la voyant guĂ©rie, lui demanda vivement ce qu’elle avait fait pour cela, Ă©tant bien aise sans doute d’apprendre un remĂšde qu’Hippocrate avait ignorĂ©. Elle lui dit ce qui en Ă©tait, non sans craindre, Ă  voir son visage mĂ©fiant, qu’il ne lui rĂ©pondĂźt quelque parole injurieuse au Christ Vraiment, s’écria-t-il, je pensais que vous m’alliez dire quelque chose de bien merveilleux! » Et comme elle se rĂ©voltait dĂ©jĂ  Quelle grande merveille, ajouta-t-il, que JĂ©sus-Christ ait guĂ©ri un cancer au sein, lui qui a ressuscitĂ© un mort de quatre jours ? » Quand j’appris ce qui s’était passĂ©, je ne pus supporter la pensĂ©e qu’un si grand miracle, arrivĂ© dans une si grande ville, Ă  une personne de si haute condition, pĂ»t demeurer cachĂ©; je fus mĂȘme sur le point de rĂ©primander cette dame. Mais quand elle m’eut assurĂ© qu’elle ne l’avait point passĂ© sous silence, je demandai Ă  quelques dames de ses amies intimes, qui Ă©taient alors avec elle, si elles le savaient. Elles me dirent que non. VoilĂ  donc, m’écriai-je, de quelle façon vous le publiez! vos meilleures amies n’en savent rien ! » Et comme elle m’avait rapportĂ© le fait trĂšs-briĂšvement, je lui en fis recommencer l’histoire tout au long devant ces dames, qui en furent singuliĂšrement Ă©tonnĂ©es et en rendirent gloire Ă  Dieu. Un mĂ©decin goutteux de la mĂȘme ville, ayant donnĂ© son nom pour ĂȘtre baptisĂ©, vit en songe, la nuit qui prĂ©cĂ©da son baptĂȘme, des petits enfants noirs et frisĂ©s qu’il prit pour des dĂ©mons, et qui lui dĂ©fendirent de se faire baptiser cette annĂ©e-lĂ . Sur son refus de leur obĂ©ir, ils lui marchĂšrent sur les pieds, en sorte qu’il y sentit des douleurs plus cruelles que jamais. Cela ne l’empĂȘcha point de se faire baptiser le lendemain, comme il l’avait promis Ă  Dieu, et il sortit du baptistĂšre non-seulement guĂ©ri de ses douleurs extraordinaires, mais encore de sa goutte, sans qu’il en ait jamais rien ressenti, quoique ayant encore longtemps vĂ©cu. Qui a entendu parler de ce miracle? Cependant nous l’avons connu, nous et un certain nombre de frĂšres Ă  qui le bruit en a pu parvenir. Un ancien mime de Curube fut guĂ©ri de mĂȘme d’une paralysie et d’une hernie, et sortit du baptĂȘme comme s’il n’avait jamais rien eu. Qui connaĂźt ce miracle, hors ceux de Curube, et peut-ĂȘtre un petit nombre de personnes? Pour nous, quand nous l’apprĂźmes, nous fĂźmes venir cet homme Ă  Carthage, par l’ordre du saint Ă©vĂȘque AurĂ©lius, bien que nous en eussions Ă©tĂ© informĂ©s par des personnes tellement dignes de foi que nous n’en pouvions douter. HespĂ©rius, d’une famille tribunitienne, possĂšde dans notre voisinage un domaine sur les terres de Fussales , appelĂ© ZubĂ©di. Ayant reconnu que l’esprit malin tourmentait ses esclaves et son bĂ©tail, il pria nos prĂȘtres, en mon absence, de vouloir bien venir chez lui afin d’en chasser les dĂ©mons. L’un d’eux s’y rendit, et offrit le sacrifice du corps de JĂ©sus-Christ, avec de ferventes priĂšres, pour faire cesser cette possession. AussitĂŽt elle cessa par la misĂ©ricorde de Dieu. Or, HespĂ©rius avait reçu d’un de ses amis un peu de la terre sainte de JĂ©rusalem oĂč JĂ©sus-Christ fut enseveli et ressuscita le troisiĂšme jour. Il avait suspendu cette ferre dans sa chambre Ă  coucher, pour se mettre lui-mĂȘme Ă  l’abri des obsessions du dĂ©mon. Lorsque sa maison en fut dĂ©livrĂ©e, il se demanda ce qu’il ferait de cette terre qu’il ne voulait plus, par respect, garder dans sa chambre. Il arriva par hasard que mon collĂšgue Maximin, Ă©vĂȘque de Sinite, et moi, nous Ă©tions alors dans les environs. ilespĂ©rius nous fit prier de l’aller voir, et nous y allĂąmes. Il nous raconta tout ce qui s’était passĂ©, et nous pria d’enfouir cette terre en un lieu oĂč les chrĂ©tiens pussent s’assembler pour faire le service de Dieu. Nous y consentĂźmes. Il y avait prĂšs de lĂ  un jeune paysan paralytique, qui, sur cette nouvelle, pria ses parents de le porter sans dĂ©lai vers ce saint lieu ; et Ă  peine y fut-il arrivĂ© et eut-il priĂ©, qu’il put s’en retourner sur ses pieds, parfaitement guĂ©ri. Dans une mĂ©tairie nommĂ©e Victoriana, Ă  trente milles d’Hippone, il y a un monument en l’honneur des deux martyrs de Milan, Gervais et Protais. On y porta un jeune homme qui, Ă©tant allĂ© vers midi, pendant l’étĂ©, abreuver son cheval Ă  la riviĂšre, fut possĂ©dĂ© par le dĂ©mon. Comme il Ă©tait Ă©tendu mourant et semblable Ă  un mort, la maĂźtresse du lieu vint sur le soir, selon sa coutume, prĂšs du monument, avec ses servantes et quelques religieuses, pour y chanter des hymnes et y faire sa priĂšre. Alors le dĂ©mon, frappĂ© et comme rĂ©veillĂ© par ces voix, saisit l’autel avec un frĂ©missement terrible, et sans oser ou sans pouvoir le remuer, il s’y tenait attachĂ© et pour ainsi dire liĂ©. Puis, priant d’une voix gĂ©missante, il suppliait qu’on lui pardonnĂąt, et il confessa mĂȘme comment et en quel endroit il Ă©tait entrĂ© dans le corps de ce jeune homme. A la fin, promettant d’en sortir, il en nomma toutes les parties, avec menace de les couper, quand il sortirait, et, en disant cela, il se retira de ce jeune homme. Mais l’oeil du malheureux tomba sur sa joue, retenu par une petite veine comme par une racine, et la prunelle devint toute blanche. Ceux qui Ă©taient prĂ©sents et qui s’étaient mis en priĂšre avec les personnes accourues au bruit, touchĂ©s de ce spectacle et contents de voir ce jeune homme revenu Ă  son bon sens, s’affligeaient nĂ©anmoins de la perte de son oeil et disaient qu’il fallait appeler un mĂ©decin. Alors le beau-frĂšre de celui qui l’avait transportĂ© prenant la parole Dieu, dit-il, qui a chassĂ© le dĂ©mon Ă  la priĂšre de ces saints, peut bien aussi rendre la vue Ă  ce jeune homme ». LĂ -dessus il remit comme il put l’oeil Ă  sa place et le banda avec son mouchoir; sept jours aprĂšs, il crut pouvoir l’enlever, et il trouva l’oeil parfaitement guĂ©ri. D’autres malades encore trouvĂšrent en ce lieu leur guĂ©rison; mais ce rĂ©cit nous mĂšnerait trop loin. Je connais une fille d’Hippone, qui, s’étant frottĂ©e d’une huile oĂč le prĂȘtre qui priait pour elle avait mĂȘlĂ© ses larmes, fut aussitĂŽt dĂ©livrĂ©e du malin esprit. Je sais que la mĂȘme chose arriva Ă  un jeune homme, la premiĂšre fois qu’un Ă©vĂȘque, qui ne l’avait point vu, pria pour lui. Il y avait Ă  Hippone un vieillard nommĂ© Florentius, homme pauvre et pieux, qui vivait de son mĂ©tier de tailleur. Ayant perdu l’habit qui le couvrait et n’ayant pas de quoi en acheter un autre, il courut au tombeau des Vingt. Martyrs , qui est fort cĂ©lĂšbre chez nous, et les pria de le vĂȘtir. Quelques jeunes gens qui se trouvaient lĂ  par hasard, et qui avaient envie de rire, l’ayant entendu, le suivirent quand il sortit et se mirent Ă  le railler, comme s’il eĂ»t demandĂ© cinquante oboles aux martyrs pour avoir un habit. Mais lui, continuant toujours son chemin sans rien dire, vit un grand poisson qui se dĂ©battait sur le rivage; il le prit avec le secours de ces jeunes gens, et In vendit trois cents oboles Ă  un cuisinier nommĂ© Catose, chrĂ©tien zĂ©lĂ©, Ă  qui il raconta tout ce qui s’était passĂ©. Il se disposait Ă  acheter de la laine, afin que sa femme lui en fĂźt tel habit qu’elle pourrait; mais le cuisinier ayant ouvert le poisson, trouva dedans une bague d’or. TouchĂ© Ă  la fois de compassion et de pieux effroi, il la porta Ă  cet homme, en lui disant VoilĂ  comme les vingt Martyrs ont pris soin de vous vĂȘtir. L’évĂȘque Projectus ayant apportĂ© Ă  Tibilis des reliques du trĂšs-glorieux martyr saint Etienne, il se fit autour du reliquaire un grand concours de peuple. Une femme aveugle des environs pria qu’on la menĂąt Ă  l’évĂȘque qui portait ce sacrĂ© dĂ©pĂŽt, et donna des fleurs pour les faire toucher aux reliques. Quand on les lui eut rendues, elle les porta Ă  ses yeux, et recouvra tout d’un coup la vue. Tous ceux qui Ă©taient prĂ©sents furent surpris de ce miracle; mais elle, d’un air d’allĂ©gresse, se mit Ă  marcher la premiĂšre devant eux et n’eut plus besoin de guide. Lucillus, Ă©vĂȘque de Sinite, ville voisine d’Hippone, portait en procession les reliques du mĂȘme martyr, fort rĂ©vĂ©rĂ© en ce lieu. Une fistule, qui le faisait beaucoup souffrir et que son mĂ©decin Ă©tait sur le point d’ouvrir, fut tout d’un coup guĂ©rie par l’effet de ce pieux fardeau ; car il n’en souffrit plus dĂ©sormais. Eucharius, prĂȘtre d’Espagne, qui habitait Ă  Calame , fut guĂ©ri d’une pierre, qui le tourmentait depuis longtemps, par les reliques du mĂȘme martyr, que l’évĂȘque Possidius y apporta. Le mĂȘme prĂȘtre, Ă©tant en proie Ă  une autre maladie qui le mit si bas qu’on le croyait mort et que dĂ©jĂ  on lui avait liĂ© lĂ©s mains, revint par le secours du mĂȘme martyr. On jeta sur les reliques sa robe de prĂȘtre que l’on remit ensuite sur lui, et il fut rappelĂ© Ă  la vie. Il y avait lĂ  un homme fort ĂągĂ©, nommĂ© Martial, le plus considĂ©rable de la ville, qui avait une grande aversion pour la religion chrĂ©tienne. Sa fille Ă©tait chrĂ©tienne et son gendre avait Ă©tĂ© baptisĂ© la mĂȘme annĂ©e. Ceux-ci le voyant malade, le conjurĂšrent en pleurant de se faire chrĂ©tien; mais il refusa, et les chassa avec colĂšre d’auprĂšs de lui. Son gendre trouva Ă  propos d’aller au tombeau de saint Etienne, pour demander Ă  Dieu la conversion de son beau-pĂšre. Il pria avec beaucoup de ferveur, et, prenant quelques fleurs de l’autel, les mit sur la tĂȘte du malade, comme il Ă©tait dĂ©jĂ  nuit., Le vieillard s’endormit; mais il n’était pas jour encore qu’il cria qu’on allĂąt chercher l’évĂȘque qui se trouvait alors avec moi Ă  Hippone. A son dĂ©faut, il fit venir des prĂȘtres, Ă  qui il dit qu’il Ă©tait chrĂ©tien, et qui le baptisĂšrent, au grand Ă©tonnement de fout le monde. Tant qu’il vĂ©cut, il eut toujours ces mots Ă  la bouche Seigneur JĂ©sus, recevez mon esprit » ; sans savoir que ces paroles, les derniĂšres qu’il prononça, avaient Ă©tĂ© aussi les derniĂšres paroles de saint Etienne, quand il fut lapidĂ© par les Juifs. Deux goutteux, l’un citoyen et l’autre Ă©tranger, furent aussi guĂ©ris par le mĂȘme saint le premier fut guĂ©ri instantanĂ©ment ; le second eut une rĂ©vĂ©lation de ce qu’il devait faire, quand la douleur se ferait sentir; il le fit et fut soulagĂ©. Audurus est une terre oĂč il y a une Ă©glise, et dans cette Ă©glise une chapelle dĂ©diĂ©e Ă  saint Etienne. Il arriva par hasard que, pendant qu’un petit enfant jouait dans la cour, des boeufs qui traĂźnaient un chariot, sortant de leur chemin, firent passer la roue sur lui et le tuĂšrent. Sa mĂšre l’emporte et le place prĂšs du lieu consacrĂ© au saint ; or, non-seulement il recouvra la vie, mais il ne parut pas mĂȘme qu’il eĂ»t Ă©tĂ© blessĂ©. Une religieuse qui demeurait Ă  Caspalium, terre situĂ©e dans les environs , Ă©tant fort malade et abandonnĂ©e des mĂ©decins, on porta sa robe Ă  la mĂȘme chapelle ; mais la religieuse mourut avant qu’on eĂ»t eu le temps de la rapporter. Cependant ses parents en couvrirent -son corps inanimĂ©, et aussitĂŽt elle ressuscita et fut guĂ©rie. A Hippone, un nommĂ© Bassus, de Syrie, priait devant les reliques du saint martyr pour sa fille, dangereusement malade ; il avait apportĂ© avec lui la robe de son enfant. Tout Ă  coup ses gens accoururent pour lui annoncer qu’elle Ă©tait morte. Mais quelques-uns de ses amis, qu’ils rencontrĂšrent en chemin, les empĂȘchĂšrent de lui annoncer cette nouvelle, de peur qu’il ne pleurĂąt devant tout le monde. De retour chez lui, et quand la maison retentissait dĂ©jĂ  des plaintes de ses domestiques, il jeta sur sa fille la robe qu’il apportait de l’église, et elle revint incontinent Ă  la vie. Le fils d’un certain IrĂ©nĂ©us, collecteur des impĂŽts, Ă©tait mort dans la mĂȘme ville. Pendant que l’on se prĂ©parait Ă  faire ses funĂ©railles, un des amis du pĂšre lui conseilla de faire frotter le corps de son fils de l’huile du mĂȘme martyr. On le fit, et l’enfant ressuscita. L’ancien tribun Eleusinus, qui avait mis son fils, mort de maladie, sur le tombeau du mĂŽme martyr, voisin du faubourg oĂč il demeurait, le remporta vivant, aprĂšs avoir priĂ© et versĂ© des larmes pour lui. Je pourrais encore rapporter un grand nombre d’autres miracles que je connais; mais comment faire? il faut bien, comme je l’ai promis, arriver Ă  la fin de cet ouvrage. Je ne doute point que plusieurs des nĂŽtres qui me liront ne soient fĂąchĂ©s que j’en aie omis beaucoup qu’ils connaissent aussi bien que moi; mais je les prie de m’excuser, et de considĂ©rer combien il serait long de faire ce que je suis obligĂ© de nĂ©gliger. Si je voulais rapporter seulement toutes les guĂ©risons qui ont Ă©tĂ© opĂ©rĂ©es Ă  Calame et Ă  Hippone par le glorieux martyr saint Etienne, elles contiendraient plusieurs volumes ; encore ne seraient-ce que celles dont on a Ă©crit les relations pour les lire au peuple. Aussi bien, c’est par mes ordres que ces relations ont Ă©tĂ© dressĂ©es, quand j’ai vu se faire de notre temps plusieurs miracles semblables Ă  ceux d’autrefois et dont il fallait ne pas laisser perdre la mĂ©moire. Or, il n’y a pas encore deux ans que les reliques de ce martyr sont Ă  Hippone ; et bien qu’on n’ait pas donnĂ© de relation de tous les miracles qui s’y sont faits, il s’en trouve dĂ©jĂ  prĂšs de soixante-dix au moment oĂč j’écris ceci. Mais Ă  Calame, oĂč les reliques de ce saint martyr sont depuis plus longtemps et oĂč l’on a plus de soin d’écrire ces relations, le nombre en -monte bien plus haut. Nous savons encore que plusieurs miracles sont arrivĂ©s Ă  Uzales, colonie voisine d’Utique, grĂące aux reliques du mĂȘme martyr, que l’évĂȘque Evodius y avait apportĂ©es, bien avant qu’il y en eĂ»t Ă  Hippone; mais on n’a pas coutume en ce pays d’en Ă©crire dĂšs relations, ou du moins cela ne se pratiquait pas autrefois. Peut-ĂȘtre le fait-on maintenant. Comme nous y Ă©tions, il n’y a pas longtemps, une dame de haute condition, nommĂ©e PĂ©tronia, ayant Ă©tĂ© guĂ©rie miraculeusement d’une langueur qui avait Ă©puisĂ© tous les remĂšdes des mĂ©decins, nous l’exhortĂąmes, avec l’agrĂ©ment de l’évĂȘque, Ă  en faire une relation qui pĂ»t ĂȘtre lue au peuple. Elle nous l’accorda fort obligeamment et y insĂ©ra une circonstance que je ne puis nĂ©gliger ici, quoique pressĂ© de passer Ă  ce qui me reste Ă  dire. Elle dit qu’un juif lui persuada de porter sur elle Ă  nu une ceinture de cheveux oĂč serait une bague dont le chaton avait Ă©tĂ© fait d’une pierre trouvĂ©e dans les reins d’un boeuf. Cette dame, portant cette ceinture sur elle, venait Ă  l’église du saint martyr. Mais un jour partie de Carthage, comme elle s’était arrĂȘtĂ©e dans une de ses terres sur les bords du fleuve Bagrada et qu’elle se levait pour continuer son chemin, elle fut tout Ă©tonnĂ©e de voir son anneau Ă  ses pieds. Elle tĂąta sa ceinture pour voir si elle ne s’était pas dĂ©tachĂ©e, et la trouvant bien liĂ©e, elle crut que l’anneau s’était rompu. Mais elle l’examina, le trouva parfaitement entier, et prit ce prodige pour une assurance de sa guĂ©rison. Elle dĂ©lia donc sa ceinture et la jeta avec l’anneau dans le fleuve. Ils ne croiront pas ce miracle ceux qui ne croient pas que le Seigneur JĂ©sus-Christ soit sorti du sein de sa mĂšre sans altĂ©rer sa virginitĂ©, et qu’il soit entrĂ©, toutes portes fermĂ©es, dans le lieu oĂč Ă©taient rĂ©unis ses disciples. Mais qu’ils s’informent au moins du fait que je viens de citer, et s’ils le trouvent vrai, qu’ils croient aussi le reste. C’est une dame illustre, de grande naissance, et mariĂ©e en haut lieu; elle demeure Ă  Carthage. La ville est grande, et la personne connue. Il est donc impossible que ceux qui s’enquerront de ce miracle n’apprennent pas ce qui en est. Tout au moins le martyr mĂȘme, par les priĂšres duquel elle a Ă©tĂ© guĂ©rie, a cru au fils d’une vierge, Ă  celui qui est entrĂ©, les portes fermĂ©es, dans le lieu oĂč Ă©taient rĂ©unis ses disciples; en un mot, et tout ce que nous disons prĂ©sentement n’est que pour en venir lĂ , il a cru en celui qui est montĂ© au ciel avec le mĂȘme corps dans lequel il est ressuscitĂ©; et si tant de merveilles s’opĂšrent par l’intercession du saint martyr, c’est qu’il a donnĂ© sa vie pour maintenir sa foi. Il s’accomplit donc encore aujourd’hui beaucoup de miracles; le mĂȘme Dieu qui a fait les prodiges que nous lisons fait encore ceux-ci par les personnes qu’il lui plaĂźt de choisir, et comme il lui plaĂźt. Mais ces derniers ne sont pas aussi connus, parce qu’une frĂ©quente lecture ne les imprime pas dans la mĂ©moire aussi fortement que les autres. Aux lieux mĂȘmes oĂč l’on prend soin d’en Ă©crire des relations, ceux qui sont prĂ©sents, lorsqu’on les lit, ne les entendent qu’une fois, et il y a beaucoup d’absents. Les personnes mĂȘmes qui les ont entendu lire ne les retiennent pas, et Ă  peine s’en trouve-t-il une seule de celles-lĂ  qui les rapporte aux autres. Voici un miracle qui est arrivĂ© parmi nous et qui n’est pas plus grand que ceux dont j’ai fait mention ; mais il est si Ă©clatant que je ne crois pas qu’il y ait Ă  Hippone une personne qui ne l’ait vu, ou qui n’en ait ouĂŻ parler, et qui jamais puisse l’oublier dix enfants, dont sept fils et trois filles, natifs de CĂ©sarĂ©e on Cappadoce, et d’assez bonne condition, ayant Ă©tĂ© maudits par leur mĂšre pour quelque outrage qu’ils lui firent aprĂšs la mort de son mari, furent miraculeusement frappĂ©s d’un tremblement de membres. Ne pouvant souffrir la confusion Ă  laquelle ils Ă©taient en butte dans leur pays, ils s’en allĂšrent, chacun de leur cĂŽtĂ©, errer dans l’empire romain. Il en vint deux Ă  Hippone, un frĂšre et une soeur, Paul et Palladia, dĂ©jĂ  fameux en beaucoup d’endroits par leur disgrĂące ; ils y arrivĂšrent quinze jours avant la fĂȘte de PĂąques, et ils visitaient tous les jours l’Eglise oĂč se trouvaient les reliques du glorieux saint Etienne, priant Dieu de s’apaiser Ă  leur Ă©gard et de leur rendre la santĂ©. Partout oĂč ils allaient, ils attiraient les regards, et ceux qui les avaient vus ailleurs disaient aux autres la cause de leur tremblement. Le jour de PĂąques venu, et comme dĂ©jĂ  un grand concours de peuple remplissait l’église, le jeune homme, tenant les balustres du lieu oĂč Ă©taient les reliques du martyr, tomba tout d’un coup, et demeura par terre comme endormi , sans toutefois trembler, comme il faisait d’ordinaire, mĂȘme en dormant. Cet accident Ă©tonna tout le monde, et plusieurs en furent touchĂ©s. Il s’en trouva qui voulurent le relever; mais d’autres les en empĂȘchĂšrent, et dirent qu’il valait mieux attendre la fin de son sommeil. Tout Ă  coup le jeune homme se releva sur ses pieds sans trembler, car il Ă©tait guĂ©ri, examinant tous ceux qui le regardaient. Qui put s’empĂȘcher alors de rendre grĂąces Ă  Dieu ? Toute l’église retentit de cris de joie, et l’on courut promptement Ă  moi pour me dire l’évĂ©nement, Ă  l’endroit oĂč j’étais assis, prĂȘt Ă  m’avancer vers le peuple. Ils venaient l’un sur l’autre, le dernier m’annonçant cette nouvelle, comme si je ne l’avais point apprise du premier. Tandis que je me rĂ©jouissais et rendais grĂąces Ă  Dieu, le jeune homme guĂ©ri entra lui-mĂȘme avec les autres, et se jeta Ă  mes pieds ; je l’embrassai et le relevai. Nous nous avançùmes vers le peuple, l’église Ă©tant toute pleine, et l’on n’entendait partout que ces mots Dieu soit bĂ©ni ! Dieu soit bĂ©ni ! Je saluai le peuple, et il recommença encore plus fort les mĂȘmes acclamations. Enfin, comme chacun eut fait silence, on lut quelques leçons de l’Ecriture. Quand le moment oĂč je devais parler fut venu, je fis un petit discours, selon l’exigence du temps et la grandeur de cette joie, aimant mieux qu’ils goĂ»tassent l’éloquence de Dieu dans une oeuvre si merveilleuse, que dans mon propre discours. Le jeune homme dĂźna avec nous, et nous raconta en dĂ©tail l’histoire de son malheur et celle de ses frĂšres, de ses soeurs et de sa mĂšre. Le lendemain, aprĂšs le sermon, je promis au peuple de lui en lire le rĂ©cit, au jour suivant . Le troisiĂšme jour donc aprĂšs le dimanche de PĂąques, comme on faisait la lecture promise , je fis mettre le frĂšre et la soeur sur les degrĂ©s du lieu oĂč je montais pour parler, afin qu’on pĂ»t les voir. Tout le peuple les regardait attentivement, l’un dans une attitude tranquille, l’autre tremblant de tous ses membres. Ceux qui ne les avaient pas vus ainsi apprenaient, par le malheur de la soeur, la misĂ©ricorde de Dieu pour le frĂšre. Ils voyaient ce dont il fallait se rĂ©jouir pour lui et ce qu’il fallait demander pour elle. Quand on eut achevĂ© de lire la relation, je les fis retirer. Je commençais Ă  faire quelques observations sur cette histoire, lorsqu’on entendit de nouvelles acclamations qui venaient du tombeau du saint martyr. Toute l’assemblĂ©e se tourna de ce cĂŽtĂ© et s’y porta en masse. La jeune fille n’avait pas plus tĂŽt descendu les degrĂ©s oĂč je l’avais fait mettre, qu’elle avait couru se mettre en priĂšres auprĂšs du tombeau. A peine en eut-elle touchĂ© les balustres qu’elle tomba comme son frĂšre et se releva parfaitement guĂ©rie. Or, comme nous demandions ce qui Ă©tait arrivĂ©, et d’oĂč venaient ces cris de joie, les fidĂšles rentrĂšrent avec elle dans la basilique oĂč nous Ă©tions, la ramenant guĂ©rie du tombeau du martyr. Alors il s’éleva un si grand cri de joie de la bouche des hommes et des femmes, que l’on crut que les larmes et les acclamations ne finiraient point. Palladia fut conduite au mĂȘme lieu oĂč on l’avait vue un peu auparavant trembler de tous ses membres. Plus on s’était affligĂ© de la voir moins favorisĂ©e que son frĂšre, plus on se rĂ©jouissait de la voir aussi bien guĂ©rie que lui. On glorifiait la bontĂ© de Dieu, qui avait entendu et exaucĂ© les priĂšres qu’on avait Ă  peine eu le temps de faire pour elle. Aussi, il s’élevait de toute part de si grands cris d’allĂ©gresse qu’à peine nos oreilles pouvaient-elles les soutenir. Qu’y avait-il dans le coeur de tout ce peuple si joyeux, sinon cette foi du Christ, pour laquelle saint Etienne avait rĂ©pandu son sang? CHAPITRE IX. TOUS LES MIRACLES OPÉRÉS PAR LES MARTYRS AU NOM DE JÉSUS-CHRIST SONT AUTANT DE TÉMOIGNAGES DE LA FOI QU’ILS ONT EUE EN JÉSUS-CHRIST. A qui ces miracles rendent-ils tĂ©moignage, sinon Ă  cette foi qui prĂȘche JĂ©sus-Christ ressuscitĂ© et montĂ© au ciel eu corps et en Ăąme? Les martyrs eux-mĂȘmes ont Ă©tĂ© les martyrs, c’est-Ă -dire les tĂ©moins de cette foi c’est pour elle qu’ils se sont attirĂ© la haine et la persĂ©cution du monde, et qu’ils ont vaincu, non en rĂ©sistant, mais en mourant. C’est pour elle qu’ils sont morts, eux qui peuvent obtenir ces grĂąces du Seigneur au nom duquel ils sont morts. C’est pour elle qu’ils ont souffert, afin que leur admirable patience fĂ»t suivie de ces miracles de puissance. Car s’il n’était pas vrai que la rĂ©surrection de la chair s’est d’abord manifestĂ©e en JĂ©sus-Christ et qu’elle doit s’accomplir dans tous les hommes telle qu’elle a Ă©tĂ© annoncĂ©e par ce Sauveur et prĂ©dite par les ProphĂštes, pourquoi les martyrs, Ă©gorgĂ©s pour cette foi qui prĂȘche la rĂ©surrection, ont-ils, quoique morts, un si grand pouvoir? En effet, soit que Dieu fasse lui-mĂȘme ces miracles, selon ce merveilleux mode d’action qui opĂšre des effets temporels du sein de l’éternitĂ©, soit qu’il agisse par ses ministres, et, dans ce dernier cas, soit qu’il emploie le ministĂšre des esprits des martyrs, comme s’ils Ă©taient encore au monde, ou celui des anges, les martyrs y interposant seulement leurs priĂšres, soit enfin qu’il agisse de quelque autre maniĂšre incomprĂ©hensible aux hommes, toujours faut-il tomber d’accord que les martyrs rendent tĂ©moignage Ă  cette foi qui prĂȘche la rĂ©surrection Ă©ternelle des corps. CHAPITRE X. COMBIEN SONT PLUS DIGNES D’ÊTRE HONORÉS LES MARTYRS QUI OPÈRENT DE TELS MIRACLES POUR QUE L’ON ADORE DIEU, QUE LES DÉMONS QUI NE FONT CERTAINS PRODIGES QUE POUR SE FAIRE EUX-MÊMES ADORER COMME DES DIEUX. Nos adversaires diront peut-ĂȘtre que leurs dieux ont fait aussi des miracles. A merveille, pourvu qu’ils en viennent dĂ©jĂ  Ă  comparer leurs dieux aux hommes qui sont morts parmi nous. Diront-ils qu’ils ont aussi des dieux tirĂ©s du nombre des morts, comme Hercule, Romulus et plusieurs autres qu’ils croient Ă©levĂ©s au rang des dieux? Mais nous ne croyons point, nous, que nos martyrs soient des dieux, parce que nous savons que notre Dieu est le leur; et cependant, les miracles que les paĂŻens prĂ©tendent avoir Ă©tĂ© faits par les temples de leurs dieux ne sont nullement comparables Ă  ceux qui se font par les tombeaux de nos martyrs. Ou s’il en est quelques-uns qui paraissent du mĂȘme ordre, nos martyrs ne laissent pas de vaincre leurs dieux, comme MoĂŻse vainquit les mages de Pharaon . En effet, les prodiges opĂ©rĂ©s par les dĂ©mons sont inspirĂ©s par le mĂȘme orgueil qui les a portĂ©s Ă  vouloir ĂȘtre dieux; au lieu que nos martyrs les font, ou plutĂŽt Dieu les fait par eux et Ă  leur priĂšre, afin d’établir de plus en plus cette foi qui nous fait croire, non que les martyrs sont nos dieux, mais qu’ils n’ont avec nous qu’un mĂȘme Dieu. Enfin, les paĂŻens ont bĂąti des temples aux divinitĂ©s de leur choix, leur ont dressĂ© des autels, donnĂ© des prĂȘtres et fait des sacrifices; mais nous, nous n’élevons point Ă  nos martyrs des temples comme Ă  des dieux, mais des tombeaux comme Ă  des morts dont les esprits sont vivants devant Dieu. Nous ne dressons point d’autels pour leur offrir des sacrifices, mais nous immolons l’hostie Ă  Dieu seul, qui est notre Dieu et le leur. Pendant ce sacrifice, ils sont nommĂ©s en leur lieu et en leur ordre, comme des hommes de Dieu qui, en confessant son nom, ont vaincu le monde; mais le prĂȘtre qui sacrifie ne les invoque point c’est Ă  Dieu qu’il sacrifie et non pas Ă  eux, quoiqu’il sacrifie en mĂ©moire d’eux; car il est prĂȘtre de Dieu et non des martyrs. Et en quoi consiste le sacrifice lui-mĂȘme? c’est le corps de JĂ©sus-Christ, lequel n’est pas offert aux martyrs, parce qu’eux-mĂȘmes sont aussi ce corps. A quels miracles croira-t-on de prĂ©fĂ©rence? aux miracles de ceux qui veulent passer pour dieux, ou aux miracles de ceux qui ne les font que pour Ă©tablir la foi en la divinitĂ© de JĂ©sus-Christ? A qui se fier? Ă  ceux qui veulent faire consacrer leurs crimes ou Ă  ceux qui ne souffrent pas mĂȘme que l’on consacre leurs louanges, et qui veulent qu’on les rapporte Ă  la gloire de celui en qui on les loue? C’est en Dieu, en effet, que leurs Ăąmes sont glorifiĂ©es . Croyons donc Ă  la vĂ©ritĂ© de leurs discours et Ă  la puissance de leurs miracles; car c’est pour avoir dit la vĂ©ritĂ© qu’ils ont souffert la mort, et c’est la mort librement subie qui leur a valu le don des miracles. Et l’une des principales vĂ©ritĂ©s qu’ils ont affirmĂ©es, c’est que JĂ©sus-Christ est ressuscitĂ© des morts et qu’il a fait voir, en sa chair l’immortalitĂ© de la rĂ©surrection qu’il nous a promise au commencement du nouveau siĂšcle ou Ă  la fin de celui-ci. CHAPITRE XI. CONTRE LES PLATONICIENS QUI PRÉTENDENT PROUVER, PAR LE POIDS DES ÉLÉMENTS, QU’UN CORPS TERRESTRE NE PEUT DEMEURER DANS LE CIEL. A cette grĂące signalĂ©e de Dieu, qu’opposent ces raisonneurs dont Dieu sait que les pensĂ©es sont vaines ? Ils argumentent sur le poids des Ă©lĂ©ments. Platon, leur maĂźtre, leur a enseignĂ© en effet que deux des grands Ă©lĂ©ments du monde, et les plus Ă©loignĂ©s l’un de l’autre, le feu et la terre, sont joints et unis par deux Ă©lĂ©ments intermĂ©diaires, c’est-Ă -dire par l’air et par l’eau . Ainsi, disent-ils, puisque la terre est le premier corps en remontant la sĂ©rie, l’eau le second, l’air le troisiĂšme, et le ciel le quatriĂšme, un corps terrestre ne peut pas ĂȘtre dans le ciel. Chaque Ă©lĂ©ment, pour tenir sa place, est tenu en Ă©quilibre par son propre poids . VoilĂ  les arguments dont la faiblesse prĂ©somptueuse des hommes se sert pour combattre la toute-puissance de Dieu, Que font donc tant de corps terrestres dans l’air, qui est le troisiĂšme Ă©lĂ©ment au-dessus de la terre? Ă  moins qu’on ne veuille dire que celui qui a donnĂ© aux corps terrestres des oiseaux la facultĂ© de s’élever en l’air par la lĂ©gĂšretĂ© de leurs plumes ne pourra donner aux hommes, devenus immortels, la vertu de rĂ©sider mĂȘme au plus haut des cieux! A ce compte, les animaux terrestres qui ne peuvent voler, comme sont les hommes, devraient vivre sous la terre comme les poissons, qui sont des animaux aquatiques et vivent sous l’eau. Pourquoi un animal terrestre ne tire-t-il pas au moins sa vie du second Ă©lĂ©ment, qui est l’eau, et ne peut-il y sĂ©journer sans ĂȘtre suffoquĂ© ; et pourquoi faut-il qu’il vive dans le troisiĂšme? Y a-t-il donc erreur ici dans l’ordre des Ă©lĂ©ments, ou plutĂŽt n’est-ce pas leur raisonnement, et non la nature, qui est en dĂ©faut? Je ne reviendrai pas ici sur ce que j’ai dĂ©jĂ  dit au troisiĂšme livre , comme par exemple qu’il y a beaucoup de corps terrestres pesants, tels que le plomb, auxquels l’art peut donner une certaine figure qui leur permet de nager sur l’eau. Et l’on refusera au souverain artisan le pouvoir de donner au corps humain une qualitĂ© qui l’élĂšve et le retienne dans le ciel! Il y a plus, et ces philosophes ne peuvent pas mĂȘme se servir, pour me combattre, de l’ordre prĂ©tendu des Ă©lĂ©ments. Car si la terre occupe par son poids la premiĂšre rĂ©gion, si l’eau vient ensuite, puis l’air, puis le ciel, l’ñme est au-dessus de tout cela. Aristote en fait un cinquiĂšme corps , et Platon nie qu’elle soit un corps. Or, si elle est un cinquiĂšme corps, assurĂ©ment ce corps est au-dessus de tous les autres; et si elle n’est point un corps, elle les surpasse tous Ă  un titre encore plus Ă©levĂ©. Que fait-elle donc dans un corps terrestre? que fait la chose la plus subtile, la plus lĂ©gĂšre, la plus active de toutes, dans une masse si grossiĂšre, si pesante et si inerte? Une nature Ă  ce point excellente ne pourra-t-elle pas Ă©lever son corps dans le ciel? Et si maintenant des corps terrestres ont la vertu de retenir les Ăąmes en bas, les Ăąmes ne pourront-elles pas un jour Ă©lever en haut des corps terrestres? Passons Ă  ces miracles de leurs dieux qu’ils opposent Ă  ceux de nos martyrs, et nous verrons qu’ils nous justifient. Certes, si jamais les dieux paĂŻens ont fait quelque chose d’extraordinaire, c’est ce que rapporte Varron d’une vestale qui, accusĂ©e d’avoir violĂ© son voeu de chastetĂ©, puisa de l’eau du Tibre dans un crible et la porta Ă  ses juges, sans qu’il s’en rĂ©pandĂźt une seule goutte . Qui soutenait sur le crible le poids de l’eau? qui l’empĂȘchait de fuir Ă  travers tant d’ouvertures? Ils rĂ©pondront que c’est quelque dieu ou quelque dĂ©mon. Si c’est un dieu, en est-il un plus puissant que celui qui a créé le monde? et si c’est un dĂ©mon, est-il plus puissant qu’un ange soumis au Dieu crĂ©ateur du monde? Si donc un dieu infĂ©rieur, ange ou dĂ©mon, a pu tenir suspendu un Ă©lĂ©ment pesant et liquide, en sorte qu’on eĂ»t dit que l’eau avait changĂ© de nature, le Dieu tout-puissant, qui a créé tous les Ă©lĂ©ments, ne pourra-t-il ĂŽter Ă  un corps terrestre sa pesanteur, pour qu’il habite, renaissant et il plaira Ă  l’esprit qui le vivifie? D’ailleurs, puisque ces philosophes- veulent que l’air soit entre le feu et l’eau, au-dessous de l’un et au-dessus de l’autre, d’oĂč vient que nous le trouvons souvent entre l’eau et l’eau, ou entre l’eau et la terre? Qu’est-ce que les nuĂ©es, selon eux? de l’eau, sans doute; et cependant, ne trouve-t-on pas l’air entre elles et les mers? Par quel poids et quel ordre des Ă©lĂ©ments, des torrents d’eau, trĂšs-impĂ©tueux et trĂšs-abondants, sont-ils suspendus dans les nues, au-dessus de l’air, avant de courir au-dessous de l’air sur la terre? Et enfin, pourquoi l’air est-il entre le ciel et la terre dans toutes les parties du monde, si sa place est entre le ciel et l’eau, comme celle de l’eau est entre l’air et la terre? Bien plus, si l’ordre des Ă©lĂ©ments veut, comme le dit Platon, que les deux extrĂȘmes, c’est-Ă -dire le feu et la terre, soient unis par les deux autres qui sont au milieu, c’est-Ă -dire l’eau et le feu, et que le feu occupe le plus haut du ciel, et la terre la plus basse partie du monde comme une sorte de fondement, de telle sorte que la terre ne puisse ĂȘtre dans le ciel, pourquoi le feu est-il sur la terre? Car enfin, dans leur systĂšme, ces deux Ă©lĂ©ments, la terre et le feu, le plus bas et le plus haut, doivent se tenir si bien, chacun Ă  sa place, que ni celui qui doit ĂȘtre en bas ne puisse monter en haut, ni celui qui est en haut descendre en bas. Ainsi, puisqu’à leur avis il ne peut y avoir la moindre parcelle de feu dans le ciel, nous ne devrions pas voir non plus la moindre parcelle de feu sur la terre. Cependant le feu est si rĂ©ellement sur la terre, et mĂȘme sous la terre, que les sommets des montagnes le vomissent; outre qu’il sert sur la terre aux diffĂ©rents usages des hommes, et qu’il naĂźt mĂȘme dans la terre, puisque nous le voyons jaillir du bois et du caillou, qui sont sans doute des corps terrestres. Mais le feu d’en liant, disent-ils, est un feu tranquille, pur, inoffensif et Ă©ternel, tandis que celui-ci est violent, chargĂ© de vapeur, corruptible et corrompant . Il ne corrompt pourtant pas les montagnes et les cavernes, oĂč il brĂ»le continuellement. Mais je veux qu’il soit diffĂ©rent de l’autre, afin de pouvoir servir Ă  nos besoins. Pourquoi donc ne veulent-ils pas que la nature des corps terrestres, devenue un jour incorruptible, puisse un jour se mettre en harmonie avec celle du ciel, comme aujourd’hui le feu corruptible s’unit avec la terre? Ils ne sauraient donc tirer aucun avantage ni du poids, ni de l’ordre des Ă©lĂ©ments, pour montrer qu’il est impossible au Dieu tout-puissant de modifier nos corps de telle sorte qu’ils puissent demeurer dans le ciel. CHAPITRE XII. CONTRE LES CALOMNIES ET LES RAILLERIES DES INFIDÈLES AU SUJET DE LA RÉSURRECTION DES CORPS. Mais nos adversaires nous pressent de questions minutieuses et ironiques sur la rĂ©surrection de la chair; ils nous demandent si les crĂ©atures avortĂ©es ressusciteront; et comme Notre-Seigneur a dit En vĂ©ritĂ©, je vous le dĂ©clare, le moindre cheveu de votre tĂȘte ne pĂ©rira pas » ; ils nous demandent encore si la taille et la force seront Ă©gales en tous, ou si les corps seront de diffĂ©rentes grandeurs. Dans le premier cas, d’oĂč les ĂȘtres avortĂ©s, supposĂ© qu’ils ressuscitent, prendront-ils ce qui leur manquait en naissant? Et si l’on dit qu’ils ne ressusciteront pas, n’étant pas vĂ©ritablement nĂ©s, la mĂȘme difficultĂ© s’élĂšve touchant les petits enfants venus Ă  terme, mais morts au berceau. En effet, nous ne pouvons pas dire que ceux qui n’ont pas Ă©tĂ© seulement engendrĂ©s, mais rĂ©gĂ©nĂ©rĂ©s par le baptĂȘme, ne ressusciteront pas De plus, ils demandent de quelle stature seront les corps dans cette Ă©galitĂ© de tous s’ils ont tous la longueur et la largeur de ceux qui ont Ă©tĂ© ici les plus grands, oĂč plusieurs prendront-ils ce qui leur manquait sur terre pour atteindre Ă  cette hauteur? Autre question si, comme dit l’ApĂŽtre, nous devons parvenir Ă  la plĂ©nitude de l’ñge de JĂ©sus-Christ »; si, selon le mĂȘme ApĂŽtre, Dieu nous a prĂ©destinĂ©s pour ĂȘtre rendus conformes Ă  l’image de son Fils »; si, en d’autres termes, le corps de JĂ©sus-Christ doit ĂȘtre la mesure de tous ceux qui seront dans son royaume, il faudra, disent-ils, retrancher de la stature de plusieurs hommes. Et alors comment s’accomplira cette parole Que le moindre cheveu de votre tĂȘte ne pĂ©rira pas?» Et au sujet des cheveux mĂȘmes, ne demandent-ils pas encore si nous aurons tous ceux que le barbier nous a retranchĂ©s? Mais dans ce cas, de quelle horrible difformitĂ© ne serions-nous pas menacĂ©s! Car ce qui arrive aux cheveux ne manquerait pas d’arriver aux ongles. OĂč serait donc alors la biensĂ©ance, qui doit avoir ses droits en cet Ă©tat bienheureux plus encore que dans cette misĂ©rable vie? Dirons-nous que tout cela ne reviendra pas aux ressuscitĂ©s? Tout cela pĂ©rira donc; et alors, pourquoi prĂ©tendre qu’aucun des cheveux de notre tĂȘte ne pĂ©rira? MĂȘmes difficultĂ©s sur la maigreur et l’embonpoint car si tous les ressuscitĂ©s sont Ă©gaux, les uns ne seront plus maigres, et les autres ne seront plus gras. Il y aura Ă  retrancher aux uns, Ă  ajouter aux autres, Les uns gagneront ce qu’ils n’avaient pas, les autres perdront ce qu’ils avaient. On ne soulĂšve pas moins d’objections au sujet de la corruption et de la dissolution des corps morts, dont une partie s’évanouit en poussiĂšre et une autre s’évapore dans l’air; de plus, les uns sont mangĂ©s par les bĂȘtes, les autres consumĂ©s par le feu; d’autres tombĂ©s dans l’eau par suite d’un naufrage ou autrement, se corrompent et se liquĂ©fient. Comment croire que tout cela puisse se rĂ©unir pour reconstituer un corps? — Ils se prĂ©valent encore des dĂ©fauts qui viennent de naissance ou d’accident; ils allĂšguent les enfantements monstrueux, et demandent d’un air de dĂ©rision si les corps contrefaits ressusciteront dans leur mĂȘme difformitĂ©. RĂ©pondons-nous que la rĂ©surrection fera disparaĂźtre tous ces dĂ©fauts? ils croient nous convaincre de contradiction par les cicatrices du Sauveur que nous croyons ressuscitĂ©es avec lui. Mais voici la question la plus difficile A qui doit revenir la chair d’un homme, quand un autre homme affamĂ© en aura fait sa nourriture? Cette chair s’est assimilĂ©e Ă  la substance de celui qui l’a dĂ©vorĂ©e et a rempli les vides qu’avait creusĂ©s chez lui la maigreur. On demande donc si elle retournera au premier homme qui la possĂ©dait, ou Ă  celui qui s’en est nourri. C’est ainsi que nos adversaires prĂ©tendent livrer au ridicule la foi dans la rĂ©surrection, sauf Ă  promettre Ă  l’ñme, avec Platon, une vicissitude Ă©ternelle de vĂ©ritable misĂšre et de fausse fĂ©licitĂ© , ou Ă  soutenir avec Porphyre qu’aprĂšs diverses rĂ©volutions Ă  travers les corps, elle verra la fin de ses misĂšres, non en prenant un corps immortel, mais en restant affranchie de toute espĂšce de corps. CHAPITRE XIII. SI LES ENFANTS AVORTÉS, ÉTANT COMPRIS AU NOMBRE DES MORTS, NE LE SERONT PAS AU NOMBRE DES RESSUSCITÉS. Je vais rĂ©pondre, avec l’aide de Dieu, aux objections que j’ai mises dans la bouche de nos adversaires. Je n’oserai nier, ni assurer que les enfants avortĂ©s, qui ont vĂ©cu dans le sein de leur mĂšre et y sont morts, doivent ressusciter. Cependant je ne vois pas pourquoi, Ă©tant du nombre des morts, ils seraient exclus de la rĂ©surrection. En effet, ou bien tous les morts ne ressusciteront pas, et il y aura des Ăąmes qui demeureront Ă©ternellement sans corps, comme celles qui n’en ont eu que dans le- sein maternel; ou bien, si toutes les Ăąmes humaines reprennent les corps qu’elles ont eus, en quelque lieu qu’elles les aient laissĂ©s, je ne vois pas de raison pour exclure de la rĂ©surrection les enfants mĂȘme qui sont morts dans le sein de leur mĂšre. Mais Ă  quelque sentiment qu’on s’arrĂȘte, tout au moins faut-il leur appliquer, s’ils ressuscitent, ce que nous allons dire des enfants dĂ©jĂ  nĂ©s. CHAPITRE XIV. SI LES ENFANTS RESSUSCITERONT AVEC LE MÊME CORPS QU’ILS AVAIENT A L’ÂGE OÙ ILS SONT MORTS. Que dirons-nous donc des enfants, sinon qu’ils ne ressusciteront pas dans l’état de petitesse oĂč ils Ă©taient en mourant? Ils recevront, en un instant, par la toute-puissance de Dieu, l’accroissement auquel ils devaient parvenir avec le temps. Quand Notre-Seigneur a dit Pas un cheveu de votre tĂȘte ne pĂ©rira »; il a entendu que nous ne perdrons rien de ce que nous avions, mais non pas que nous ne gagnerons rien de ce qui nous manquait. Or, ce qui manque Ă  un enfant qui meurt, c’est le dĂ©veloppement complet de son corps. Il a beau ĂȘtre parfait comme enfant, la perfection de la grandeur corporelle lui manque, et il ne l’atteindra que parvenu au terme de sa croissance. On peut dire en un sens que, dĂšs qu’il est conçu, il possĂšde tout ce qu’il doit acquĂ©rir il le possĂšde idĂ©alement et en puissance, mais non en fait, de mĂȘme que toutes les parties du corps humain sont contenues dans la semence, quoique plusieurs manquent aux enfants dĂ©jĂ  nĂ©s, les dents, par exemple, et autres parties analogues. C’est dans cette raison sĂ©minale de la matiĂšre qu’est renfermĂ© tout ce qu’on ne voit pas encore, tout ce qui doit paraĂźtre un jour. C’est en elle que l’enfant, qui sera un jour petit ou grand, est dĂ©jĂ  grand ou petit. C’est par elle enfin qu’à la rĂ©surrection des corps, nous ne perdrons rien de ce que nous avions ici-bas; et dussent les hommes ressusciter tous Ă©gaux et avec une taille de gĂ©ants, ceux qui l’ont eue n’en perdront rien, puisque JĂ©sus-Christ a dit Aucun cheveu de votre-tĂȘte ne pĂ©rira; et, quant aux autres, l’admirable Ouvrier qui a tirĂ© toutes choses du nĂ©ant ne sera pas en peine de supplĂ©er Ă  ce qui leur manque . CHAPITRE XV. SI LA TAILLE DE JÉSUS-CHRIST SERA LE MODÈLE DE LA TAILLE DE TOUS LES HOMMES, LORS DE LA RÉSURRECTION. Il est certain que JĂ©sus-Christ est ressuscitĂ© avec la mĂȘme stature qu’il avait Ă  sa mort, et ce serait se tromper que de croire qu’au jour de la rĂ©surrection gĂ©nĂ©rale, il prendra, pour Ă©galer les plus hautes statures, une grandeur charnelle qu’il n’avait pas, quand il apparut Ă  ses disciples sous la forme qui leur Ă©tait connue. Maintenant, dirons-nous que les plus grands doivent ĂȘtre rĂ©duits Ă  la mesure du Sauveur? mais alors il serait beaucoup retranchĂ© du corps de plusieurs, ce qui va contre cette parole divine Pas un cheveu de votre tĂȘte ne pĂ©rira». Reste donc Ă  dire que chacun prendra la taille qu’il avait dans sa jeunesse, bien qu’il soit mort vieux, ou celle qu’il aurait dĂ» prendre un jour, si la mort rie l’eĂ»t prĂ©venu. Quant Ă  cette mesure de l’ñge parfait de JĂ©sus-Christ, dont parle l’ApĂŽtre , ou bien il ne faut pas l’entendre Ă  la lettre et dire que la mesure parfaite de ce chef mystique trouvera son accomplissement dans la perfection de ses membres; ou, si nous l’entendons de la rĂ©surrection des corps, il faut croire que les corps ne ressusciteront ni au-dessus, ni au-dessous de la jeunesse, mais dans l’ñge et dans la force oĂč nous savons que JĂ©sus-Christ Ă©tait arrivĂ©. Les plus savants mĂȘme d’entre les paĂŻens ont fixĂ© la plĂ©nitude de la jeunesse Ă  l’ñge de trente ans environ , aprĂšs lequel l’homme commence Ă  ĂȘtre sur le retour et incline vers la vieillesse. Aussi l’ApĂŽtre n’a-t-il pas dit A la mesure du corps ou de la stature; mais A la mesure de l’ñge parfait de JĂ©sus-Christ. CHAPITRE XVI. COMMENT IL FAUT ENTENDRE QUE LES SAINTS SERONT RENDUS CONFORMES A L’IMAGE DU FILS DE DIEU. Et quand l’ApĂŽtre parle de ces prĂ©destinĂ©s qui seront rendus conformes Ă  l’image du Fils de Dieu », on peut fort bien entendre qu’il s’agit de l’homme intĂ©rieur. C’est ainsi qu’il est dit dans un autre endroit Ne vous conformez point au siĂšcle, mais rĂ©formez-vous par un renouvellement de votre esprit ». C’est par la mĂȘme partie de notre ĂȘtre que nous devons rĂ©former pour n’ĂȘtre pas conformes au siĂšcle, que nous deviendrons conformes au Fils de Dieu. On peut encore entendre cette parole dans ce sens que, Dieu-lui-mĂȘme s’étant rendu conforme Ă  nous, quand il a pris la condition mortelle, de mĂȘme nous lui serons conformes par l’immortalitĂ©, ce qui a rapport aussi Ă  la rĂ©surrection des corps. Si l’on veut expliquer ces paroles par la forme sous laquelle les corps ressusciteront, cette conformitĂ©, aussi bien que la mesure dont parle l’ApĂŽtre, ne regardera que l’ñge, et non pas la taille. Chacun donc ressuscitera aussi grand qu’il Ă©tait ou qu’il aurait Ă©tĂ© dans sa jeunesse, et quant Ă  la forme, il importera peu que ce soit celle d’un vieillard ou d’un enfant, puisque ni l’esprit ni le corps ne seront plus sujets Ă  aucune faiblesse. Si donc on s’avisait de soutenir que chacun ressuscitera dans la mĂȘme conformation des membres qu’il avait Ă  sa mort, il n’y aurait pas lieu Ă  s’engager contre lui dans une laborieuse discussion. CHAPITRE XVII. SI LES FEMMES, EN RESSUSCITANT, GARDERONT LEUR SEXE. De ces paroles Jusqu’à ce que nous par venions tous Ă  l’état d’homme parfait, Ă  la mesure de la plĂ©nitude de l’ñge de JĂ©sus-Christ », et de celles-ci Rendus conformes Ă  l’image du Fils de Dieu », quelques-uns ont conclu que les femmes ne ressusciteront point dans leur sexe, mais dans celui de l’homme, parce que Dieu a formĂ© l’homme seul du limon de la terre, et qu’il a tirĂ© la femme de l’homme. Pour moi, j’estime plus raisonnable de croire Ă  la rĂ©surrection de l’un et de l’autre sexe. Car il n’y aura plus alors cette convoitise qui nous cause aujourd’hui de la confusion. Aussi bien, avant le pĂ©chĂ©, l’homme et la femme Ă©taient nus, et ils n’en rougissaient pas. Le vice sera donc retranchĂ© de nos corps, mais leur nature subsistera. Or, le sexe de la femme n’est point en elle un vice; c’est sa nature. D’ailleurs, il n’y aura plus alors ni commerce charnel ni enfantement, et la femme sera ornĂ©e d’une beautĂ© nouvelle qui n’allumera pas la convoitise dĂ©sormais disparue, mais qui glorifiera la sagesse et la bontĂ© de Dieu, qui a fait ce qui n’était pas, et dĂ©livrĂ© de la corruption ce qu’il a fait. Il fallait, au commencement du genre humain, qu’une cĂŽte fĂ»t tirĂ©e du flanc de l’homme endormi pour en faire une femme; car c’est lĂ  un symbole prophĂ©tique de JĂ©sus-Christ et de son Eglise. Ce sommeil d’Adam Ă©tait la mort du Sauveur , dont le cĂŽtĂ© fut percĂ© d’une lance sur la croix, aprĂšs qu’il eut rendu l’esprit; il en sortit du sang et de l’eau , lesquels figurent les sacrements, sur lesquels l’Eglise est Ă©difiĂ©e » ; aussi l’Ecriture s’est-elle servie de ce mot car elle ne dit pas que Dieu forma ou façonna la cĂŽte du premier homme, mais qu’il l’édifia en femme », d’oĂč vient que l’ApĂŽtre appelle l’Eglise l’édifice du corps de JĂ©sus-Christ . La femme est donc la crĂ©ature de Dieu aussi bien que l’homme, mais elle a Ă©tĂ© faite de l’homme, pour consacrer l’unitĂ©, et elle en a Ă©tĂ© faite de cette maniĂšre pour figurer JĂ©sus-Christ et l’Eglise. Celui qui a créé l’un et l’autre sexe les rĂ©tablira tous deux. Aussi JĂ©sus-Christ lui-mĂȘme quand les SadducĂ©ens, qui niaient la rĂ©surrection, lui demandĂšrent auquel des sept frĂšres appartiendrait la femme qui les avait tous eus pour maris l’un aprĂšs l’autre, chacun voulant, selon le prĂ©cepte de la loi, perpĂ©tuer la postĂ©ritĂ© de son frĂšre Vous vous trompez leur dit-il, faute de connaĂźtre les Ecriture elle pouvoir de Dieu ». Et loin de dire comme c’était le moment Que me demandez - vous? celle dont vous me parlez sera plus une femme, mais un homme, il ajouta; Car Ă  la rĂ©surrection on ne se mariera point et oĂč n’épousera point; mais tous seront comme les anges de Dieu dans le ciel ». Ils seront en effet Ă©gaux aux anges pour l’immortalitĂ© et la. bĂ©atitude, mais non quant au corps, ni quant Ă  la rĂ©surrection, dont les anges n’ont pas eu besoin, parce qu’ils n’ont pas pu mourir. Notre-Seigneur a donc dit qu’il n’y aura point de noces Ă  la rĂ©surrection, mais non pas qu’il n’y aura point de femmes; et il l’a dit en une occasion oĂč la rĂ©ponse naturelle Ă©tait Il n’y aura point de femmes, s’il avait prĂ©vu qu’il ne devait point y en avoir. Bien plus, il a dĂ©clarĂ© que la diffĂ©rence des sexes subsisterait, en disant On ne s’y mariera point », ce qui regarde les femmes, et On n’y Ă©pousera point », ce qui regarde les hommes. Aussi celles qui se marient ici-bas, comme ceux qui y Ă©pousent, seront Ă  la rĂ©surrection; mais ils n’y feront point de telles alliances. CHAPITRE XVIII. DE L’HOMME PARFAIT, C’EST-Ă -DIRE DE JÉSUS-CHRIST, ET DE SON CORPS, C’EST-A-DIRE DE L’ÉGLISE, QUI EN EST LA PLÉNITUDE. Pour comprendre ce que dit l’ApĂŽtre, que nous parviendrons tous Ă  l’état d’homme parfait, il faut examiner avec attention toute la suite de sa pensĂ©e. Il s’exprime ainsi Celui qui est descendu est celui-lĂ  mĂȘme qui est montĂ© au-dessus de tous les cieux, afin de consommer toutes choses. Lui-mĂȘme en a Ă©tabli quelques-uns apĂŽtres, d’autres prophĂštes, ceux-ci Ă©vangĂ©listes, ceux-lĂ  pasteurs et docteurs, pour la consommation des saints, l’oeuvre du ministĂšre et l’édifice du corps de JĂ©sus-Christ, jusqu’à ce que nous parvenions tous Ă  l’unitĂ© d’une mĂȘme foi, Ă  la connaissance du Fils de Dieu, Ă  l’état d’homme parfait et Ă  la mesure de la plĂ©nitude de l’ñge de JĂ©sus-Christ, afin que nous ne soyons plus comme des enfants, nous laissant aller Ă  tout vent de doctrine et aux illusions des hommes fourbes qui veulent nous engager dans l’erreur, mais que, pratiquant la vĂ©ritĂ© parla charitĂ©, nous croissions en toutes choses dans JĂ©sus-Christ, qui est la tĂȘte. d’oĂč tout le corps bien liĂ© et bien disposĂ© reçoit, selon la mesure et la force de chaque partie, le dĂ©veloppement nĂ©cessaire pour s’édifier soi-mĂȘme dans la charitĂ© ». VoilĂ  quel est l’homme parfait la tĂȘte d’abord, puis le corps composĂ© de tous les membres, qui recevront la derniĂšre perfection en leur temps. Chaque jour cependant, de nouveaux Ă©lĂ©ments se joignent Ă  ce corps, tandis que s’édifie l’Eglise Ă  qui l’on dit Vous ĂȘtes le corps de JĂ©sus-Christ et ses membres » ; et ailleurs Pour son corps qui est l’Eglise » ; et encore Nous ne sommes- tous ensemble qu’un seul pain et qu’un seul corps ». C’est de l’édifice de ce corps qu’il est dit ici Pour la consommation des saints, pour l’oeuvre du ministĂšre et l’édifice du corps de JĂ©sus-Christ ». Puis l’ApĂŽtre ajoute ce passage dont il est question Jusqu’à ce que nous parvenions tous Ă  l’unitĂ© d’une mĂȘme foi, Ă  la connaissance du Fils de Dieu, Ă  l’état d’homme parfait et Ă  la mesure de la plĂ©nitude de l’ñge de JĂ©sus-Christ »; et le reste, montrant enfin de quel corps on doit entendre cette mesure par ces paroles; Afin que nous croissions en toutes tout le corps bien liĂ© et bien disposĂ© reçoit, selon la mesure et la force de chaque partie, le dĂ©veloppement qui lui convient». Comme il y a une mesure de chaque partie, il y en a aussi une de tout le corps, composĂ© de toutes ces parties; et c’est la mesure de la plĂ©nitude dont il est dit A la mesure de la plĂ©nitude de l’ñge de JĂ©sus-Christ». L’ApĂŽtre fait encore mention de cette plĂ©nitude, lorsque, parlant de JĂ©sus-Christ, il dit ; Il l’a Ă©tabli pour ĂȘtre le chef de toute I’Eglise, qui est son corps et sa plĂ©nitude, lui qui consomme tout en tous ».Mais, lors mĂȘme qu’il faudrait entendre le passage dont il s’agit de la rĂ©surrection, qui nous empĂȘcherait d’appliquer aussi Ă  la femme ce qu’il dit de l’homme, en prenant l’homme pour tous les deux, comme dans ce verset du Psaume Bienheureux l’homme qui craint le Seigneur ! » Car assurĂ©ment les femmes qui craignent le Seigneur sont comprises dans la pensĂ©e du Psalmiste. CHAPITRE XIX. TOUS LES DÉFAUTS CORPORELS, QUI, PENDANT CETTE VIE, SONT CONTRAIRES À LA BEAUTÉ DE L’HOMME, DISPARAÎTRONT A LA RÉSURRECTION, LA SUBSTANCE NATURELLE DU CORPS TERRESTRE DEVANT SEULE SUBSISTER, MAIS AVEC D’AUTRES PROPORTIONS D’UNE JUSTESSE ACCOMPLIE. Est-il besoin de rĂ©pondre maintenant aux objections tirĂ©es des ongles et des cheveux? Si l’on a bien compris une fois qu’il ne pĂ©rira rien de notre corps, afin qu’il n’ait rien de difforme, on comprendra aussi aisĂ©ment que ce qui ferait une monstrueuse Ă©normitĂ© sera distribuĂ© dans toute la masse du corps, et non pas accumulĂ© Ă  une place oĂč la proportion des membres en serait altĂ©rĂ©e. Si, aprĂšs avoir fait un vase d’argile, on le voulait dĂ©faire pour en recomposer un vase nouveau, il ne serait pas nĂ©cessaire que cette portion de terre qui formait l’anse ou le fond dans le premier vase, les formĂąt aussi dans le second; il suffirait que toute l’argile y fĂ»t employĂ©e. Si donc les ongles et les cheveux, tant de fois coupĂ©s, ne peuvent revenir Ă  leur place qu’en produisant une difformitĂ©, ils n’y reviendront pas. Cependant ils ne seront pas anĂ©antis, parce qu’ils seront changĂ©s en la mĂȘme chair Ă  laquelle ils appartenaient, afin d’y occuper une place oĂč ils ne troublent pas l’économie gĂ©nĂ©rale des parties. Je ne dissimule pas, au surplus, que cette parole du Seigneur Pas un cheveu de votre tĂȘte ne pĂ©rira », ne paraisse s’appliquer plutĂŽt au nombre des cheveux qu’à leur longueur. C’est dans ce sens qu’il a dit aussi Tous les cheveux de votre tĂȘte sont comptĂ©s ». Je ne crois donc pas que rien doive pĂ©rir de notre corps de tout ce qui lui Ă©tait naturel; je veux seulement montrer que tout ce qui en lui Ă©tait dĂ©fectueux, et servait Ă  faire voir la misĂšre de sa condition, sera rendu Ă  sa substance transfigurĂ©e, le fond de l’ĂȘtre restant tout entier, tandis que la difformitĂ© seule pĂ©rira. Si un artisan ordinaire, qui a mal fait une statue, peut la refondre si bien qu’il en conserve toutes les parties, sans y laisser nĂ©anmoins ce qu’elle avait de difforme, que ne faut-il pas attendre, je le demande, du suprĂȘme Artisan? Ne pourra-t-il ĂŽter et retrancher aux corps des hommes toutes les difformitĂ©s naturelles ou monstrueuses, qui sont une condition de cette vie misĂ©rable, mais qui ne peuvent convenir Ă  la fĂ©licitĂ© future des saints, comme ces accroissements naturels sans doute, mais cependant disgracieux, de notre corps, sans rien enlever pour cela de sa substance? Il ne faut point dĂšs lors que ceux qui ont trop ou trop peu d’embonpoint apprĂ©hendent d’ĂȘtre au sĂ©jour cĂ©leste ce qu’ils ne voudraient pas ĂȘtre, mĂȘme ici-bas. Toute la beautĂ© du corps consiste, en effet, en une certaine proportion de ses parties, couvertes d’un coloris agrĂ©able. Or, quand cette proportion manque, ce qui choque la vue, c’est qu’il y a quelque chose qui fait dĂ©faut, ou quelque chose d’excessif. Ainsi donc, cette difformitĂ© qui rĂ©sulte de la disproportion des parties du corps disparaĂźtra, lorsque le CrĂ©ateur, par des moyens connus de lui, supplĂ©era Ă  ce qui manque ou ĂŽtera le superflu. Et quant Ă  la couleur des chairs, combien na sera-t-elle pas vive et Ă©clatante en ce sĂ©jour oĂč Les justes brilleront comme le soleil dans le royaume de leur pĂšre ?» Il faut croire que JĂ©sus-Christ dĂ©roba cet Ă©clat aux yeux de ses disciples, quand il parut devant eux aprĂšs sa rĂ©surrection; car ils n’auraient pu le soutenir, et cependant ils avaient besoin de regarder leur maĂźtre pour le reconnaĂźtre. C’est pour cette raison qu’il leur fit toucher ses cicatrices, qu’il but et mangea avec eux, non par nĂ©cessitĂ©, mais par puissance. Quand on ne voit pas un objet prĂ©sent, tout en voyant d’autres objets Ă©galement prĂ©sents, comme il arriva aux disciples qui ne virent pas alors l’éclat du visage de JĂ©sus-Christ, quoique prĂ©sent, et qui pourtant voyaient d’autres choses, les Grecs appellent cet Ă©tat aorasia mot que les Latins ont traduit dans la GenĂšse par caecitas, faute d’un autre Ă©quivalent. C’est l’aveuglement dont les Sodomites furent frappĂ©s, lorsqu’ils cherchaient la porte de Loth sans pouvoir la trouver. En effet, si c’eĂ»t Ă©tĂ© chez eux une vĂ©ritable cĂ©citĂ©, comme celle qui empĂȘche de rien voir, ils n’auraient point cherchĂ© la porte pour entrer, mais des guides pour les ramener , Or, je ne sais comment, l’affection que nous avons pour les bienheureux martyrs nous fait dĂ©sirer de voir dans le ciel les cicatrices des plaies qu’ils ont reçues pour le nom de JĂ©sus-Christ, et peut-ĂȘtre les verrons-nous. Ce ne sera pas une difformitĂ© dans leur corps, mais une marque d’honneur, qui donnera de l’éclat, non point Ă  leur corps, mais Ă  icuz gloire. Il ne faut pas croire toutefois que les membres qu’on leur aura coupĂ©s leur manqueront Ă  la rĂ©surrection, eux Ă  qui il a Ă©tĂ© dit Pas un cheveu de votre tĂȘte ne pĂ©rira ». Mais, s’il est Ă  propos qu’on voie, dans le siĂšcle nouveau, ces marques glorieuses de leur martyre gravĂ©es jusque dans leur chair immortelle, on doit penser que les endroits oĂč ils auront Ă©tĂ© blessĂ©s ou mutilĂ©s conserveront seulement une cicatrice, en sorte qu’ils ne laisseront pas de recouvrer les membres qu’ils avaient perdus. La foi nous assure, il est vrai, que dans l’autre vie aucun des dĂ©fauts de notre corps ne paraĂźtra plus; mais ces marques de vertu ne peuvent ĂȘtre considĂ©rĂ©es comme des dĂ©fauts . CHAPITRE XX. AU JOUR DE LA RÉSURRECTION, LA SUBSTANCE DE NOTRE CORPS, DE QUELQUE MANIÈRE QU’ELLE AIT ÉTÉ DISSIPÉE, SERA RÉUNIE INTÉGRALEMENT. Loin de nous la crainte que la toute-puissance du CrĂ©ateur ne puisse rappeler, pour ressusciter les corps, toutes les parties qui ont Ă©tĂ© dĂ©vorĂ©es par les bĂȘtes, ou consumĂ©es par le feu, ou changĂ©es en poussiĂšre, ou dissipĂ©es dans l’air ! Loin de nous la pensĂ©e que rien soit tellement cachĂ© dans le sein de la nature, qu’il puisse se dĂ©rober Ă  la connaissance ou au pouvoir du CrĂ©ateur ! CicĂ©ron, dont l’autoritĂ© est si grande pour nos adversaires, voulant dĂ©finir Dieu autant qu’il en est capable C’est, dit-il, un esprit libre et indĂ©pendant, dĂ©gagĂ© de toute composition mortelle, qui connaĂźt et meut toutes choses, et qui a lui-mĂȘme un mouvement Ă©ternel », CicĂ©ron s’inspire ici des plus grands philosophes . HĂ© bien ! pour parler selon leur sentiment, peut-il y avoir une chose qui reste inconnue Ă  celui qui connaĂźt tout, ou qui se dĂ©robe pour jamais Ă  celui qui meut tout? Ceci me conduit Ăą rĂ©pondre Ă  cette question qui paraĂźt plus difficile que toutes les autres Ă  qui, lors de la rĂ©surrection, appartiendra la chair d’un homme mort, devenue celle d’un homme vivant? Supposez, en effet, qu’un malheureux, pressĂ© par la faim, mange de la chair d’un homme mort, et c’est lĂ  une extrĂ©mitĂ© que nous rencontrons quelquefois dans l’histoire et dont nos misĂ©rables temps fournissent aussi plus d’un exemple, peut-on soutenir avec quelque raison que toute cette substance ait disparu par les sĂ©crĂ©tions et qu’il ne s’en soit assimilĂ© aucune partie Ă  la chair de celui qui s’en est nourri, alors que l’embonpoint qu’il a recouvrĂ© montre assez quelles ruines il a rĂ©parĂ©es par ce triste secours? Mais j’ai dĂ©jĂ  indiquĂ© plus haut le moyen de rĂ©soudre cette difficultĂ©; car toutes les chairs que la faim a consommĂ©es se sont Ă©vaporĂ©es dans l’air, et nous avons reconnu que la toute-puissance de Dieu en peut rappeler tout ce qui s’y est Ă©vanoui. Cette chair mangĂ©e sera donc rendue Ă  celui en qui elle a d’abord commencĂ© d’ĂȘtre une chair humaine, puisque l’autre ne l’a que d’emprunt, et c’est comme un argent prĂȘtĂ© qu’il doit rendre. La sienne, que la faim avait amaigrie, lui sera rendue par celui qui peut rappeler Ă  son grĂ© tout ce qui a disparu; et alors mĂȘme qu’elle serait tout Ă  fait anĂ©antie et qu’il n’en serait rien restĂ© dans les plus secrets replis de la nature, le Dieu tout-puissant saurait bien y supplĂ©er par quelque moyen. La VĂ©ritĂ© ayant dĂ©clarĂ© que pas un cheveu de votre tĂȘte ne pĂ©rira u, il serait absurde de penser qu’un cheveu ne puisse se perdre, et que tant de chairs dĂ©vorĂ©es ou consumĂ©es par la faim pussent pĂ©rir. De toutes ces questions que nous avons traitĂ©es et examinĂ©es selon notre faible pouvoir, il rĂ©sulte que les corps auront, Ă  la rĂ©. surrection, la mĂȘme taille qu’ils avaient dans leur jeunesse, avec la beautĂ© et la proportion de tous leurs membres. Il est assez vraisemblable que, pour garder cette proportion, Dieu distribuera dans toute la masse du corps ce qui, placĂ© en un seul endroit, serait disgracieux, et qu’ainsi il pourra mĂȘme ajouter quelque chose Ă  notre stature. Que si l’on prĂ©tend que chacun ressuscitera dans la mĂȘme stature qu’il avait Ă  la mort, Ă  la bonne heure, pourvu qu’on bannisse toute difformitĂ©, toute faiblesse, toute pesanteur, toute corruption, et enfin tout autre dĂ©faut contraire Ă  la beautĂ© de ce royaume, oĂč les enfants de la rĂ©surrection et de la promesse seront Ă©gaux aux anges de Dieu, sinon pour le corps et pour l’ñge, au moins pour la fĂ©licitĂ©. CHAPITRE XXI. DU CORPS SPIRITUEL EN QUI SERA RENOUVELÉE ET TRANSFORMÉE LA CHAIR DES BIENHEUREUX. Tout ce qui s’est perdu des corps vivants ou des cadavres aprĂšs la mort sera dĂšs lors rĂ©tabli avec ce qui est demeurĂ© dans les tombeaux, et ressuscitera en un corps nouveau et spirituel, revĂȘtu d’incorruptibilitĂ© et d’immortalitĂ©. Mais alors mĂȘme que , par quelque fĂącheux accident ou par la cruautĂ© de mains ennemies, un corps humain serait entiĂšrement rĂ©duit en poudre, et que, dissipĂ© en air et en eau, il ne se trouverait pour ainsi dire nulle part, il ne pourra nĂ©anmoins ĂȘtre soustrait Ă  la toute-puissance du CrĂ©ateur, et pas un cheveu de sa tĂȘte ne pĂ©rira. La chair devenue spirituelle sera donc soumise Ă  l’esprit; mais ce sera une chair nĂ©anmoins, et non un esprit, tout comme quand l’esprit devenu charnel a Ă©tĂ© soumis Ă  la chair, il reste un esprit, et non pas une chair. Nous avons donc de cela ici-bas une expĂ©rience qui est un effet de la peine du pĂ©chĂ©. En effet, ceux-lĂ  n’étaient pas charnels selon la chair, mais selon l’esprit, Ă  qui l’ApĂŽtre disait Je n’ai pu vous parler comme Ă  des hommes spirituels, mais comme Ă  des personnes qui sont encore charnelles ». Et l’homme spirituel, en cette mortelle vie, ne laisse pas d’ĂȘtre encore charnel selon le corps, et de voir en ses membres une loi qui rĂ©siste Ă  la loi de son esprit. Mais il sera spirituel, mĂȘme selon le corps, lorsque la chair sera ressuscitĂ©e et que cette parole de saint Paul se trouvera accomplie Le corps est semĂ© animal, et il ressuscitera spirituel », Or, quelles seront les perfections de ce corps spirituel ? Comme nous n’en avons pas encore l’expĂ©rience, j’aurais peur qu’il n’y eĂ»t de la tĂ©mĂ©ritĂ© Ă  en parler. Toutefois, puisqu’il y va de la gloire de Dieu de ne pas cacher la joie qu’allume en nous l’espĂ©rance, et que le Psalmiste, dans les plus violents transports d’un saint et ardent amour, s’écrie Seigneur, j’ai aimĂ© la beautĂ© de votre maison ! » tĂąchons, avec son aide, de conjecturer, par les grĂąces qu’il fait aux bons et aux mĂ©chants en cette vie de misĂšre, combien doit ĂȘtre grande celle dont nous ne pouvons parler dignement, faute de l’avoir Ă©prouvĂ©e. Je laisse Ă  part ce temps oĂč Dieu crĂ©a l’homme droit; je laisse Ă  part la vie bienheureuse de ce couple fortunĂ© dans les dĂ©lices du paradis terrestre, puisqu’elle fut si courte que leurs enfants n’eurent pas le bonheur de la goĂ»ter. Je ne parle que de cette condition misĂ©rable que nous connaissons, en laquelle nous sommes, qui est exposĂ©e Ă  une infinitĂ© de tentations, ou, pour mieux dire, qui n’est qu’une tentation continuelle, quelques progrĂšs que nous fassions dans la vertu. HĂ© bien ! qui pourrait compter encore tous les tĂ©moignages que Dieu y donne aux hommes de sa bontĂ©? CHAPITRE XXII. DES MISÈRES ET DES MAUX DE CETTE VIE, QUI SONT DES PEINES DU PÉCHÉ DU PREMIER HOMME, ET DONT ON NE PEUT ÊTRE DÉLIVRÉ QUE PAR LA GRÂCE DE JÉSUS-CHRIST. Que toute la race des hommes ait Ă©tĂ© condamnĂ©e dans sa premiĂšre origine, cette vie mĂȘme, s’il faut l’appeler une vie, le tĂ©moigne assez par les maux innombrables et cruels dont elle est remplie. En effet, que veut dire cette profonde ignorance oĂč naissent les enfants d’Adam, principe de toutes leurs erreurs, et dont ils ne peuvent s’affranchir sans le travail, la douleur et la crainte? Que signifient tant d’affections vaines et nuisibles d’oĂč naissent les cuisants soucis, les inquiĂ©tudes, les tristesses , les craintes, les fausses joies , les querelles, les procĂšs, les guerres, les trahisons, les colĂšres, les inimitiĂ©s, les tromperies, la fraude, la flatterie, les larcins, les rapines, la perfidie, l’orgueil, l’ambition, l’envie, les homicides, les parricides, la cruautĂ©, l’inhumanitĂ©, la mĂ©chancetĂ©, la dĂ©bauche, l’insolence, l’impudence, l’impudicitĂ©, les fornications, les adultĂšres, les incestes, les pĂ©chĂ©s contre nature de l’un et de l’autre sexe, et tant d’autres impuretĂ©s qu’on n’oserait seulement nommer sacrilĂ©ges, hĂ©rĂ©sies, blasphĂšmes, parjures, oppression des innocents, calomnies, surprises, prĂ©varications, faux tĂ©moignages, jugements injustes , violences brigandages, et autres malheurs semblable que ne saurait embrasser la pensĂ©e, mais qu remplissent et assiĂ©gent la vie ? Il est vrai que ces crimes sont l’oeuvre des mĂ©chants ; mais ils ne laissent pas de venir tous de cette ignorance et de cet amour dĂ©rĂ©glĂ©, comme d’une racine que tous les enfants d’Adam portent en eux en naissant. Qui en effet, ignore dans quelle ignorance manifeste chez les enfants, et dans combien de passions qui se dĂ©veloppent au sortir mĂȘme de l’enfance, l’homme vient au monde ! Certes, si on le laissait vivre Ă  sa guise et faire ce qui lui plairait, il n’est pas un des crimes que j’ai nommĂ©s, sans parler de ceux que je n’ai pu nommer, oĂč on ne le vĂźt se prĂ©cipiter. Mais, par un conseil de la divine Providence, qui n’abandonne pas tout Ă  fait ceux qu’elle a condamnĂ©s, et qui, malgrĂ© sa colĂšre, n’arrĂȘte point le cours de ses misĂ©ricordes , la loi et l’instruction veillent contre ces tĂ©nĂšbres et ces convoitises dans lesquelles nous naissons. Bienfait inestimable, mais qui ne s’opĂšre point sans peines et sans douleurs. Pourquoi, je vous le demande, toutes ces menaces que l’on fait aux enfants, pour les retenir dans le devoir? pourquoi ces maĂźtres, ces gouverneurs, ces fĂ©rules, ces fouets, ces verges dont l’Ecriture dit qu’il faut souvent se servir envers un enfant qu’on aime, de peur qu’il ne devienne incorrigible et indomptable ? pourquoi toutes ces peines, sinon pour vaincre l’ignorance et rĂ©primer la convoitise, deux maux qui avec nous entrent dans le monde ? D’oĂč vient que nous avons de la peine Ă  nous souvenir d’une chose, et que nous l’oublions sans peine ; qu’il faut beaucoup de travail pour apprendre, et point du tout pour ne rien savoir ; qu’il en coĂ»te tant d’ĂȘtre diligent, et si peu d’ĂȘtre paresseux? Cela ne dĂ©note-t-il pas clairement Ă  quoi la nature corrompue se porte par le poids de ses inclinations, et de quel secours elle a besoin pour s’en relever? La paresse, la nĂ©gligence, la lĂąchetĂ©, la fainĂ©antise, sont des vices qui fuient le travail, tandis que le travail mĂȘme, tout bienfaisant qu’il puisse ĂȘtre, est une peine. Mais outre les peines de l’enfance, sans lesquelles rien ne peut s’apprendre de ce que veulent les parents, qui veulent rarement quelque chose d’utile, oĂč est la parole capable d’exprimer, oĂč est la pensĂ©e capable de comprendre toutes celles oĂč les hommes sont sujets et qui sont insĂ©parables de leur triste condition ? Quelle apprĂ©hension et quelle douleur ne nous causent pas, et la mort des personnes qui nous sont chĂšres, et la perte des biens, et les condamnations, et les supercheries des hommes, et les faux soupçons, et toutes les violences que l’on peut avoir Ă  souffrir, comme les brigandages, les captivitĂ©s, les fers, la prison, l’exil, les tortures, les mutilations, les infamies et les brutalitĂ©s, et mille autres souffrances horribles qui nous accablent incessamment? A ces maux ajoutez une multitude d’accidents auxquels les hommes ne contribuent pas le chaud, le froid, les orages, les inondations, les foudres, la grĂȘle, les tremblements de terre, les chutes de maison, les venins des herbes, des eaux, de l’air ou des animaux, les morsures des bĂȘtes, ou mortelles ou incommodes., la rage d’un chien, cet animal naturellement ami de l’homme, devenu alors plus Ă  craindre que les lions et les dragons, et qui rend un homme qu’il a mordu plus redoutable aux siens que les bĂȘtes les plus farouches. Que ne souffrent point ceux qui voyagent sur mer et sur terre? Qui peut se dĂ©placer sans s’exposer Ă  quelque accident imprĂ©vu ? Un homme qui se portait fort bien, revenant chez lui, tombe, se rompt la jambe et meurt . Le moyen d’ĂȘtre, en apparence, plus en sĂ»retĂ© qu’un homme assis dans sa chaise ! HĂ©li tombe de la sienne et se tue . Quels accidents les laboureurs, ou plutĂŽt tous les hommes, ne craignent-ils pas pour les biens de la campagne, tarit du cĂŽtĂ© du ciel et de la terre que du cĂŽtĂ© des animaux? Ils ne sont assurĂ©s de la moisson que quand elle est dans la grange, et toutefois nous en savons qui l’ont perdue, mĂȘme quand elle y Ă©tait, par des tempĂȘtes et des inondations. Qui se peut assurer sur son innocence d’ĂȘtre Ă  couvert des insultes des dĂ©mons, puisqu’on les voit quelquefois tourmenter d’une façon si cruelle les enfants nouvellement baptisĂ©s, que Dieu, qui le permet ainsi, nous apprend bien par lĂ  Ă  dĂ©plorer la misĂšre de cette vie et Ă  dĂ©sirer la fĂ©licitĂ© de l’autre? Que dirai-je des maladies, qui sont en si grand nombre que mĂȘme les livres des mĂ©decins ne les contiennent pas toutes? la plupart des remĂšdes qu’on emploie pour les guĂ©rir sont autant d’instruments de torture, si bien qu’un homme ne peut se dĂ©livrer d’une douleur que par une autre. La soif n’ai-elle pas contraint quelques malheureux Ă  boire de l’urine? la faim n’a-t-elle pas portĂ© des hommes, non-seulement Ă  se nourrir de cadavres humains qu’ils avaient rencontrĂ©s, mais Ă  tuer leurs semblables pour les dĂ©vorer? N’a-t-on pas vu des mĂšres, poussĂ©es par une faim exĂ©crable, plonger le couteau dans le sein de leurs enfants? Le sommeil mĂȘme, qu’on appelle proprement repos , combien est-il souvent inquiet, accompagnĂ© de songes terribles et affreux, qui effraient l’ñme et dont les images sont si vives qu’on ne les saurait distinguer des rĂ©alitĂ©s de la veille? En certaines maladies, ces visions fantastiques tourmentent mĂȘme ceux qui veillent , sans parler des illusions dont les dĂ©mons abusent les hommes en bonne santĂ©, afin de troubler du moins les sens de leurs victimes, s’ils ne peuvent rĂ©ussir Ă  les attirer Ă  leur parti. Il n’y a que la grĂące du Sauveur JĂ©sus-Christ, notre Seigneur et notre Dieu, qui nous puisse dĂ©livrer de l’enfer de cette misĂ©rable vie. C’est ce que son nom mĂȘme signifie car JĂ©sus veut dire Sauveur. Et nous lui devons demander surtout qu’aprĂšs la vie actuelle, il nous dĂ©livre d’une autre encore plus misĂ©rable, qui n’est pas tant une vie qu’une mort. Ici-bas, bien que nous trouvions de grands soulagements Ă  nos maux dans les choses saintes et dans l’intercession des saints, ceux qui demandent ces grĂąces ne les obtiennent pas toujours; et la Providence le veut ainsi, de peur qu’un motif temporel ne nous porte Ă  suivre une religion qu’il faut plutĂŽt embrasser en vue de l’autre vie, oĂč il aura plus de mal. C’est pour cela que la grĂące aide les bons au milieu des maux, afin qu’ils les supportent d’autant plus constamment qu’ils ont plus de foi. Les doctes du siĂšcle prĂ©tendent que la philosophie y fait aussi quelque chose , cette philosophie que les dieux, selon CicĂ©ron, ont accordĂ©e dans sa puretĂ© Ă  un petit nombre d’hommes . Ils n’ont jamais fait, dit-il, et ne peuvent faire un plus grand prĂ©sent aux hommes . » Cela prouve que ceux mĂȘmes que nous combattons ont Ă©tĂ© obligĂ©s de reconnaĂźtre en quelque façon que la grĂące de Dieu est nĂ©cessaire pour acquĂ©rir la vĂ©ritable philosophie. Et si la vĂ©ritable philosophie, qui est l’unique secours contre les misĂšres de la condition mortelle, a Ă©tĂ© donnĂ©e Ă  un si petit nombre d’hommes, voilĂ  encore une preuve que ces misĂšres sont des peines auxquelles les hommes ont Ă©tĂ© condamnĂ©s. Or, comme nos philosophes tombent d’accord que le ciel ne nous a pas fait de don plus prĂ©cieux, il faut croire aussi qu’il n’a pu venir que du vrai Dieu, de ce Dieu qui est reconnu comme le plus grand de tous par ceux-lĂ  mĂȘmes qui en adorent plusieurs. CHAPITRE XXIII. DES MISÈRES DE CETTE VIE QUI SONT PROPRES AUX BONS INDÉPENDAMMENT DE CELLES QUI LEUR SONT COMMUNES AVEC LES MÉCHANTS. Outre les maux de cette vie qui sont communs aux bons et aux mĂ©chants, les bons ont des traverses particuliĂšres Ă  essuyer dans la guerre continuelle qu’ils font Ă  leurs passions. Les rĂ©voltes de la chair contre l’esprit sont tantĂŽt plus fortes, tantĂŽt moindres, mais elles ne cessent jamais; de sorte que, ne faisant jamais ce que nous voudrions , il ne nous reste qu’à lutter contre toute concupiscence mauvaise, autant que Dieu nous en donne le pouvoir, et Ă  veiller continuellement sur nous-mĂȘmes, de crainte qu’une fausse apparence ne nous trompe, qu’un discours artificieux ne nous surprenne, que quelque erreur ne s’empare de notre esprit, que nous ne prenions un bien pour un mal, ou un mal pour un bien, que la crainte ne nous dĂ©tourne de faire ce qu’il faut, que la passion ne nous porte Ă  faire ce qu’il ne faut pas, que le soleil ne se couche sur notre colĂšre , que la peine ne nous entraĂźne Ă  rendre le mal pour le mal, qu’une tristesse excessive ou dĂ©raisonnable ne nous accable, que nous ne soyons ingrats pour un bienfait reçu, que les mĂ©disances ne nous troublent, que nous ne portions des jugements tĂ©mĂ©raires, que nous ne soyons accablĂ©s de ceux que l’on porte contre nous, que le pĂ©chĂ© ne rĂšgne en notre corps mortel en secondant nos dĂ©sirs, que nous ne fassions de nos membres des instruments d’iniquitĂ© pour le pĂ©chĂ© , que notre oeil ne suive ses appĂ©tits dĂ©rĂ©glĂ©s, qu’un dĂ©sir de vengeance ne nous entraĂźne, que nous n’arrĂȘtions nos regards ni nos pensĂ©es sur des objets illĂ©gitimes, que nous ne prenions du plaisir Ă  entendre quelque parole outrageuse ou dĂ©shonnĂȘte, que nous ne fassions ce qui n’est pas permis, quoique nous en soyons tentĂ©s, que, dans cette guerre pĂ©nible et pleine de dangers, nous ne nous promettions la victoire par nos propres forces, ou que nous cĂ©dions Ă  l’orgueil de nous l’attribuer au lieu d’en faire honneur Ă  celui dont l’ApĂŽtre dit GrĂąces soient rendues Ă  Dieu, qui nous donne la victoire par Notre-Seigneur JĂ©sus-Christ »; et ailleurs Nous demeurons victorieux au milieu de tous ces maux par la grĂące de celui qui nous a aimĂ©s ». Sachons pourtant que, quelque rĂ©sistance que nous opposions aux vices et quelque avantage que nous remportions sur eux, tant que nous sommes dans ce corps mortel, nous ne pouvons manquer de dire Ă  Dieu Remettez-nous nos dettes »Mais dans ce royaume oĂč nous demeurerons Ă©ternellement, revĂȘtus de corps immortels, nous n’aurons plus de guerre ni de dettes, comme nous n’en aurions jamais eu, si notre nature Ă©tait demeurĂ©e dans sa premiĂšre puretĂ© . Ainsi cette guerre mĂȘme, oĂč nous sommes si exposĂ©s et dont nous dĂ©sirons ĂȘtre dĂ©livrĂ©s par une derniĂšre victoire, fait partie des maux de cette vie, qui, ainsi que nous venons de l’établir par le dĂ©nombrement de tant de misĂšres, a Ă©tĂ© condamnĂ©e par un arrĂȘt divin. CHAPITRE XXIV. DES BIENS DONT LE CRÉATEUR A REMPLI CETTE VIE, TOUTE EXPOSÉE QU’ELLE SOIT A LA DAMNATION. Cependant, il faut louer la justice de Dieu dans ces misĂšres mĂȘmes qui affligent le genre humain; car de quelle multitude de biens sa bontĂ© n’a-t-elle pas aussi rempli cette vie ! D’abord, il n’a pas voulu arrĂȘter, mĂȘme aprĂšs le pĂ©chĂ©, l’effet de cette bĂ©nĂ©diction qu’il a rĂ©pandue sur les hommes, en leur disant Croissez et multipliez et remplissez la terre», La fĂ©conditĂ© est demeurĂ©e dans une race justement condamnĂ©e; et bien que le pĂ©chĂ© nous ait imposĂ© la nĂ©cessitĂ© de mourir, il n’a pas pu nous ĂŽter cette vertu admirable des semences, ou plutĂŽt cette vertu encore plus admirable qui les produit, et qui est profondĂ©ment enracinĂ©e et comme entĂ©e dans la substance du corps. Mais dans ce fleuve ou ce torrent qui emporte les gĂ©nĂ©rations humaines, le mal et le bien se mĂȘlent toujours le mal que nous devons Ă  notre premier pĂšre, le bien que nous devons Ă  la bontĂ© du CrĂ©ateur. Dans le mal originel, il y a deux choses le pĂ©chĂ© et le supplice; et il y en a deux autres dans le bien originel la propagation et la conformation. J’ai dĂ©jĂ  parlĂ© suffisamment de ce double mal, je veux dire du pĂ©chĂ©, qui vient de notre audace, et du supplice, qui est l’effet du jugement de Dieu, J’ai dessein maintenant de parler des biens que Dieu a communiquĂ©s ou communique encore Ă  notre nature, toute corrompue et condamnĂ©e qu’elle est. En la condamnant, il ne lui a pas ĂŽtĂ© tout ce qu’il lui avait donnĂ© autrement, elle ne serait plus du tout; et, en l’assujĂ©tissant au dĂ©mon pour la punir, il ne s’est pas privĂ© du pouvoir qu’il avait sur elle, puisqu’il a toujours conservĂ© son empire sur le dĂ©mon lui. mĂȘme, qui d’ailleurs ne subsisterait pas un instant sans celui qui est l’ĂȘtre souverain et le principe de tous les ĂȘtres. De ces deux biens qui se rĂ©pandent du sein de sa bontĂ©, comme d’une source fĂ©conde, sur la nature humaine, mĂȘme corrompue et condamnĂ©e, le premier, la propagation, fut le premier don que Dieu accorda Ă  l’homme en le bĂ©nissant, lorsqu’il fit les premiers ouvrages du monde, dont il se reposa le septiĂšme jour. Pour la conformation, il la lui donne sans cesse par son action continuellement crĂ©atrice . S’il venait Ă  retirer Ă  soi sa puissance efficace, ses crĂ©atures ne pourraient aller au delĂ , ni accomplir la durĂ©e assignĂ©e Ă  leurs mouvements mesurĂ©s, ni mĂȘme conserver l’ĂȘtre qu’elles ont reçu. Dieu a donc créé l’homme de telle façon qu’il lui a donnĂ© le pouvoir de se reproduire, sans nĂ©anmoins l’y obliger; et s’il a ĂŽtĂ© ce pouvoir Ă  quelques-uns, en les rendant stĂ©riles, il ne l’a pas ĂŽtĂ© au genre humain. Toutefois, bien que cette facultĂ© soit restĂ©e Ă  l’homme, malgrĂ© son pĂ©chĂ©, elle n’est pas telle qu’elle aurait Ă©tĂ©, s’il n’avait jamais pĂ©chĂ©. Car depuis que l’homme est dĂ©chu par sa dĂ©sobĂ©issance de cet Ă©tat de gloire oĂč il avait Ă©tĂ© créé, il est devenu semblable aux bĂȘtes et engendre comme elles, gardant toujours en lui cependant cette Ă©tincelle de raison qui fait qu’il est encore créé Ă  l’image de Dieu. Mais si la conformation ne se joignait pas Ă  la propagation, celle-ci demeurerait oisive et ne pourrait accomplir son ouvrage. Dieu en effet avait-il besoin pour peupler la terre que l’homme et la femme eussent commerce ensemble? il lui suffisait de crĂ©er plusieurs hommes comme il avait créé le premier. Et maintenant mĂȘme, le mĂąle et la femelle pourraient s’accoupler, et n’engendreraient rien, sans l’action crĂ©atrice de Dieu. De mĂȘme que l’ApĂŽtre a dit de l’institution spirituelle qui forme l’homme Ă  la piĂ©tĂ© et Ă  la justice Ce n’est ni celui qui plante, ni celui qui arrose, qui est quelque chose, mais Dieu, qui donne l’accroissement »; ainsi l’on peut dire que ce n’est point l’homme, dans l’union conjugale, qui est quelque chose, mais Dieu qui donne l’ĂȘtre; que ce n’est point la mĂšre, bien qu’elle porte son fruit - dans son sein et le nourrisse, qui est quelque chose, mais Dieu qui donne l’accroissement. Lui seul, par l’action qu’il exerce maintenant encore, fait que les semences se dĂ©veloppent, et sortent de ces plis secrets et invisibles qui les tenaient cachĂ©es, pour exposer Ă  nos yeux les beautĂ©s visibles que nous admirons. Lui seul, liant ensemble par des noeuds admirables la nature spirituelle et la nature corporelle, l’une pour commander, l’autre pour obĂ©ir, compose l’ĂȘtre animĂ©, ouvrage si grand et si merveilleux, que non-seulement l’homme, qui est un animal raisonnable, et par consĂ©quent plus noble et plus excellent que tous les animaux de la terre, mais la moindre petite mouche ne peut ĂȘtre attentivement considĂ©rĂ©e sans Ă©tonner l’intelligence et faire louer le CrĂ©ateur. C’est donc lui qui a donnĂ© Ă  l’ñme humaine cet entendement oĂč la raison et l’intelligence sont comme assoupies dans les enfants, pour se rĂ©veiller et s’exercer avec l’ñge, afin qu’ils soient capables de connaĂźtre la vĂ©ritĂ© et d’aimer le bien, et qu’ils acquiĂšrent ces vertus de prudence, de force, de tempĂ©rance et de justice nĂ©cessaires pour combattre les erreurs et les autres vices, et pour les vaincre par le seul dĂ©sir du Bien immuable et souverain. Que si cette capacitĂ© n’a pas toujours son effet dans la crĂ©ature raisonnable, qui peut nĂ©anmoins exprimer ou seulement concevoir la grandeur du bien renfermĂ© dans ce merveilleux ouvrage du Tout-Puissant? Outre l’art de bien vivre et d’arriver Ă  la fĂ©licitĂ© immortelle, art sublime qui s’appelle la vertu, et que la seule grĂące de Dieu en JĂ©sus-Christ donne aux enfants de la promesse et du royaume, l’esprit humain n’a-t-il pas inventĂ© une infinitĂ© d’arts qui font bien voir qu’un entendement si actif, si fort et si Ă©tendu, mĂȘme cules choses superflues ou nuisibles, doit avoir un grand fonds de bien dans sa nature, pour avoir pu y trouver tout cela? Jusqu’oĂč n’est pas allĂ©e l’industrie des hommes dans l’art de former des tissus, d’élever des bĂątiments, dans l’agriculture et la navigation? Que d’imagination -et de perfection dans ces vases de toutes formes, dans cette multitude de tableaux et de statues! Quelles merveilles ne se font pas sur la scĂšne, qui semblent incroyables Ă  qui n’en a pas Ă©tĂ© tĂ©moin! Que de ressources et de ruses pour prendre, tuer ou dompter les bĂȘtes farouches! Combien de sortes de poisons, d’armes, de machines, les hommes n’ont-ils pas inventĂ©es contre les hommes mĂȘmes! combien de secours et de remĂšdes pour conserver la santĂ©! combien d’assaisonnements et de mets pour le plaisir de la bouche et pour rĂ©veiller l’appĂ©tit! Quelle diversitĂ© de signes pour exprimer et faire agrĂ©er ses pensĂ©es, et au premier rang, la parole et l’écriture ! quelle richesse d’ornements dans l’éloquence et la poĂ©sie pour rĂ©jouir l’esprit et pour charmer l’oreille, sans parler de tant d’instruments de musique, de tant d’airs et de chants ! Quelle connaissance admirable des mesures et des nombres ! quelle sagacitĂ© d’esprit dans la dĂ©couverte des harmonies et des rĂ©volutions des globes cĂ©lestes ! Enfin, qui pourrait dire toutes les connaissances dont l’esprit humain s’est enrichi touchant les choses naturelles, surtout si on voulait insister sur chacune en particulier, au lieu de les rapporter en gĂ©nĂ©ral ? Pour dĂ©fendre mĂȘme des erreurs et des faussetĂ©s, combien les philosophes et les hĂ©rĂ©tiques n’ont-ils pas fait paraĂźtre d’esprit? car nous ne parlons maintenant que de la nature de l’entendement qui sert d’ornement Ă  cette vie mortelle, et non de la foi et de la vĂ©ritĂ© par lesquelles on acquiert la vie immortelle. Certes une nature excellente, ayant pour auteur un Dieu Ă©galement juste et puissant, qui gouverne lui-mĂȘme tous ses ouvrages, ne serait jamais tombĂ©e dans ces misĂšres, et de ces misĂšres n’irait point les seuls justes exceptĂ©s dans tous les tourments Ă©ternels, si elle n’avait Ă©tĂ© corrompue originairement dans le premier homme, d’oĂč sont sortis tous les autres, par quelque grand et Ă©norme pĂ©chĂ©. Si nous considĂ©rons notre corps mĂȘme, bien qu’il meure comme celui des bĂȘtes, qui l’ont souvent plus robuste que nous, quelle bontĂ© et quelle providence de Dieu y Ă©clatent de toutes parts? Les organes des sens et les autres membres n’y sont-ils pas tellement dis-pesĂ©s, sa forme et sa stature si bien ordonnĂ©es, qu’il paraĂźt clairement avoir Ă©tĂ© fait pour le service et le ministĂšre d’une Ăąme raisonnable? L’homme n’a pas Ă©tĂ© créé courbĂ© vers la terre, comme les animaux sans raison; mais sa stature droite et Ă©levĂ©e l’avertit de porter ses pensĂ©es et ses dĂ©sirs vers le ciel . D’ailleurs cette merveilleuse vitesse donnĂ©e Ă  la langue et Ă  la main pour parler et pour Ă©crire, et pour exĂ©cuter tant de choses, ne montre-t-elle pas combien est excellente l’ñme qui a reçu un corps si bien fait pour serviteur ? que dis-je ? et quand bien mĂȘme le corps n’aurait pas besoin d’agir, les proportions en sont observĂ©es avec tant d’art et de justesse, qu’il serait difficile de dĂ©cider si, dans sa structure, Dieu a eu plus d’égard Ă  l’utilitĂ© qu’à la beautĂ©. Au moins n’y voyons-nous rien d’utile qui ne soit beau tout Ă  la fois ce qui nous serait plus, Ă©vident encore, si nous connaissions les rapports et les proportions que toutes les parties ont entre elles, et dont nous pouvons dĂ©couvrir quelque chose par ce que nous voyons au dehors. Quant Ă  ce qui est cachĂ©, comme l’enlacement des veines, des nerfs, des muscles, des fibres, personne ne le saurait connaĂźtre. En effet, bien que les anatomistes aient dissĂ©quĂ© des cadavres, et quelquefois mĂȘme se soient cruellement exercĂ©s sur des hommes vivants pour fouiller dans les parties les plus secrĂštes du corps humain, et apprendre ainsi Ă  les guĂ©rir, toutefois, comment aucun d’entre eux aurait-il trouvĂ© cette proportion admirable dont nous parlons, et que les Grecs appellent harmonie, puisqu’ils ne l’ont pas seulement osĂ© chercher? Si nous pouvions la connaĂźtre dans les entrailles, qui n’ont aucune beautĂ© apparente, nous y trouverions quelque chose de plus beau et qui satisferait plus notre esprit que tout ce qui flatte le plus agrĂ©ablement nos yeux dans la figure extĂ©rieure du corps. Or, il y a certaines parties dans le corps qui ne sont que pour l’ornement et non pas pour l’usage, comme les mamelles de l’homme, et la barbe, qui n’est pas destinĂ©e Ă  le dĂ©fendre, puisque autrement les femmes, qui sont plus faibles, devraient en avoir. Si donc il n’y a aucun membre, de tous ceux qui paraissent, qui n’orne le corps autant qu’il le sert, et s’il y en a mĂȘme qui ne sont que pour l’ornement et je pense que l’on comprend aisĂ©ment que, dans la structure du corps, Dieu a eu plus d’égard Ă  la beautĂ© qu’à la nĂ©cessitĂ©. En effet, le temps de la nĂ©cessitĂ© passera, et il en viendra un autre, oĂč nous ne jouirons que de la beautĂ© de nos semblables, sans aucune concupiscence digne sujet de louanges envers le CrĂ©ateur, Ă  qui il est dit dans le psaume Vous vous ĂȘtes revĂȘtu de gloire et de splendeur !» Que dire de tant d’autres choses Ă©galement belles et utiles qui remplissent l’univers et dont la bontĂ© de Dieu a donnĂ© l’usage et le spectacle Ă  l’homme, tout condamnĂ© qu’il soit Ă  tant de peines et Ă  tant de misĂšres? Parlerai-je de ce vif Ă©clat de la lumiĂšre, de la magnificence du soleil, de la lune et des Ă©toiles, de ces sombres beautĂ©s des forĂȘts, des couleurs et des parfums des fleurs, de cette multitude d’oiseaux si diffĂ©rents de chant et de plumage, de cette diversitĂ© infinie d’animaux dont les plus petits sont les plus admirables ? car les ouvrages d’une fourmi et d’une abeille nous Ă©tonnent plus que le corps gigantesque d’une baleine. Parlerai-je de la mer, qui fournit toute seule un si grand spectacle Ă  nos yeux, et des diverses couleurs dont elle se couvre comme d’autant d’habits diffĂ©rents, tantĂŽt verte, tantĂŽt bleue, tantĂŽt pourprĂ©e ? Combien mĂȘme y a-t-il de plaisir Ă  la voir en courroux, pourvu que l’on se sente Ă  l’abri de ses flots? Que dire de cette multitude de mets diffĂ©rents qu’on a trouvĂ©s pour apaiser la faim, de ces divers assaisonnements que nous offre la libĂ©ralitĂ© de la nature contre le dĂ©goĂ»t, sans recourir Ă  l’art des cuisiniers, de cette infinitĂ© de remĂšdes qui servent Ă  conserver ou Ă  rĂ©tablir la santĂ©, de cette agrĂ©able vicissitude des jours et des nuits, de ces doux zĂ©phyrs qui tempĂšrent les chaleurs de l’étĂ©, et de mille sortes de vĂȘtements que nous fournissent les arbres et les animaux ? Qui peut tout dĂ©crire? et si je voulais mĂȘme Ă©tendre çe peu que je me borne Ă  indiquer, combien de temps ne me faudrait-il pas? car il n’y a pas une de ces merveilles qui n’en comprenne plusieurs. Et ce ne sont lĂ  pourtant que les consolations de misĂ©rables condamnĂ©s et non les rĂ©compenses des bienheureux; quelles seront donc ces rĂ©compenses? qu’est-ce que Dieu donnera Ă  ceux qu’il prĂ©destine Ă  la vie, s’il donne tant ici-bas Ă  ceux qu’il a prĂ©destinĂ©s Ă  la mort? de quels biens ne comblera-t-il point en la vie bienheureuse ceux pour qui il a voulu que son Fils unique souffrĂźt tant de maux et la mort mĂȘme en cette vie mortelle et misĂ©rable? Aussi l’ApĂŽtre, parlant de ceux qui sont prĂ©destinĂ©s au royaume cĂ©leste Que ne nous donnera-t-il point, dit-il, aprĂšs n’avoir pas Ă©pargnĂ© son propre Fils, et l’avoir livrĂ© Ă  la mort pour nous tous ? » Quand cette promesse sera accomplie, quels biens n’avons-nous pas Ă  espĂ©rer dans ce royaume, ayant dĂ©jĂ  reçu pour gage la mort d’un Dieu? En quel Ă©tat sera l’homme lorsqu’il n’aura plus de passions Ă  combattre et qu’il sera dans une paix parfaite avec lui-mĂȘme? Ne connaĂźtra-t-il pas certainement toutes choses sans peine et sans erreur, lorsqu’il puisera la sagesse de Dieu Ă  sa source mĂȘme? Que sera son corps, lorsque, parfaitement soumis Ă  l’esprit dont il tirera une vie abondante, il n’aura plus besoin d’aliments ? il ne sera plus animal, mais spirituel, gardant, il est vrai, la substance de la chair, mais exempt dĂ©sormais de toute corruption charnelle. CHAPITRE XXV. DE L’OBSTINATION DE QUELQUES INCRÉDULES QUI NE VEULENT PAS CROIRE A LA RÉSURRECTION DE LA CHAIR, ADMISE AUJOURD’HUI , SELON LES PRÉDICTIONS DES LIVRES SAINTS, PAR LE MONDE ENTIER. Les plus fameux philosophes conviennent avec nous des biens dont l’ñme heureuse jouira; ils combattent seulement la rĂ©surrection de la chair et la nient autant qu’ils peu. vent. Mais le grand nombre de ceux qui y croient a rendu imperceptible le nombre de ceux qui la nient; et les savants et les ignorants, les sages du monde et les simples se sont rangĂ©s du cĂŽtĂ© de JĂ©sus-Christ, qui a fait voir comme rĂ©el dans sa rĂ©surrection ce qu’une poignĂ©e d’incrĂ©dules trouve absurde. Le monde a cru ce que Dieu a prĂ©dit, et cette foi mĂȘme du monde a Ă©tĂ© aussi prĂ©dite, sans qu’on en puisse attribuer la prĂ©diction aux sortilĂšges de Pierre, puisqu’elle l’a prĂ©cĂ©dĂ© de tant d’annĂ©es’. Celui qui a annoncĂ© ces choses est le mĂȘme Dieu devant qui tremblent toutes les autres divinitĂ©s; je l’ai dĂ©jĂ  dit et je ne suis pas fĂąchĂ© de le rĂ©pĂ©ter; car ici Porphyre est d’accord avec moi, lui qui cherche dans les oracles mĂȘmes de ses dieux des tĂ©moignages Ă  l’honneur de notre Dieu, et va jusqu’à lui donner le nom de PĂšre et de Roi. Or, gardons-nous d’entendre ce que Dieu a prĂ©dit comme l’entendent ceux qui ne partagent pas avec le monde cette foi du monde qu’il a prĂ©dite. Et pourquoi en effet ne pas l’entendre plutĂŽt comme l’entend le monde dont la foi mĂȘme a Ă©tĂ© prĂ©dite? En effet, s’ils ne veulent l’entendre d’une autre maniĂšre que pour ne pas faire injure Ă  ce Dieu Ă  qui ils rendent un tĂ©moignage si Ă©clatant, et pour ne pas dire que sa prĂ©diction est vaine, n’est-ce pas lui faire une plus grande injure encore de dire qu’il la faut entendre autrement que le monde ne la croit, puisque lui-mĂȘme a annoncĂ©, louĂ©, accompli la foi du monde? Pourquoi ne peut-il pas faire que la chair ressuscite et vive Ă©ternellement? est-ce lĂ  un mal et une chose indigne de lui? Mais nous avons dĂ©jĂ  amplement parlĂ© de sa toute-puissance qui a fait tant de choses incroyables. Voulez-vous savoir ce que ne peut le Tout-Puissant? le voici il ne peut mentir. Croyez donc ce qu’il peut en ne croyant pas ce qu’il ne peut. Ne croyant pas qu’il puisse mentir, croyez donc qu’il fera ce qu’il a promis, et croyez-le comme l’a cru le monde dont il a prĂ©dit la foi. Maintenant, comment nos philosophes montrent-ils que ce soit un mal? Il n’y aura lĂ  aucune corruption, par consĂ©quent, aucun mal du corps. D’ailleurs, nous avons parlĂ© de l’ordre des Ă©lĂ©ments et des autres objections que l’on a imaginĂ©es Ă  ce sujet, et nous avons fait voir, au treiziĂšme livre, combien les mouvements d’un corps incorruptible seront souples et aisĂ©s, Ă  n’en juger que par ce que nous voyons maintenant, lorsque notre corps se porte bien, quoique sa santĂ© actuelle la plus parfaite ne soit pas comparable Ă  l’immortalitĂ© qu’il possĂ©dera un jour. Que ceux qui n’ont pas lu ce que j’ai dit ci-dessus, ou qui ne veulent pas s’en souvenir, prennent la peine de le relire. CHAPITRE XXVI. OPINION DE PORPHYRE SUR LE SOUVERAIN BIEN. Mais, disent-ils, Porphyre assure qu’une Ăąme, pour ĂȘtre heureuse, doit fuir toute sorte de corps . C’est donc en vain que nous prĂ©tendons que le corps sera incorruptible, si l’ñme ne peut ĂȘtre heureuse qu’à condition de fuir le corps. J’ai dĂ©jĂ  suffisamment rĂ©pondu Ă  cette objection, au livre indiquĂ©. J’ajouterai ceci seulement si les philosophes ont raison, que Platon, leur maĂźtre, corrige donc ses livres, et dise que les dieux fuiront leurs corps pour ĂȘtre bienheureux, c’est-Ă -dire qu’ils mourront, lui qui dit qu’ils sont enfermĂ©s dans des corps cĂ©lestes et que nĂ©anmoins le dieu qui les a créés leur a promis qu’ils y demeureraient toujours, afin qu’ils pussent ĂȘtre assurĂ©s de leur fĂ©licitĂ©, quoique cela ne dĂ»t pas ĂȘtre naturellement. Il renverse en cela du mĂȘme coup cet autre raisonnement qu’on nous oppose Ă  tout propos qu’il ne faut pas croire Ă  la rĂ©surrection de la chair, parce qu’elle est impossible. En effet, selon ce mĂȘme philosophe, lorsque le Dieu incréé a promis l’immortalitĂ© aux dieux créés, il leur a dit qu’il faisait une chose impossible. Voici le discours mĂȘme que Platon prĂȘte Ă  Dieu Comme vous avez commencĂ© d’ĂȘtre, vous ne sauriez ĂȘtre immortels ni parfaitement indissolubles; mais vous ne serez jamais dissous, et vous ne connaĂźtrez aucune sorte de mort, parce que la mort ne peut rien contre ma volontĂ©, laquelle est un lien plus fort et plus puissant que ceux dont vous fĂ»tes unis au moment de votre naissance ». AprĂšs cela, on ne peut plus douter, que, suivant Platon, le Dieu crĂ©ateur des autres dieux ne leur ait promis ce qui est impossible. Celui qui dit Vous ne pouvez Ă  la vĂ©ritĂ© ĂȘtre immortels, mais vous le serez, parce que je le veux, que dit-il autre chose, sinon Je ferai que vous serez ce que vous ne pouvez ĂȘtre? Celui-lĂ  donc ressuscitera la chair et la rendra immortelle, incorruptible et spirituelle, qui, selon Platon, a promis de faire ce qui est impossible. Pourquoi donc s’imaginer encore que ce que Dieu a promis de faire, ce que le monde entier croit sur sa parole, est impossible, surtout lorsqu’il a aussi promis que le monde le croirait? Nous ne disons pas qu’un autre dieu le doive faire que celui qui, selon Platon, fait des choses impossibles. Il ne faut donc pas que les Ăąmes fuient toutes sortes de corps pour ĂȘtre heureuses, mais il faut qu’elles en reçoivent un incorruptible. Et en quel corps incorruptible est-il plus raisonnable qu’elles se rĂ©jouissent, que dans le corps corruptible oĂč elles ont gĂ©mi? Ainsi elles n’auront pas ce dĂ©sir que Virgile leur attribue, d’aprĂšs Platon, de vouloir de nouveau retourner dans les corps a, puisqu’elles auront Ă©ternellement ces corps, et elles les auront si bien qu’elles ne s’en sĂ©pareront pas, mĂȘme pendant le plus petit espace de temps. CHAPITRE XXVII. DES OPINIONS CONTRAIRES DE PLATON ET DE PORPHYRE, LESQUELLES LES EUSSENT CONDUITS À LA VÉRITÉ, SI CHACUN D’EUX AVAIT VOULU CÉDER QUELQUE CHOSE A L’AUTRE. Platon et Porphyre ont aperçu chacun certaines vĂ©ritĂ©s qui peut-ĂȘtre en auraient fait des chrĂ©tiens, s’ils avaient pu se les communiquer l’un Ă  l’autre. Platon avance que les Ăąmes ne peuvent ĂȘtre Ă©ternellement sans corps, de sorte que celles mĂȘme des sages retourneront Ă  la vie corporelle, aprĂšs un long espace de temps . Porphyre dĂ©clare que lorsque l’ñme parfaitement purifiĂ©e sera retournĂ©e au PĂšre, elle ne reviendra jamais aux misĂšres de cette vie. Si Platon avait persuadĂ© Ă  Porphyre cette vĂ©ritĂ©, que sa raison avait conçue, que les Ăąmes mĂȘmes des hommes justes et sages retourneront en des corps humains; et si Porphyre eĂ»t fait part Ă  Platon de cette autre vĂ©ritĂ©, qu’il avait Ă©tablie, que les Ăąmes des saints ne reviendront jamais aux misĂšres d’un corps corruptible, je pense qu’ils auraient bien vu qu’il s’ensuit de lĂ  que les Ăąmes doivent retourner dans des corps, mais dans des corps immortels et incorruptibles. Que Porphyre dise donc avec Platon elles retourneront dans des corps; que Platon dise avec Porphyre elles ne retourneront pas Ă  leur premiĂšre misĂšre. Ils reconnaĂźtront alors tous deux qu’elles retourneront en des corps oĂč elles ne souffriront plus rien. Ce n’est autre chose que ce que Dieu a promis, savoir l’éternelle fĂ©licitĂ© des Ăąmes dans des corps immortels. Et maintenant; une fois accordĂ© que les Ăąmes des saints retourneront en des corps immortels, je pense qu’ils n’auraient pas beaucoup de peine Ă  leur permettre de retourner en ceux oĂč ils ont souffert les maux de la terre, et oĂč ils ont religieusement servi Dieu pour ĂȘtre dĂ©livrĂ©s de tout mal. CHAPITRE XXVIII. COMMENT PLATON, LABÉON ET MÊME VARRON AURAIENT PU VOIR LA VÉRITÉ DE LA RÉSURRECTION DE LA CHAIR, S’ILS AVAIENT RÉUNI LEURS OPINIONS EN UNE SEULE. Quelques-uns des nĂŽtres, qui aiment Platon Ă  cause de la beautĂ© de son style et de quelques vĂ©ritĂ©s rĂ©pandues dans ses Ă©crits, disent qu’il professe Ă  peu prĂšs le mĂȘme sentiment que nous sur la rĂ©surrection. Mais CicĂ©ron, qui en touche un mot dans sa RĂ©publique, laisse voir que le cĂ©lĂšbre philosophe a plutĂŽt voulu se jouer que dire ce qu’il croyait vĂ©ritable. Platon, en effet, introduit dans un de ses dialogues un homme ressuscitĂ© qui fait des rĂ©cits conformes aux sentiments des Platoniciens . LabĂ©on rapporte aussi que deux hommes morts le mĂȘme jour se rencontrĂšrent dans un carrefour, et qu’ensuite, ayant reçu l’ordre de retourner dans leur corps, ils se jurĂšrent une parfaite amitiĂ©, qui dura jusqu’à ce qu’ils moururent de nouveau. Mais ces sortes de rĂ©surrections sont comme celles des personnes que nous savons avoir Ă©tĂ© de nos jours rendues Ă  la vie, mais non pas pour ne plus mourir, Varron rapporte quelque chose de plus merveilleux dans son traitĂ© De l’origine du peuple romain. Voici ses propres paroles Quelques astrologues ont Ă©crit que les hommes sont destinĂ©s Ă  une renaissance qu’ils appellent palingĂ©nĂ©sie, et ils en fixent l’époque Ă  quatre cent quarante ans aprĂšs la mort. A ce moment, l’ñme reprendra le mĂȘme corps qu’elle avait auparavant ». Ce que Varron et ces astrologues, je ne sais lesquels, car il ne les nomme point, disent ici, n’est pas absolument vrai, puisque, lorsque les Ăąmes seront revenues Ă  leurs corps, elles ne les quitteront plus; mais au moins cela renverse-t-il beaucoup d’arguments que nos adversaires tirent d’une prĂ©tendue impossibilitĂ©. En effet, les paĂŻens qui ont Ă©tĂ© de ce sentiment n’ont donc pas estimĂ© que des corps Ă©vaporĂ©s dans l’air, ou Ă©coulĂ©s en eau, ou rĂ©duits en cendre et en poussiĂšre, ou passĂ©s dans la substance soit des bĂȘtes, soit des hommes, ne puissent ĂȘtre rĂ©tablis en leur premier Ă©tat. Si donc Platon et Porphyre, ou plutĂŽt ceux qui les aiment et qui sont actuellement en vie, tiennent que les Ăąmes purifiĂ©es retourneront dans des corps, comme le dit Platon, et que nĂ©anmoins elles ne reviendront point Ă  leurs misĂšres, comme le veut Porphyre, c’est-Ă -dire s’ils tiennent ce qu’enseigne notre religion, qu’elles rentreront dans des corps oĂč elles demeureront Ă©ternellement sans souffrir aucun mal, il ne leur reste plus qu’à dire avec Varron qu’elles retourneront aux mĂȘme corps qu’elles animaient primitivement, et toute la question de la rĂ©surrection sera rĂ©solue. CHAPITRE XXIX. DE LA NATURE DE LA VISION PAR LAQUELLE LES SAINTS CONNAÎTRONT DIEU DANS LA VIE FUTURE. Voyons maintenant, autant qu’il plaira Ă  Dieu de nous Ă©clairer, ce que les saints feront dans leurs corps immortels et spirituels, alors que leur chair ne vivra plus charnellement, mais spirituellement. Pour avouer avec franchise ce qui en est, je ne sais quelle sera cette action, ou plutĂŽt ce calme et ce repos dont ils jouiront. Les sens du corps ne m’en ont jamais donnĂ© aucune idĂ©e, et quant Ă  l’intelligence, qu’est-ce que toute la nĂŽtre, en comparaison d’un si grand objet ? C’est au sĂ©jour cĂ©leste que rĂšgne cette paix de Dieu, qui », comme dit l’ApĂŽtre, surpasse tout entendement » quel entendement, sinon le nĂŽtre, ou peut-ĂȘtre mĂȘme celui des anges? mais elle ne surpasse pas celui de Dieu. Si donc les saints doivent vivre dans la paix de Dieu, assurĂ©ment la paix oĂč ils doivent vivre surpasse tout entendement. Qu’elle surpasse le nĂŽtre, il n’en faut point douter; mais si elle surpasse mĂȘme celui des anges, comme il semble que l’ApĂŽtre le donne Ă  penser, qui dit tout n’exceptant rien, il faut appliquer ses paroles Ă  la paix dont jouit Dieu, et dire que ni nous, ni les anges mĂȘme ne la peuvent connaĂźtre comme Dieu la connaĂźt. Ainsi elle surpasse tout autre entendement que le sien. Mais de mĂȘme que nous participerons un jour, selon notre faible capacitĂ©, Ă  cette paix, soit en nous-mĂȘmes, soit en notre prochain, soit en Dieu, en tant qu’il est notre souverain bien, ainsi les anges la connaissent aujourd’hui autant qu’ils en sont capables, et les hommes aussi, mais beaucoup moins qu’eux, tout avancĂ©s qu’ils soient dans les voies spirituelles. Quel homme en effet peut surpasser celui qui a dit Nous connaissons en partie, et en partie nous devinons, jusqu’au jour oĂč le parfait s’accomplira »; et ailleurs Nous ne voyons maintenant que comme dans un miroir et en Ă©nigme; mais alors nous verrons face Ă  face ». C’est ainsi que voient dĂ©jĂ  les saints anges, qui sont aussi appelĂ©s nos anges, parce que, depuis que nous avons Ă©tĂ© dĂ©livrĂ©s de la puissance des tĂ©nĂšbres et transportĂ©s au royaume de JĂ©sus-Christ, aprĂšs avoir reçu le Saint-Esprit pour gage de notre rĂ©conciliation, nous commençons Ă  appartenir Ă  ces anges avec qui nous possĂ©derons en commun cette sainte et chĂšre CitĂ© de Dieu, sur laquelle nous avons dĂ©jĂ  Ă©crit tant de livres. Les anges de Dieu sont donc nos anges, comme le Christ de Dieu est notre Christ. Ils sont les anges de Dieu, parce qu’ils ne l’ont point abandonnĂ©; et ils sont nos anges, parce que nous commençons Ă  ĂȘtre leurs concitoyens. C’est ce qui a fait dire Ă  Notre-Seigneur Prenez bien garde de ne mĂ©priser aucun de ces petits; car je vous assure que leurs anges voient sans cesse la face de mon PĂšre dans le ciel ». Nous la verrons, nous aussi, comme ils la voient, mais nous ne la voyons pas encore de cette façon, d’oĂč vient cette parole de l’ApĂŽtre, que j’ai rapportĂ©e Nous ne voyous maintenant que dans un miroir et en Ă©nigme; mais alors nous verrons face Ă  face ». Cette vision nous est rĂ©servĂ©e pour rĂ©compense de notre foi, et saint Jean parle ainsi Lorsqu’il paraĂźtra, nous serons semblables Ă  lui, parce que nous le verrons tel qu’il est ». Il est clair que dans ces passages, par la face de Dieu, on doit entendre sa manifestation, et non cette partie de notre corps que nous appelons ainsi . C’est pourquoi quand on me demande ce que feront les saints dans leur corps spirituel, je ne dis pas ce que je vois, mais ce que je crois, suivant cette parole du psaume J’ai cru, et c’est ce qui m’a fait parler ». Je dis donc que c’est dans ce corps qu’ils verront Dieu; mais de savoir s’ils le verront par ce corps, comme maintenant nous voyons le soleil, la lune, les Ă©toiles elles autres objets sensibles, ce n’est pas une petite question. Il est dur de dire que les saints ne pourront alors ouvrir et fermer les yeux quand il leur plaira, mais il est encore plus dur de dire que quiconque fermera les yeux ne verra pas Dieu. Si ElisĂ©e, quoique absent de corps, vit son serviteur Giezi qui prenait, se croyant inaperçu, des prĂ©sents de Naaman le Syrien que le ProphĂšte avait guĂ©ri de la lĂšpre , Ă  combien plus forte raison les saints verront-ils toutes choses dans ce corps spirituel, non-seulement ayant les yeux fermĂ©s, mais mĂȘme Ă©tant corporellement absents! Ce sera alors le temps de cette perfection dont parle l’ApĂŽtre, quand il dit Nous connaissons en partie et en partie nous devinons; mais quand le parfait sera arrivĂ©, le partiel sera aboli ». Pour montrer ensuite par une sorte de comparaison combien cette vie, quelque progrĂšs qu’on y fasse dans la vertu, est diffĂ©rente de l’autre Quand j’étais enfant, dit-il, je jugeais en enfant, je raisonnais en enfant; mais lorsque je suis devenu homme, je me suis dĂ©fait de tout ce qui tenait de l’enfant. Nous ne voyons maintenant que comme dans un miroir et en Ă©nigme, mais alors nous verrons face Ă  face. Je ne connais maintenant qu’en partie, mais je connaĂźtrai alors comme je suis connu ». Si donc en cette vie, oĂč la connaissance des plus grands prophĂštes ne mĂ©rite pas plus d’ĂȘtre comparĂ©e Ă  celle que nous aurons dans la vie future, qu’un enfant n’est comparable Ă  un homme fait, ElisĂ©e tout absent qu’il Ă©tait, vit son serviteur qui prenait des prĂ©sents, dirons-nous que, lorsque le parfait sera arrivĂ© et que le corps corruptible n’appesantira plus l’ñme, les saints auront besoin pour voir des yeux dont le prophĂšte ElisĂ©e n’eut pas besoin? Voici comment ce ProphĂšte parle Ă  Giezi, selon la version des Septante Mon esprit n’allait-il pas avec toi, et ne sais-je pas que Naaman est sorti de son char au-devant de toi et que tu as acceptĂ© de l’argent? ». Ou comme le prĂȘtre JĂ©rĂŽme traduit sur l’hĂ©breu Mon esprit n’était-il pas prĂ©sent, quand Naaman est descendu de son char pour aller au-devant de toi ? » Le ProphĂšte dit qu’il vit cela avec son esprit, aidĂ© sans doute surnaturellement d’en haut ; Ă  combien plus forte raison, les saints recevront. ils cette grĂące du ciel, lorsque Dieu sera tout en tous ! Toutefois les yeux du corps auront aussi leur fonction et seront Ă  leur place, et l’esprit s’en servira par le ministĂšre du corps spirituel. Bien que le prophĂšte ElisĂ©e n’ait pas eu besoin de ses yeux pour voir son serviteur absent, ce n’est pas Ă  dire qu’il ne s’en servit point pour voir les objets prĂ©sents, qu’il pouvait nĂ©anmoins voir aussi avec son esprit, bien qu’il fermĂąt ses yeux, comme il en vit qui Ă©taient loin de lui. Gardons-nous donc de dire que les saints ne verront pas Dieu en l’autre vie les yeux fermĂ©s, puisqu’ils le verront toujours avec l’esprit. La question est de savoir s’ils le verront aussi avec les yeux du corps, quand ils les auront ouverts. Si leurs yeux, tout spirituels qu’ils seront dans leur corps spirituel, n’ont pas plus de vertu que n’en ont les nĂŽtres maintenant, il est certain qu’ils ne leur serviront point Ă  voir Dieu. Ils auront donc une vertu infiniment plus grande, si, par leur moyen, on voit cette nature immatĂ©rielle qui n’est point contenue dans un lieu limitĂ©, mais qui est tout entiĂšre partout. Quoique nous disions en effet que Dieu est au ciel et sur la terre, selon ce qu’il dit lui-mĂȘme par le ProphĂšte Je remplis le ciel et le terre »; il ne s’ensuit pas qu’il ait une partie de lui-mĂȘme dans le ciel et une autre sur la terre mais il est tout entier dans le ciel et tout entier sur la terre, non en divers temps, mais Ă  la fois, ce qui est impossible Ă  toute nature corporelle. Les yeux des saints auront donc alors une infiniment plus grande vertu, par oĂč je n’entends pas dire qu’ils auront la vue plus perçante que celle qu’on attribue aux aigles ou aux serpents; car ces animaux, quelque clairvoyants qu’ils soient, ne sauraient voir que des corps, au lieu que les yeux des saints verront mĂȘme des choses incorporelles. Telle Ă©tait peut-ĂȘtre cette vertu qui fut donnĂ©e au saint homme Job, quand il disait Ă  Dieu Auparavant je vous entendais, mais Ă  cette heure mon oeil vous voit; c’est pourquoi je me suis mĂ©prisĂ© moi-mĂȘme; je me suis comme fondu devant vous, et j’ai cru que je n’étais que cendre et que poussiĂšre ». Au reste, ceci se peut trĂšs-bien entendre des yeux de l’esprit dont saint Paul dit Afin qu’il Ă©claire les yeux de votre cƓur ». Or, que Dieu se voie de ces yeux-lĂ , c’est ce dont ne doute aucun chrĂ©tien qui accepte avec foi cette parole de notre Dieu et maĂźtre Bienheureux ceux qui ont le coeur pur, parce qu’ils verront Dieu ! » mais il reste toujours Ă  savoir si on le verra aussi des yeux du corps, et c’est ce que nous examinons maintenant. Nous lisons dans l’Evangile Et toute chair verra le salut de Dieu »; or, il n’y a aucun inconvĂ©nient Ă  entendre ce passage comme s’il y avait Et tout homme verra le Christ de Dieu qui a Ă©tĂ© vu dans un corps, et qui sera vu sous la mĂȘme forme, quand il jugera les vivants et les morts. En effet, que le Christ soit le salut de Dieu, cela se justifie par plusieurs tĂ©moignages de l’Ecriture, mais singuliĂšrement par ces paroles du vĂ©nĂ©rable vieillard SimĂ©on, qui, ayant pris JĂ©sus enfant entre ses bras, s’écria C’est maintenant, Seigneur, que vous pouvez laisser aller en paix votre serviteur, selon votre parole, puisque mes yeux ont vu votre salut ». Quant Ă  ce passage de Job, tel qu’il se trouve dans les exemplaires hĂ©breux Je verrai Dieu dans ma chair » , il faut croire sans doute que Job prophĂ©tisait ainsi la rĂ©surrection de la chair ; mais il n’a pas dit pourtant Je verrai Dieu par ma chair. Et quand il l’aurait dit, on pourrait l’entendre de JĂ©sus-Christ, qui est Dieu aussi, et qu’on verra dans la chair et par le moyen de la chair. Mais maintenant, en l’entendant de Dieu mĂȘme, on peut fort bien l’expliquer ainsi Je verrai Dieu dans ma chair » c’est-Ă -dire, je serai dans ma chair, lorsque je verrai Dieu. De mĂȘme ce que dit l’ApĂŽtre Nous verrons face Ă  face » ne nous oblige point Ă  croire que nous verrons Dieu par cette partie du corps oĂč sont les yeux corporels, lui que nous verrons sans interruption par les yeux de l’esprit. En effet, si l’homme intĂ©rieur n’avait aussi une face, l’ApĂŽtre ne dirait pas Mais nous, contemplant Ă  face dĂ©voilĂ©e la gloire du Seigneur, nous sommes transformĂ©s en la mĂȘme image, allant de clartĂ© en clartĂ©, comme par l’esprit du Seigneur ». Nous n’entendons pas autrement ces paroles du psaume Approchez-vous de lui, et vous serez Ă©clairĂ©s, et vos faces ne rougiront point ». C’est par lĂ  foi qu’on approche de Dieu, et il est certain que la foi appartient au coeur et non au corps. Mais comme nous ignorons jusqu’à quel degrĂ© de perfection doit ĂȘtre Ă©levĂ© le corps spirituel des bienheureux, car nous parlons d’une chose dont nous n’avons point d’expĂ©rience et sur laquelle l’Ecriture ne se dĂ©clare pas formellement, il faut de toute nĂ©cessitĂ© qu’il nous arrive ce qu’on lit dans la Sagesse Les pensĂ©es des hommes sont chancelantes, et leur prĂ©voyance est incertaine ». Si cette opinion des philosophes que les objets des sens et de l’esprit sont tellement partagĂ©s que l’on ne saurait voir les choses intelligibles par le corps, ni les corporelles par l’esprit, si cette opinion Ă©tait vraie, assurĂ©ment nous ne pourrions voir Dieu par les yeux d’un corps, mĂȘme spirituel. Mais la saine raison et l’autoritĂ© des ProphĂštes se jouent de ce raisonnement. Qui, en effet, serait assez peu sensĂ© pour dire que Dieu ne connaĂźt pas les choses corporelles? et cependant il n’a point de corps pour les voir. Il y a plus ce que nous avons rapportĂ© d’ElisĂ©e ne montre-t-il pas clairement qu’on peut voir les choses corporelles par l’esprit, sans avoir besoin du corps? Quand Giezi prit les prĂ©sents de Naaman, le fait se passa corporellement; et cependant le ProphĂšte ne le vit pas avec les yeux du corps, mais par l’esprit. De plus, puisqu’il est constant que les corps se voient par l’esprit, pourquoi ne se peut-il pas faire que la vertu d’un corps spirituel soit telle qu’on voie mĂȘme un esprit par ce corps? car Dieu est esprit. D’ailleurs, si chacun connaĂźt par un sentiment intĂ©rieur, et non par les yeux du corps, la vie qui l’anime, il n’en est pas de mĂȘme pour la vie de nos semblables nous la voyons par le corps, quoique ce soit une chose invisible. Comment discernons. nous les corps vivants de ceux qui ne le sont pas, sinon parce que nous voyons en mĂȘme temps et les corps et la vie que nous ne saurions voir que par le corps? mais la vie sans le corps se dĂ©robe aux yeux corporels. C’est pourquoi il est possible et fort croyable que dans l’autre vie nous verrons de telle façon les corps du ciel nouveau et de la terre nouvelle que nous y dĂ©couvrirons Dieu prĂ©sent partout, non comme aujourd’hui, oĂč ce qu’on peut voir de lui se voit, en quelque sorte, par les choses créées, comme dans un miroir et en Ă©nigme , et d’une façon partielles , et plus par la foi qu’autrement, mais comme nous voyons maintenant la vie des hommes qui se prĂ©sentent Ă  nos yeux. Nous ne croyons pas qu’ils vivent; nous le voyons. Alors donc, ou bien les yeux du corps seront tellement perfectionnĂ©s qu’on verra Dieu avec leur aide, comme on le voit par l’esprit, supposition difficile ou mĂȘme impossible Ă  justifier par aucun tĂ©moignage de l’Ecriture, on bien, ce qui est plus aisĂ© Ă  comprendre, Dieu nous sera si connu et si sensible que nous le verrons par l’esprit au dedans de nous, dans les autres, dans lui-mĂȘme, dans le ciel nouveau et dans la terre nouvelle, en un mot, dans tout ĂȘtre alors subsistant. Nous le verrons mĂȘme par le corps dans tout corps, de quelque cĂŽtĂ© que nous jetions les yeux. Et nos pensĂ©es aussi deviendront visibles; car alors s’accomplira ce que dit l’ApĂŽtre Ne jugez point avant le temps, jusqu’à ce que le Seigneur vienne, et qu’il porte la lumiĂšre dans les plus Ă©paisses tĂ©nĂšbres, et qu’il dĂ©couvre les pensĂ©es des coeurs; et chacun alors recevra de Dieu la louange qui lui est due ». CHAPITRE XXX. DE L’ÉTERNELLE FÉLICITÉ DE LA CITÉ DE DIEU ET DU SABBAT ÉTERNEL. Qu’elle sera heureuse cette vie oĂč tout mal aura disparu, oĂč aucun bien ne sera cachĂ©, oĂč l’on n’aura qu’à chanter les louanges de Dieu, qui sera tout en tous ! car que faire autre chose en un sĂ©jour oĂč ne se peuvent rencontrer ni la paresse, ni l’indigence? Le Psalmiste ne veut pas dire autre chose, quand il s’écrie Heureux ceux qui habitent votre maison, Seigneur ! ils vous loueront Ă©ternellement ». Toutes les parties de notre corps, maintenant destinĂ©es Ă  certains usages nĂ©cessaires Ă  la vie, n’auront point d’autre emploi que de concourir aux louanges de Dieu. Toute cette harmonie du corps humain dont j’ai parlĂ© et qui nous est maintenant cachĂ©e, se dĂ©couvrant alors Ă  nos yeux avec une infinitĂ© d’autres choses admirables, nous transportera d’une sainte ardeur pour louer hautement le grand Ouvrier. Je n’oserais dĂ©terminer quels seront les mouvements de ces corps spirituels; mais, Ă  coup sĂ»r, mouvement, altitude, expression, tout sera dans la convenance, en un lieu oĂč rien que de convenable ne se peut rencontrer. Un autre point assurĂ©, c’est que le corps sera incontinent oĂč l’esprit voudra, et que l’esprit ne voudra rien qui soit contraire Ă  la dignitĂ© du corps, ni Ă  la sienne. LĂ  rĂ©gnera la vĂ©ritable gloire, loin de l’erreur et de la flatterie. LĂ  le vĂ©ritable honneur, qui ne sera pas plus refusĂ© Ă  qui le mĂ©rite que dĂ©fĂ©rĂ© Ă  qui ne le mĂ©rite pas, nul indigne n’y pouvant prĂ©tendre dans un sĂ©jour oĂč le mĂ©rite seul donne accĂšs. LĂ  enfin la vĂ©ritable paix oĂč l’on ne souffrira rien de contraire, ni de soi-mĂȘme, ni des autres. Celui-lĂ  mĂȘme qui est l’auteur de la vertu en sera la rĂ©compense, parce qu’il n’y a rien de meilleur que lui et qu’il a promis de se donner Ă  tous. Que signifie ce qu’il a dit par le prophĂšte Je serai leur Dieu, et ils seront mon peuple », sinon Je serai l’objet qui remplira tous leurs souhaits ; je serai tout ce que les hommes peuvent honnĂȘtement dĂ©sirer, vie, santĂ©, nourriture, richesses, gloire, honneur, paix, en un mot tous les biens, afin que, comme dit l’ApĂŽtre Dieu soit tout en tous ». Celui-lĂ  sera la fin de nos dĂ©sirs, qu’on verra sans fin, qu’on aimera sans dĂ©goĂ»t, qu’on louera sans lassitude occupation qui sera commune Ă  tous, ainsi que la vie Ă©ternelle. Au reste, il n’est pas possible de savoir quel sera le degrĂ© de gloire proportionnĂ© aux mĂ©rites de chacun. Il n’y a point de doute pourtant qu’il n’y ait en cela beaucoup de diffĂ©rence. Et c’est encore un des grands biens rie cette CitĂ©, que l’on n’y portera point envie Ă  ceux que l’on verra au-dessus de soi, comme maintenant les anges ne sont point envieux de la gloire des archanges. L’on souhaitera aussi peu de possĂ©der ce qu’on n’a pas reçu, quoiqu’on soit parfaitement uni Ă  celui qui a reçu, que le doigt souhaite d’ĂȘtre l’oeil, bien que l’oeil et le doigt entrent dans la structure du mĂȘme corps. Chacun donc y possĂ©dera tellement son don, l’un plus grand, l’autre plus petit, qu’il aura en outre le don de n’en point dĂ©sirer de plus grand que le sien. Et il ne faut pas s’imaginer que les bienheureux n’auront point de libre arbitre, sous prĂ©texte qu’ils ne pourront plus prendre plaisir au pĂ©chĂ© ; ils seront mĂȘme d’autant plus libres qu’ils seront dĂ©livrĂ©s du plaisir de pĂ©cher pour prendre invariablement plaisir Ă  ne pĂ©cher point. Le premier libre arbitre qui fut donnĂ© Ă  l’homme, quand Dieu le crĂ©a droit, consistait Ă  pouvoir ne pas cĂ©der au pĂ©chĂ© et aussi Ă  pouvoir pĂ©cher. Mais ce libre arbitre supĂ©rieur, qu’il doit recevoir Ă  la fin, sera d’autant plus puissant qu’il ne pourra plus pĂ©cher, privilĂ©ge qu’il ne tiendra pas de lui. mĂȘme, mais do la bontĂ© de Dieu. Autre chose est d’ĂȘtre Dieu, autre chose est de participer de Dieu. Dieu, par nature, ne peut pĂ©cher; mais celui qui participe de Dieu reçoit seulement de lui la grĂące de ne plus pouvoir pĂ©cher. Or, cet ordre devait ĂȘtre gardĂ© dans le bienfait de Dieu, de donner premiĂšrement Ă  l’homme un libre arbitre par lequel il pĂ»t ne point pĂ©cher, et ensuite de lui en donner un par lequel il ne puisse plus pĂ©cher le premier pour acquĂ©rir le mĂ©rite, le second pour recevoir la rĂ©compense. Or, l’homme ayant pĂ©chĂ© lorsqu’il l’a pu, c’est par une grĂące plus abondante qu’il est dĂ©livrĂ©, afin d’arriver Ă  cette libertĂ© oĂč il ne pourra plus pĂ©cher. De mĂȘme que la premiĂšre immortalitĂ© qu’Adam perdit en pĂ©chant consistait Ă  pouvoir ne pas mourir, et que la derniĂšre consistera Ă  ne pouvoir plus mourir, ainsi la premiĂšre libertĂ© de la volontĂ© consistait Ă  pouvoir ne pas pĂ©cher, la derniĂšre consistera Ă  ne pouvoir plus pĂ©cher. De la sorte, l’homme ne pourra pas plus perdre sa vertu que sa fĂ©licitĂ©. Et il n’en sera pourtant pas moins libre car dira-t-on que Dieu n’a point de libre arbitre, sous prĂ©texte qu’il ne saurait pĂ©cher? Tous les membres de cette divine CitĂ© auront donc une volontĂ© parfaitement libre, exempte de tout mal, comblĂ©e de tout bien, jouissant des dĂ©lices d’une joie immortelle, sans plus se souvenir de ses fautes ni de ses misĂšres, et sans oublier nĂ©anmoins sa dĂ©livrance, pour n’ĂȘtre pas ingrate envers son libĂ©rateur. L’ñme se souviendra donc de ses maux passĂ©s, mais intellectuellement et sans les ressentir, comme un habile mĂ©decin qui connaĂźt plusieurs maladies par son art, sans les avoir jamais Ă©prouvĂ©es. De mĂȘme qu’on peut connaĂźtre les maux de deux maniĂšres, par science ou par expĂ©rience, car un homme de bien connaĂźt les vices autrement qu’un libertin, on peut aussi les oublier de deux matiĂšres. Celui qui les a appris par science ne les oublie pas de la mĂȘme maniĂšre que celui qui les a soufferts ; car celui-lĂ  les oublie en abdiquant sa connaissance, et celui-ci en dĂ©pouillant sa misĂšre. C’est de cette derniĂšre façon que les saints ne se souviendront plus de leurs maux passĂ©s. Ils seront exempts de tous maux, sans qu’il leur en reste le moindre sentiment; et toutefois, par le moyen de la science qu’ils possĂ©deront au plus haut degrĂ©, ils ne connaĂźtront pas seulement leur misĂšre passĂ©e , mais aussi la misĂšre Ă©ternelle des damnĂ©s. En effet, s’ils ne se souvenaient lias d’avoir Ă©tĂ© misĂ©rables, comment, selon le Psalmiste, chanteraient-ils Ă©ternellement les misĂ©ricordes de Dieu ? or, nous savons que cette CitĂ© n’aura pas de plus grande joie que de chanter ce cantique Ă  la gloire du Sauveur qui nous a rachetĂ©s par son sang. LĂ  cette parole sera accomplie Tenez-vous en repos, et reconnaissez que je suis Dieu » LĂ  sera vraiment le grand sabbat qui n’aura point de soir, celui qui est figurĂ© dans la GenĂšse, quand il est dit Dieu se reposa de toutes ses oeuvres le septiĂšme jour, et il le bĂ©nit et le sanctifia, parce qu’il s’y reposa de tous les ouvrages qu’il avait entrepris ». En effet, nous serons nous-mĂȘmes le septiĂšme jour, quand nous serons remplis et comblĂ©s de la bĂ©nĂ©diction et de la sanctification, de Dieu. LĂ  nous nous reposerons, et nous reconnaĂźtrons que c’est lui qui est Dieu, qualitĂ© souveraine que nous avons voulu usurper, quand nous avons abandonnĂ© Dieu pour Ă©couter cette parole du sĂ©ducteur Vous serez comme des dieux »; d’autant plus aveugles que nous aurions eu cette qualitĂ© en quelque sorte, par anticipation et par grĂące, si nous lui Ă©tions demeurĂ©s fidĂšles au lieu de le quitter . Qu’avons-nous fait en le quittant, que mourir misĂ©rablement? Mais alors, rĂ©tablis par sa bontĂ© et remplis d’une grĂące plus abondante, nous nous reposerons Ă©ternellement et nous verrons que c’est lui qui est Dieu; car nous serons pleins de lui et il sera tout en tous. Nos bonnes oeuvres mĂȘmes, quand nous les croyons plus Ă  lui qu’à nous, nous sont imputĂ©es pour obtenir ce sabbat; au lieu que, si nous venons Ă  nous les attribuer, elles deviennent des oeuvres serviles, puisqu’il est dit du sabbat Vous n’y ferez aucune oeuvre servile » ; d’oĂč cette parole qui est dans le prophĂšte EzĂ©chiel Je leur ai donnĂ© mes sabbats comme un signe d’alliance entre eux et moi, afin qu’ils apprissent que je suis le Seigneur qui les sanctifie » . Nous saurons cela parfaitement, quand nous serons parfaitement en repos et que nous verrons parfaitement que c’est lui qui est Dieu. Ce sabbat paraĂźtra encore plus clairement, si l’on compte les Ăąges, selon l’Ecriture, comme autant de jours, puisqu’il se trouve justement le septiĂšme. Le premier Ăąge, comme le premier jour, se compte depuis Adam jusqu’au dĂ©luge ; le second, depuis le dĂ©luge jusqu’à Abraham; et, bien que celui-ci ne comprenne pas une aussi longue durĂ©e que le premier, il comprend autant de gĂ©nĂ©rations, depuis Abraham jusqu’à JĂ©sus-Christ. L’évangĂ©liste Matthieu compte trois Ăąges qui comprennent chacun quatre gĂ©nĂ©rations un d’Abraham Ă  David, l’autre de David Ă  la captivitĂ© de Babylone, le troisiĂšme de cette captivitĂ© Ă  la naissance temporelle de JĂ©sus-Christ. VoilĂ  donc dĂ©jĂ  cinq Ăąges. Le sixiĂšme s’écoule maintenant et ne doit ĂȘtre mesurĂ© par aucun nombre certain de gĂ©nĂ©rations, Ă  cause de cette parole du Sauveur Ce n’est pas Ă  vous de connaĂźtre les temps dont mon PĂšre s’est rĂ©servĂ© la disposition ». AprĂšs celui-ci, Dieu se reposera comme au septiĂšme jour, lorsqu’il nous fera reposer en lui, nous qui serons ce septiĂšme jour. Mais il serait trop long de traiter ici de ces sept Ăąges. Qu’il suffise de savoir que le septiĂšme sera notre sabbat, qui n’aura point de soir, mais qui finira par le jour dominical, huitiĂšme jour et jour Ă©ternel, consacrĂ© par la rĂ©surrection de JĂ©sus-Christ et figurant le repos Ă©ternel, non-seulement de l’esprit, mais du corps. C’est lĂ  que nous nous reposerons et que nous verrons, que nous verrons et que nous aimerons, que nous aimerons et que nous louerons. VoilĂ  ce qui sera Ă  la fin sans fin. Et quelle autre fin nous proposons-nous que d’arriver au royaume qui n’a point de fin? Il me semble, en terminant ce grand ouvrage, qu’avec l’aide de Dieu je me suis acquittĂ© de ma dette. Que ceux qui trouvent que j’en ai dit trop ou trop peu, me le pardonnent; et que ceux qui pensent que j’en ai dit assez en rendent grĂąces, non Ă  moi, mais Ă  Dieu avec moi. Ainsi soit-il ! VoreppeLa Roize, enfant terrible de la citĂ© Comme le 5 juillet 1971. Par Marie-Claude BLANCHET - 14 juil. 2020 Ă  14:47 | mis Ă  jour le 14 juil. 2020 Ă  14:55 - Temps de lecture : Le secret de la citĂ© perdue 2022 Film Complet Streaming VF en Francais REGARDER] Le secret de la citĂ© perdue 2022 Film Streaming Online VF Complet HD,Regarder Regarder Le secret de la citĂ© perdue 2022 film complet en ligne MOVIES gratuit,TĂ©lĂ©charger Le secret de la citĂ© perdue Torrent Film Français, REGARDER Le secret de la citĂ© perdue streaming vF2022 film complet HD , Regarder Le secret de la citĂ© perdue 2022 film complet en ligne, 🎬 Regarder ✼☛ Le secret de la citĂ© perdue 【2022】 🎬 Telecharger đŸ“„ Le secret de la citĂ© perdue 【2022】 La vĂ©ritable histoire du lĂ©gendaire Ranger de l’espace qui, depuis, a inspirĂ© le jouet que nous connaissons tous. AprĂšs s’ĂȘtre Ă©chouĂ© avec sa commandante et son Ă©quipage sur une planĂšte hostile situĂ©e Ă  4,2 millions d’annĂ©es-lumiĂšre de la Terre, Buzz l’Eclair tente de raLe secret de la citĂ© perdueer tout ce petit monde sain et sauf Ă  Le secret de la citĂ© perdue. Pour cela, il peut compter sur le soutien d’un groupe de jeunes recrues ambitieuses et sur son adorable chat robot, Sox. Mais l’arrivĂ©e du terrible Zurg et de son armĂ©e de robots impitoyables ne va pas leur faciliter la tĂąche, d’autant que ce dernier a un plan bien prĂ©cis en tĂȘte
 Profitez et regardez bienđŸ“ș ● Le secret de la citĂ© perdue 2022 Film complet Ă  regarder en ligne ● Le secret de la citĂ© perdue 2022 film complet en anglais ● Le secret de la citĂ© perdue 2022 film complet, ● Regardez Le secret de la citĂ© perdue 2022 en anglais FullMovie Online ● Le secret de la citĂ© perdue 2022 film complet en ligne ● Regardez le film anglais complet de Le secret de la citĂ© perdue 2022 ● Le secret de la citĂ© perdue 2022 film complet en streaming gratuit ● Regardez le sous-titre complet du film Le secret de la citĂ© perdue 2022 ● Regardez le film complet de Le secret de la citĂ© perdue 2022 ● Le secret de la citĂ© perdue 2022 film complet en tamoul ● Le secret de la citĂ© perdue 2022 TĂ©lĂ©chargeLe secret de la citĂ© perduet du film complet en tamoul ● Regarder le tĂ©lĂ©chargeLe secret de la citĂ© perduet du film complet de Le secret de la citĂ© perdue 2022 ● Regarder Le secret de la citĂ© perdue 2022 film complet telugu ● Regarder le film complet de Le secret de la citĂ© perdue 2022 tĂ©lĂ©charger tamildubbed ● Le secret de la citĂ© perdue 2022 film complet pour regarder le film complet de Toy film ● Le secret de la citĂ© perdue 2022 film complet Definition and Definition of Film / Movie While the players who play a role in the film are referred to as actors Le secret de la citĂ© perdue or actresses woLe secret de la citĂ© perdue. There is also the term extras that are used as supporting characters with few roles in the film. This is different from the main actors who have bigger and more roles. Being an actor and an actress must be demanded to have good acting talent, which is in accordance with the theme of the film he is starring in. In certain scenes, the actor’s role can be replaced by a stuntman or a stuntman. The existence of a stuntman is important to replace the actors doing scenes that are difficult and extreme, which are usually found in action action films. Films can also be used to convey certain messages from the filmmaker. Some industries also use film to convey and represent their symbols and culture. Filmmaking is also a form of expression, thoughts, ideas, concepts, feelings and moods of a human being visualized in film. The film itself is mostly a fiction, although some are based on fact true stories or based on a true story. There are also docuLe secret de la citĂ© perduetaries with original and real pictures, or biographical films that tell the story of a character. There are many other popular genre films, ranging from action films, horror films, comedy films, romantic films, fantasy films, thriller films, drama films, science fiction films, crime films, docuLe secret de la citĂ© perduetaries and others. That’s a little information about the definition of film or movie. The information was quoted from various sources and references. Hope it can be useful. Le secret de la citĂ© perdue Streaming vf, Le secret de la citĂ© perdue Streaming Vostfr, Le secret de la citĂ© perdue Streaming vf gratuit, Le secret de la citĂ© perdue Streaming Youwatch, Le secret de la citĂ© perdue Telecharger, Le secret de la citĂ© perdue Complet en streaming, Le secret de la citĂ© perdue Uptobox, Le secret de la citĂ© perdue complet en français, Le secret de la citĂ© perdue Streaming vf gratuit complet, ❍❍❍ TV FILM ❍❍❍ The first television shows were experiLe secret de la citĂ© perduetal, sporadic broadcasts viewable only within a very short range from the broadcast tower starting in the 1930s. Televised events such as the 1936 Summer Olympics in Germany, the 19340 coronation of King George VI in the UK, and David Sarnoff’s famous introduction at the 1939 New York World’s Fair in the US spurred a growth in the medium, but World War II put a halt to developLe secret de la citĂ© perduet until after the war. The 19440 World MOVIE inspired many Americans to buy their first television set and then in 1948, the popular radio show Texaco Star Theater made the move and became the first weekly televised Le secret de la citĂ© perdue show, earning host Milton Berle the name “”Mr Television”” and demonstrating that the medium was a stable, modern form of entertainLe secret de la citĂ© perduet which could attract advertisers. The first national live television broadcast in the US took place on September 4, 1951 when President Harry Truman’s speech at the Japanese Peace Treaty Conference in San Francisco was transmitted over AT&T’s transcontinental cable and microwave radio relay system to broadcast stations in local markets. The first national color broadcast the 1954 TournaLe secret de la citĂ© perduet of Roses Parade in the US occurred on January 1, 1954. During the following ten years most network broadcasts, and nearly all local programming, continued to be in black-and-white. A color transition was announced for the Le secret de la citĂ© perdue of 1965, during which over half of all network prime-time programming would be broadcast in color. The first all-color prime-time season came just one year later. In 19402, the last hLe secret de la citĂ© perdueout among daytime network shows converted to color, resulting in the first completely all-color network season. ❍❍❍ formats and genres ❍❍❍ See also List of genres § Film and television formats and genres Television shows are more varied than most other forms of media due to the wide Le secret de la citĂ© perdue of formats and genres that can be presented. A show may be fictional as in comedies and dramas, or non-fictional as in docuLe secret de la citĂ© perduetary, news, and reality television. It may be topical as in the case of a local newscast and some made-for-television films, or historical as in the case of many docuLe secret de la citĂ© perduetaries and fictional MOVIE. They could be prLe secret de la citĂ© perduerily instructional or educational, or entertaining as is the case in situation comedy and game shows.[citation needed] A drama program usually features a set of actors playing characters in a historical or contemporary setting. The program follows their lives and adventures. Before the 1980s, shows except for soap opera-type serials typically remained static without story arcs, and the main characters and premise changed little.[citation needed] If some change happened to the characters’ lives during the episode, it was usually undone by the end. Because of this, the episodes could be broadcast in any order.[citation needed] Since the 1980s, many MOVIE feature progressive change in the plot, the characters, or both. For instance, Hill Street Blues and St. Elsewhere were two of the first American prime time drama television MOVIE to have this kind of dramatic structure,[4][better source needed] while the later MOVIE Babylon 5 further exemplifies such structure in that it had a predetermined story running over its intendevd five-season run.[citvatio””&n needed] In 2022, it was reported that television was growing into a larger component of major media companies’ revenues than film.[5] Some also noted the increase in quality of some television programs. In 2022, Academy-Award-winning film director Steven Soderbergh, comLe secret de la citĂ© perdueting on ambiguity and complexity of character and narrative, stated “”I think those qualities are now being seen on television and that people who want to see stories that have those kinds of qualities are watching television. ❍❍❍ Thanks for everything and have fun watching❍❍❍ Find all the movies that you can stream online, including those that were screened this week. If you are wondering what you can watch on this website, then you should know that it covers genres that include crime, Science, Fi-Fi, action, romance, thriller, Comedy, drama and Anime Movie. Thank you very much. We tell everyone who is happy to receive us as news or information about this year’s film schedule and how you watch your favorite films. Hopefully we can become the best partner for you in finding recomLe secret de la citĂ© perduedations for your favorite movies. That’s all from us, greetings! Thanks for watching The Video Today. I hope you enjoy the videos that I share. Give a thumbs up, like, or share if you enjoy what we’ve shared so that we more excited. Sprinkle cheerful Le secret de la citĂ© perdue so that the world back in a Le secret de la citĂ© perdue of colors. LACITÉ DE DIEU Livre XIe.ORIGINE DES DEUX CITÉS ch. 2 Chapitre 2. PERSONNE NE PEUT ARRIVER A LA CONNAISSANCE DE DIEU QUE PAR JÉSUS-CHRIST HOMME, MÉDIA-TEUR ENTRE DIEU ET LES HOMMES. C’est chose difficile et fort rare, aprĂšs avoir considĂ©rĂ©

Le tourisme dans le viseur Le directeur du chĂąteau de Pau estime que le patrimoine de Lescar est aussi exceptionnel qu’à Pau », vante l’édile qui cite le trĂ©sor de la cathĂ©drale ou encore sa mosaĂŻque. Et c’est aussi une cathĂ©drale nĂ©cropole, il n’y en a que...Le tourisme dans le viseur Le directeur du chĂąteau de Pau estime que le patrimoine de Lescar est aussi exceptionnel qu’à Pau », vante l’édile qui cite le trĂ©sor de la cathĂ©drale ou encore sa mosaĂŻque. Et c’est aussi une cathĂ©drale nĂ©cropole, il n’y en a que six en France ! Les Rois de Navarre y sont enterrĂ©s, dont les grands-parents d’Henri IV. Le gouvernement de Navarre demande rĂ©guliĂšrement leur transfert en Espagne. Mais c’est non ! » rigole Christian Laine. Nous avons doublĂ© la frĂ©quentation en quatre-cinq ans, affirme ValĂ©rie Revel, l’adjointe Ă  la culture, avec 8 500 visiteurs par an. » De bons chiffres Ă  mettre en parallĂšle avec le transfert de la compĂ©tence tourisme Ă  l’Agglo. Depuis, Pau valorise sa voisine et vice-versa et a dĂ©veloppĂ© avec l’office lescarien des visites guidĂ©es, notamment aux flambeaux l’étĂ©, qui les grands travaux que Lescar s’apprĂȘte Ă  boucler avant l’inauguration de la citĂ© mĂ©diĂ©vale, le 21 novembre, lui donnent un beau coup de cathĂ©drale rendue visibleC’est flagrant sur la façade pyrĂ©nĂ©enne de la cathĂ©drale. Sur la place Royale qui peut dĂ©sormais vraiment revendiquer le nom de place, l’enlĂšvement des stationnements pour Ă©largir la promenade, le pavage qui prĂ©cise l’emplacement d’une chapelle dont l’existence a Ă©tĂ© rĂ©vĂ©lĂ©e par les fouilles, ou encore la disparition des arbres que certains regrettent sans doute, mais d’autres doivent ĂȘtre plantĂ©s, notamment l’historique cĂšdre de la ville laissent prendre du recul pour admirer les pierres roses et jaunes et l’ensemble de l’édifice du XIIe siĂšcle. MĂȘme l’amĂ©nagement du parking qui jouxte le cimetiĂšre, se fait discret, derriĂšre des murets, pour ne pas gĂącher la carte postale. Le chƓur de la cathĂ©drale et sa cĂ©lĂšbre mosaĂŻque ont Ă©tĂ© les premiers rĂ©novĂ©s de la citĂ©, en 2008. Ascencion Torrent Le belvĂ©dĂšre avec la vue sur le pic du Midi d’Ossau doit, lui, encore retrouver sa vĂ©gĂ©tation. Et surtout, un restaurant d’étĂ© qui pourrait s’y poser au printemps prochain. En attendant, il permet d’admirer, de l’autre cĂŽtĂ©, l’ancienne mairie rĂ©novĂ©e en maison des services publics et municipaux, plutĂŽt cossue. Et dĂ©sormais voisine du refuge des pĂšlerins de Saint-Jacques installĂ© depuis un an en cƓur de chantiers Ă  venirMais ça ne sera jamais fini », souffle le maire qui rappelle que tout a commencĂ© en 2008, Ă  l’intĂ©rieur de la cathĂ©drale, par le chƓur. Elle Ă©tait grise, triste, abandonnĂ©e », dĂ©crit-il. AprĂšs sa mise en lumiĂšre, sa sonorisation, l’installation du chauffage au sol, la rĂ©novation des tableaux du chemin de croix et enfin la mise en valeur du trĂ©sor qui a rouvert il y a un an, deux gros chantiers sont Ă  venir le toit d’ardoise pour un peu moins d’un million d’euros et l’orgue Ă  dĂ©monter et nettoyer. La deuxiĂšme phase, la valorisation de la citĂ© des rois de Navarre, elle-mĂȘme, n’a dĂ©marrĂ© qu’avec un concours d’architecte en 2012. Dans le viseur, le palais Ă©piscopal, les voies et la vue sur les PyrĂ©nĂ©es. La citĂ© Ă©tait en train de mourir et les commerces se vidaient, raconte Christian Laine. Il nous fallait un parrain et on a demandĂ© son avis Ă  Marc BĂ©lit, qui nous a dit de ne pas rĂ©flĂ©chir en termes de pierres, mais de vie, d’habitants, de commerces et d’animations. On est partis sur cette idĂ©e ».D’oĂč cette attention autour du nombre de stationnements qui n’a quasiment pas bougĂ© et reste gratuit avec des disques et bientĂŽt quatre arrĂȘts minute, les circulations inchangĂ©es, ainsi que la place faite Ă  la aides financiĂšres importantesUne fois passĂ©e la grande fĂȘte des MystĂšre, les travaux vont reprendre avant le jour J de l’inauguration et de toute une semaine d’animations autour de la citĂ© mĂ©diĂ©vale, avec des plantations, l’amĂ©nagement devant le musĂ©e et au belvĂ©dĂšre, des crĂ©pis Ă  terminer ou encore l’illumination de la partie nord de la tout, prĂšs de 3 millions d’euros ont Ă©tĂ© investis, mais avec des subventions de l’Agglo, d’AliĂ©nor, du DĂ©partement, de fondations et on attend la RĂ©gion », insiste le maire. Il compare le coĂ»t avec celui du nouveau cimetiĂšre, 2 M€ que les Lescariens paient en totalitĂ© On se bat pour que Lescar ne paie que 20 % » de la rĂ©novation de la citĂ© rĂ©sultat, lui, est Ă  admirer dĂšs ce matin sur place, dans l’ambiance de l’époque. Au pied des remparts, le village mĂ©diĂ©val s’est installĂ© pour le week-end. Les immanquables du week-end Si tout le programme des MystĂšres de la citĂ© s’affichait dans notre Ă©dition de vendredi, voici une sĂ©lection des rendez-vous Ă  ne pas manquer ces deux d’abord, le village mĂ©diĂ©val installĂ© au pied des remparts, avec son marchĂ© Ă  partir de 12h, ses campements historiques et sa place des ensuite Ă  partir de 14h, lors du salon du livre sur Lux in Tenebris », une exposition interactive qui mĂšne dans un thriller/BD mĂ©diĂ©val armĂ© d’une tablette et d’un casque, on cherche Ă  dĂ©masquer le coupable dĂšs 13 ans.L’incontournable montĂ©e aux flambeaux, s’élancera Ă  20 h 15 de la place des rĂŽtisseurs costumes fortement recommandĂ©s, avant le spectacle dĂ©ambulatoire dans la citĂ©, Ă  partir de 20 h 45, le parcours fĂ©erique Renaissance !Lanceurs de drapeaux et visitesDimanche, c’est dĂšs 10h qu’on pourra profiter d’animations sur le village mĂ©diĂ©val et de Lux in Tenebris ». À 11h, 14h et 16h, des dĂ©monstrations de joutes Ă©questres sont aussi au 14h Ă  18h, rendez-vous au cƓur de la citĂ©. Dans la cathĂ©drale pour des morceaux autour de l’orgue 14h-17h tandis qu’à l’extĂ©rieur dĂ©fileront 40 lanceurs de drapeaux de Florence, Ă  14h et 16 h une visite guidĂ©e de la citĂ© et du trĂ©sor, rendez-vous Ă  14 h 30 et 17h devant l’office de gratuites. Samedi de 18h30 Ă  00h, se garer au Point vert oĂč des navettes partent toutes les 5-10 minutes vers les remparts.

CITEDU VATICAN, Mercredi 23 juillet 2003 (ZENIT.org) - "Réconfort et joie dans la cité de Dieu", c'est le titre donné par L'Osservatore Romano en langue française du 22 juillet à la catéchÚse de Jean-Paul II en italien du 16 juillet, sur le cantique du livre d'Isaïe (Is 66). Voici la traduction intégrale en français de L'OR.

Au cƓur de la jungle colombienne, la randonnĂ©e qui mĂšne Ă  la Ciudad Perdida s'impose de plus en plus comme un incontournable, en AmĂ©rique du Sud. Peu d'endroits sur Terre permettent de voir le turquoise d'une mer tropicale et, dans la mĂȘme matinĂ©e, des neiges Ă©ternelles. La Sierra Nevada de Santa Marta en est un ce massif cĂŽtier dĂ©tachĂ© du reste de la cordillĂšre des Andes, culminant Ă  5775 m d'altitude, plonge dans la mer des CaraĂŻbes. On peut s’y offrir la randonnĂ©e la plus cĂ©lĂšbre de Colombie, celle de la Ciudad Perdida. Nul besoin de se mettre les pieds dans la neige, toutefois cette citĂ© prĂ©colombienne du peuple tayrona n'est qu'Ă  1300 m d'altitude. © Shutterstock Mais oubliez tout de suite la tente et les pastilles pour purifier l'eau la balade est fort bien organisĂ©e et on peut trĂšs bien la faire avec un petit sac Ă  dos. Il faut impĂ©rativement passer par une des huit agences accrĂ©ditĂ©es de Santa Marta, qui facturent toutes le mĂȘme prix, peu importe si vous voulez faire cet aller-retour de 46 km en 4, 5 ou 6 jours – la durĂ©e la plus courte est amplement suffisante. Les groupes ne dĂ©passent pas 12 randonneurs, et vous n'entendrez personne se plaindre qu'il manque de quoi que ce soit des mules transportent des victuailles jusqu'aux campements – oĂč on dort dans des lits propres et oĂč on prĂ©pare des repas particuliĂšrement copieux. Souvent, au sommet d'une cĂŽte, surprise des fruits fraĂźchement coupĂ©s sont mĂȘme lĂ  pour rafraĂźchir le marcheur. Le chemin est bien entretenu, certaines difficultĂ©s ont Ă©tĂ© aplanies et bien des efforts sont dĂ©ployĂ©s pour le rendre grand public », notamment par l'amĂ©nagement de ponts. Le gros luxe, donc, qui a ses bons ou ses mauvais cĂŽtĂ©s selon que vous ĂȘtes plutĂŽt du genre social ou ermite le sentier est trĂšs couru jusqu'Ă  200 personnes se trouvent chaque jour sur ses 23 km, toutes les gĂ©nĂ©rations sont reprĂ©sentĂ©es parmi les marcheurs et de nouveaux campements sont mĂȘme en construction. Il est loin le temps oĂč cette randonnĂ©e Ă©tait rendue impossible par la prĂ©sence de guĂ©rilleros dans la montagne en dĂ©couvrant la paix, la Colombie s'est aussi ouverte au tourisme de masse. Toutefois, le parcours prĂ©sente suffisamment de sections difficiles pour fatiguer jusqu'aux randonneurs aguerris quelques montĂ©es ardues, des cours d'eau Ă  traverser Ă  guĂ© et une chaleur lourde, ce qui peut devenir trĂšs compliquĂ© Ă  gĂ©rer en saison des pluies d'avril Ă  novembre. Les journĂ©es de marche sont longues et en soirĂ©e, les moustiques peuvent aussi devenir un facteur d'Ă©puisement
 psychologique! Mais la splendeur de la nature traversĂ©e est le meilleur des rĂ©conforts perroquets et gigantesques araignĂ©es foisonnent dans cette forĂȘt luxuriante traversĂ©e par d'impĂ©tueux torrents aux eaux cristallines. En pays tayrona © Shutterstock L'aventure commence Ă  8 heures du matin, dans la vieille ville de Santa Marta. Chaque participant est recueilli Ă  la porte de son hĂŽtel par un 4X4. Il faut prĂšs de deux heures pour rejoindre le point de dĂ©part du trek, le village d'El Mamey, par une piste dĂ©foncĂ©e qui grimpe dans la montagne. LĂ -bas, on fait connaissance avec notre guide Gabo, fier reprĂ©sentant de l'ethnie kogi – une des quatre qui descendent directement des Tayronas, le groupe prĂ©colombien de la rĂ©gion. Il est accompagnĂ© d'un traducteur et d'un cuisinier. Homme de l'ombre, c'est ce dernier qui a le plus de travail dĂšs qu'il a fini de faire la vaisselle, il repart avant le groupe afin que le repas soit prĂȘt lorsque nous arrivons Ă  l'arrĂȘt suivant. Le premier aprĂšs-midi de marche se fait sous un soleil de plomb, sur un chemin Ă  pic que les motos des villageois parviennent Ă  gravir on ne sait comment. Les vues imprenables sur les montagnes alentour sont nombreuses, et des commerces de fortune ont investi ces belvĂ©dĂšres boissons fraĂźches, oranges pressĂ©es, grains de cacao
 Le sentier est une vĂ©ritable aubaine Ă©conomique pour la rĂ©gion. Le premier campement, oĂč on peut se rafraĂźchir en plongeant dans une piscine naturelle, a mĂȘme donnĂ© naissance Ă  un petit village, de part et d'autre d'une riviĂšre franchie par un pont de singe. © Shutterstock C'est le deuxiĂšme jour qu'on s'enfonce plus profondĂ©ment dans la jungle. On croise de plus en plus d'Autochtones, issus des ethnies kogi et wiwa, tout de blanc vĂȘtus. Nous sommes sur leur territoire, et ils permettent aux visiteurs de n'emprunter que ce sentier, malgrĂ© des nĂ©gociations menĂ©es par les acteurs du secteur touristique pour le transformer en une boucle. Selon Gabo, nous sommes pour eux des petits frĂšres » matĂ©rialistes alors qu'eux, grands frĂšres », se sont vu confier le rĂŽle de protĂ©ger la forĂȘt. L'innocence de l'enfance est une valeur sacrĂ©e chez les descendants des Tayronas. Ainsi, les jeunes ignorent tout de la conception jusqu'Ă  l'Ăąge de 18 ans, lorsque le chef spirituel, le mamo, les rencontre un Ă  un pour leur expliquer les choses de la vie – Ă  commencer par la sexualitĂ©. Avant cela, leurs parents jouent le jeu en vivant dans des maisons sĂ©parĂ©es et en se prĂ©sentant comme de simples amis. Le jeune homme nouvellement initiĂ© reçoit un poporo, curieux rĂ©cipient dans lequel la coca est mĂ©langĂ©e avec des coquillages broyĂ©s. Il y trempe un bĂąton pour consommer la coca puis dessiner sur le goulot, sur lequel une impressionnante accumulation de calcaire se forme avec le temps. La femme se consacre au tissage, grĂące Ă  la fibre du maguey, variĂ©tĂ© locale d'agave. On peut observer cette vie au village de Wiwa, Ă  mi-parcours, Ă©galement trĂšs apprĂ©ciable pour sa magnifique et puissante cascade. Des escaliers et des plates-formes perdus dans la jungle © Shutterstock Depuis que des touristes ont Ă©tĂ© pris en otage par la guĂ©rilla de l'ELN en 2003, seuls des militaires dorment dans la Ciudad Perdida. La deuxiĂšme Ă©tape environ 8 heures de marche se conclut donc au campement El Paraiso, situĂ© tout prĂšs du site historique. On peut y constater la popularitĂ© de la randonnĂ©e une cinquantaine de voyageurs y roupillent. Le troisiĂšme jour, Gabo nous fait lever trĂšs tĂŽt Ă  4 h 30 car il veut que nous soyons les premiers Ă  quitter le campement. AprĂšs avoir traversĂ© une riviĂšre Ă  l'aide d'une corde commence le moment fort de l'expĂ©dition le fameux escalier de la Ciudad Perdida, une construction digne des aventures de Tintin. Pas moins de 1200 marches de pierre fendent la jungle et l'aube, semblant nous emmener vers le ciel. Certains membres du groupe souffrent, mais personne ne regrettera l'effort nous voici Ă  l'entrĂ©e de la fameuse citĂ© perdue, un impressionnant complexe de plateformes dont 216 ont Ă©tĂ© mises Ă  jour. Elles ont Ă©tĂ© construites entre les annĂ©es 1200 et 1600, puis abandonnĂ©es lors de la conquĂȘte espagnole, mais recouvrent elles-mĂȘmes d'autres plateformes, les plus vieilles datant de l'an 650. Des maisons bĂąties par-dessus abritaient autour de 2000 personnes Ă  l’apogĂ©e de la citĂ©. Aujourd'hui ne restent dans la Ciudad Perdida que les deux habitations du mamo et de sa femme. Il s'agit d'un lieu sacrĂ© pour les Kogis et les Wiwas, qui le nomment Teyuna. Gabo nous impose un rituel avant d'y pĂ©nĂ©trer il faut entrer en file indienne dans un cercle de pierres, donner une feuille de coca en offrande et se libĂ©rer des mauvaises pensĂ©es
 puis on passe d'une plateforme Ă  l'autre vers le sommet. Quel bonheur d'ĂȘtre les premiers arrivĂ©s et de profiter de la quiĂ©tude et de la majestĂ© des lieux, dont les vieilles pierres dĂ©gagent cette Ă©trange force propre aux constructions qui ont dĂ©fiĂ© le temps. À vrai dire, il y a peu de choses Ă  voir dans la Ciudad Perdida, si ce n'est la beautĂ© du site et des montagnes environnantes. On n'y reste donc guĂšre plus de deux heures dĂ©jĂ , il faut redescendre l'escalier dont la difficultĂ© est maintenant due au vertige que ses marches glissantes peuvent provoquer. Un repas au campement El Paraiso, et dĂ©jĂ  il faut entreprendre le chemin du retour. © Shutterstock On dort au village de Wiwa, et l'on finit la descente le lendemain l'arrivĂ©e Ă  El Mamey se fait aux alentours de midi. Dans le 4X4 qui nous ramĂšne Ă  Santa Marta, on n'admire dĂ©jĂ  plus du tout le paysage, mais le corps souffre Ă  chaque cahot sur la piste dĂ©foncĂ©e il s'est passĂ© beaucoup de choses, en quatre jours. OĂč? Le dĂ©part se fait de Santa Marta, station balnĂ©aire festive de la mer des CaraĂŻbes, dans le nord de la Colombie. Son aĂ©roport la connecte aux principales villes du pays. Les vols intĂ©rieurs sont bon marchĂ© autour de 50 $ pour Bogota ou MedellĂ­n et de nombreux touristes les prĂ©fĂšrent au bus, qui met 15 Ă  20 heures pour franchir les mĂȘmes distances. Santa Marta est Ă  4 heures de bus de Cartagena, ville coloniale la plus visitĂ©e, sur la cĂŽte colombienne. Quand? Pas de souci d'agenda il y a des dĂ©parts tous les jours de l'annĂ©e! On recommande tout de mĂȘme la saison sĂšche, de dĂ©cembre Ă  mars. Avec qui? Difficile de faire un choix entre les agences, qui font toutes la mĂȘme description de la randonnĂ©e sur leur site web. On a choisi Baquianos, l’une des plus vieilles elle existe depuis 1977, surtout parce qu'elle dispose de quelques guides indigĂšnes. Ceci dit, des Autochtones ont fondĂ© leur propre agence, Wiwa Tours, dont les profits sont reversĂ©s dans les communautĂ©s. La plus grosse agence, Expotur, dispose aussi d'une solide rĂ©putation. Combien? 950 000 pesos colombiens par personne, soit 400 $.

LaCitĂ© du Cinema: Pour faire plaisir aux enfants pas plus - consultez 476 avis de voyageurs, 300 photos, les meilleures offres et comparez les prix pour Saint-Denis, France sur La Cite de la peur Photos Movie Info A killer copies a movie villain's modus operandi at the Cannes Film Festival, attended by the star Dominique Farrugia, his publicist Chantal Lauby and an inept bodyguard Alain Chabat. Genre Comedy, Drama Original Language French France Director Producer Writer Runtime 1h 33m Cast & Crew Critic Reviews for La Cite de la peur There are no critic reviews yet for La Cite de la peur. Keep checking Rotten Tomatoes for updates! Audience Reviews for La Cite de la peur There are no featured reviews for La Cite de la peur because the movie has not released yet . See Movies in Theaters Eneffet, l’Ordre de Favonius partit combattre les monstres de Khaenri’ah, et un dragon du nom de Durin s’attaqua alors Ă  une citĂ© sans dĂ©fense. Heureusement, Dvalin s’interposa et vainquit l’assaillant, non sans mal. Il plongea ensuite dans un sommeil profond dans l’Ancienne Mondstadt pour rĂ©cupĂ©rer de ce combat. = []; function gtag{ gtag'js', new Date; gtag'config', 'UA-46820753-39'; Skip to content AccueilCatalogue HermeticaLes Bergers d’ArcadieCorrespondancesHors collection – Grand formatHors collection – Polar & ChronosObjets – Posters – Carterie – T-ShirtsMagicien d’Oz Ze-BlogNewsletterWebzine >[ALCHIMIE – SPAGYRIE – SCIENCES de la VIE]>[ASTROLOGIE – ASTROSOPHIE – ASTRONOMIE]>[LES CHRONIQUES D’UN ASTROLOGUE] par Jacques Halbronn>[HISTOIRE – SYMBOLISME & TRADITION]>[SociĂ©tĂ©s Initiatiques – SociĂ©tĂ©s secrĂštes]>[GNOSE & Mystique ChrĂ©tienne]>[HAUT-LIEUX Magiques & SacrĂ©s]>[ Ze Insider of MARS – Space Time – SF – UFOLOGIE – Objectif MARS ]>[ Le Courrier interplnĂ©taire » – par Yves BOSSON]>[SURNATURALISME – Sociologie – Infrahistoire – Paranormal – Robotique – Cryptozoologie]>[Les AUTEURS] Arqa ed. – Revue Arcadia – La Lettre de THOT – Les Chroniques de Mars>[Le Coin des ARCHIVES]>[ARTICLES INÉDITS – ARCHIVES & DOCUMENTS INÉDITS]>[RLC 2 – ZE BOOK – Photos © ARQA ed.]>[Les Archives de L’ABC de RLC 3] 2008-2011>[Les Dossiers classĂ©s 1]199920002001>[Les BONUS] 20022003200420052006200720082009>[COLLECTOR 1 – Les posts les plus visitĂ©s] 2010 > 2022>[LES BONUS – Les posts les plus visitĂ©s] 2011>2013Le Blog Archives 2009, 2010ContactLiensMon compte Myriam PHILIBERT – ThĂ©opolis – La citĂ© de Dieu » 2 – Saint-Geniez de Dromon ROGER CORRÉARD 1931-2020 – In Memoriam Sur les traces des Nibelungen Je dois cependant faire une mise au point en prĂ©alable, la seule et unique archive existante sur ThĂ©opolis n’est autre que la Pierre Ă©crite. » Roger CorrĂ©ard Suite au dĂ©part de notre ami Roger CorrĂ©ard vers l’Orient Éternel et vers les Plaines diaphanes et enchantĂ©es du val de Chardavon, les Chroniques de Mars » publient ce mois-ci un NumĂ©ro SpĂ©cial consacrĂ© Ă  THÉOPOLIS, la fameuse CitĂ© de Dieu » telle que la dĂ©crivait saint Augustin dans ses Ă©crits et telle qu’eut envie de la rĂ©aliser concrĂštement sur cette Terre le PrĂ©fet des Gaules Dardanus. Nos abonnĂ©s trouveront Ă©galement un Dossier entiĂšrement consacrĂ© Ă  notre ami Roger CorrĂ©ard qui accorda, lui, sa vie entiĂšre Ă  localiser prĂ©cisĂ©ment la mythique CitĂ© de Provence. Par delĂ  l’espace et le temps, tous ses amis lui adressent ici aujourd’hui un dernier adieu prompt Ă  lui faire chevaucher avec amour les nuages. K2Mars – Dossier prĂ©parĂ© par Thierry E. Garnier, Patrick Berlier, Guy Tarade & Alain Le Kern. – Mai 2020. THÉOPOLIS – La CitĂ© de Dieu SAINT-GENIEZ DE DROMON Celui qui force le barrage d’Entrepierres, de la Pierre Écrite et de Cardea a enfin accĂšs au domaine. A-t-il, pour autant, son billet pour ThĂ©opolis ? En poursuivant son cheminement au-delĂ  du plateau de Chardavon, il monte et aboutit au village de Saint-Geniez de Dromon. SituĂ© sur une zone protĂ©gĂ©e par une ceinture montagneuse, il semble le centre du domaine de Dardanus, bien que cela reste Ă  prouver. Le Riou de Jabron l’arrose quand il pleut. Ce torrent ne joue les cabris, comme son nom le laisse entendre, qu’en aval de la Pierre Écrite. Arriver jusque ici c’est sentir ce que peut signifier l’expression bout du monde ». Les quelques maisons qui composent le village respirent une joie de vivre et une paix profonde. Des enfants jouent, insouciants, dans une aire encore protĂ©gĂ©e. Actuellement, la route crĂ©e une communication avec Sisteron, la Durance et le reste de la civilisation. Au temps de Dardanus, il n’y avait que des champs, l’ñpre flanc aride du TraĂźnon, dĂ©sert de rocailles, et une voie
 Quels vestiges le prĂ©fet des Gaules a-t-il pu laisser sur ce plateau Ă  vocation agricole ? Toutes les traces Ă©crites remontent Ă  l’époque mĂ©diĂ©vale. AprĂšs le dĂ©part ou la mort de Dardanus, le domaine, oubliĂ© de tous, est retombĂ© dans l’indiffĂ©rence pendant plusieurs siĂšcles. Dans l’actuelle commune de Saint-Geniez de Dromon, il y a deux Ă©glises consacrĂ©es Ă  la Vierge et deux magnifiques statues en albĂątre local. Dans le village mĂȘme, voici l’église de Notre-Dame des Groseilles, car elle dĂ©pendait du monastĂšre du Groseau, prĂšs de MalaucĂšne qui, lui-mĂȘme, appartenait Ă  l’abbaye de Saint-Victor de Marseille. La deuxiĂšme Ă©glise est celle de Notre-Dame du Dromon, au pied du fameux rocher de Dromon. Pourquoi la Vierge est-elle rĂ©vĂ©rĂ©e de façon aussi ostentatoire ? Ajoutons la fondation, aujourd’hui ruinĂ©e et non localisĂ©e du terroir de Chardavon, elle aussi placĂ©e sous la sauvegarde de Notre-Dame. Ces trois implantations apparaissent dans les textes du XIe siĂšcle. Elles impliquent donc un peuplement beaucoup plus dense qu’aujourd’hui. Notre-Dame de Grosel offre un toponyme en relation, semble-t-il, avec les eaux salĂ©es. Certains chercheurs ont Ă©mis l’hypothĂšse que le lieu mĂȘme oĂč se situe cette Ă©glise fut le site d’un culte au dieu Mithra, trĂšs populaire parmi l’armĂ©e romaine – Dardanus fut gĂ©nĂ©ral. Il s’agit d’une religion Ă  mystĂšres, se dĂ©roulant dans des cryptes, avec communion et baptĂȘme dans le sang. Des chapiteaux avec personnage portant le bonnet phrygien sont apportĂ©s comme preuve. Le lieu suscite le mystĂšre. Il est tentant d’en rajouter quelque peu pour accroĂźtre l’intĂ©rĂȘt
 Pourquoi Dardanus aurait-il appartenu Ă  cette religion, alors qu’au temps de son mandat, le christianisme Ă©tait devenu religion d’état et qu’il avait des liens Ă©pistolaires avec deux pĂšres de l’Église ? Aucune trace archĂ©ologique ne vient Ă©tayer cette supputation. Le sol, aride et soumis Ă  une Ă©rosion intense, refuse de livrer ses secrets
 Et la quĂȘte de la villa de Dardanus tourne au jeu de piste. En fait, il y a une lacune historique, qui laisse le champ libre Ă  de multiples interprĂ©tations, entre le Ve siĂšcle, date Ă  laquelle Dardanus s’installe, et le XIe siĂšcle oĂč sont mentionnĂ©s trois lieux de culte diffĂ©rents sur le territoire qui semble correspondre Ă  son domaine. L’histoire met, avec facilitĂ©, cette Ă©clipse sur le compte des invasions barbares. L’archĂ©ologie est muette. En ces moments de troubles, on construit peu et la discrĂ©tion reste de mise. Du siĂšcle de Dardanus, il ne reste 
 Myriam Philibert – ThĂ©opolis – La CitĂ© de Dieu » extrait // Les Chroniques de Mars » © – mai 2020 – NumĂ©ro spĂ©cial ThĂ©opolis. THÉOPOLIS – NUMÉRO SPÉCIAL – MAI 2020 Thierry E. GARNIER – Roger CorrĂ©ard – L’Archiviste de THÉOPOLIS » Guy TARADE – À mon ami Roger CorrĂ©ard Patrick BERLIER – – Je te garderai toujours une place dans mon cƓur » Alain LE KERN – Roger CorrĂ©ard – Le gardien de ThĂ©opolis Thierry E. GARNIER – Les Veilleurs de THÉOPOLIS » Guy TARADE – THÉOPOLIS – Documents d’Archives – AnnĂ©es 1970-1980 Roger CORRÉARD – THÉOPOLIS – GĂźte secret du lion » 1 – L’Apocalypse Roger CORRÉARD – THÉOPOLIS – GĂźte secret du LION » 2 – L’incroyable histoire du Zeppelin L 45 Patrick BERLIER – ThĂ©opolis – Un jardin d’Eden perdu en Provence Georges A. D. MARTIN – CĂ©lĂ©bration pour un parfait augure Myriam PHILIBERT – ThĂ©opolis – La citĂ© de Dieu » 1 – Chardavon Myriam PHILIBERT – ThĂ©opolis – La citĂ© de Dieu » 2 THESAVRVS // Agneau – Air – Alpha – Alphabet grec – Alphabet romain – Âne – Ange – AnnĂ©e solaire – Anthropologie – Apocalypse – Argent – Art poĂ©tique – Astronomie – Berger – Bible – Boaz – BƓuf – Carl-Gustav Jung – CarrĂ© – Cartographie cĂ©leste – CĂšne – Cercle – Chiffres – Christ – CƓur – Couleurs – Coupe Coutumes – Croix – Cromlech – Cycle lunaire – DĂ©sert – Divinations – Dolmen – Dragon – Eau – Etrusques – Feu – Figures – Formes – Gestes – Graal – HĂ©breux – Histoire – Jakin – Lion – Mains – MĂ©galithes – Menhir – MĂšre – Miel – Montagne – Myrrhe – Mythes – Mythes fondateurs – Nature des symboles – Nombres – Nombres – Omega – Or – Pain – Paradis – PhĂ©nicien – Poissons – Pythagore – Pythagorisme – Religions – RĂȘves – Runes – Sang – Sel – Serpent – Signes – Soleil – Souffle – Sumbolon – Symboles – Symboles chrĂ©tiens primitifs – Symboles dans la Bible – Symbolisme – Taureau – Temple – Terre – Tradition – Triangle – Veilleur – Vin – ZoĂ© // Thierry Emmanuel Garnier client2020-05-26T164122+0200 Textes & photos © Arqa ed. // Sur le Web ou en version papier tous les articles prĂ©sentĂ©s ici sont soumis aux rĂšgles et usages lĂ©gaux concernant le droit de reproduction de la propriĂ©tĂ© intellectuelle et sont soumis pour duplication Ă  l’accord prĂ©alable du site des Ă©ditions Arqa, pour les textes, comme pour les documents iconographiques prĂ©sentĂ©s. . 493 67 191 323 117 234 31 353

la cité de la peur torrent